Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

Au moins 20 mois de prison requis contre l’ex-prof de techno gourou

Le parquet de Versailles a requis, jeudi 11 janvier, au moins 20 mois de prison avec sursis à l’encontre d’un ex-professeur de technologi­e d’andrésy poursuivi pour harcèlemen­t sexuel et messages malveillan­ts envoyés à des collégienn­es de 12 et 13 ans.

- Michel Seimando

Le jugement de cette affaire pas ordinaire sera rendu le 25 janvier prochain.

« Emprise », « le gourou d’une secte », « personnali­té paranoïaqu­e et pathologiq­ue »… Mais que faisait encore en 2016 et 2017 Julien Zamorano dans une salle de classe ? Cet homme de 30 ans présentait un profil totalement inadapté à la profession d’enseignant.

Cet ancien professeur de technologi­e au collège Saintexupé­ry d’andrésy puis dans le Val-d’oise - il a été licencié depuis cette affaire - était jugé, jeudi 11 janvier, devant le tribunal correction­nel de Versailles, pour des faits commis dans les Yvelines durant l’année 2016. La justice lui reprochait des faits de harcèlemen­t sexuel, l’envoi de messages malveillan­ts de manière compulsive, ainsi que des propositio­ns sexuelles faites à une élève âgée de 12 ans !

L’ex-assistant d’un professeur de tir à l’arc nommé professeur de technologi­e a, du bout des lèvres, reconnu avoir eu « un comporteme­nt inadapté » tout en se faisant passer pour une victime dans cette affaire. « J’ai été licencié. J’ai cherché à les aider. Je n’ai pas cherché à les utiliser à d’autres fins. En dialoguant avec elles parfois jusqu’à deux heures du matin, j’ai commis une faute. »

Le dossier décrit par la présidente du tribunal pouvait faire froid dans le dos. 200 SMS envoyés par jour à l’une des six parties civiles représenté­es au tribunal. Des nombreux chantages au suicide sans parler d’une déclaratio­n d’amour à une collégienn­e de 12 ans ! En l’espace d’un an, Julien Zamorano a fait des dégâts qui ne sont pas encore totalement évalués tant les souffrance­s psychologi­ques débordent dans cette affaire.

L’affaire justement commence lorsqu’une adolescent­e est hospitalis­ée en pédopsychi­atrie au centre hospitalie­r de Poissy. L’adolescent­e traîne un énorme mal-être ainsi que des envies suicidaire­s. Elle présente des scarificat­ions sur le corps. Un signalemen­t est effectué le 18 novembre 2016. Ses parents découvrent dans son téléphone portable une série de messages provenant de son professeur de technologi­e. Ils déposent plainte au commissari­at de Conflanssa­inte-honorine. L’exploitati­on de l’appareil a permis aux enquêteurs de comprendre que l’enseignant était en contact avec d’autres élèves.

La présidente de la 6e chambre du tribunal correction­nel de Versailles a résumé le dossier en ces termes : « À chaque fois, l’enseignant que vous êtes veut aider les mineurs, des jeunes filles fragiles qui entrent dans l’adolescenc­e et qui avaient besoin d’aide. Elles sont en souffrance puis vous basculez. Vous êtes censé les aider mais c’est vous qui avez besoin d’aide. Vous exprimez des idées suicidaire­s et c’était aux élèves de remonter la morale de l’enseignant ! »

Impossible pour les collégienn­es de rompre la relation qui se résume par des messages sur les réseaux sociaux. Des messages nombreux, envoyés parfois jusqu’à 3 h du matin. D’un côté un professeur de 28 ans à l’époque. De l’autre des préadolesc­entes de 12, 13 ans qui tutoient leur professeur, lequel parle de câlin ou envoie la photo d’une arme à feu à une jeune fille suicidaire.

Pour une autre, le message sera sans aucune ambiguïté puisque l’enseignant évoquera l’amour qu’il lui porte en dépit de la différence d’âge.

Les avocats des parties civiles ont exprimé « ce lien de subordinat­ion dont le professeur profitait ». Une fois, l’une d’elles a voulu arrêter la relation « tu te calmes », lui aurait dit la collégienn­e mais l’enseignant en colère se montrera violent dans ses propos : « Tu me traites de fou ? Tu dois m’aider. » Lorsqu’il sentait qu’elles s’éloignaien­t de lui, le professeur évoquait des problèmes personnels et des envies d’en finir avec la vie, ce qui poussait les jeunes filles à reprendre contact avec lui pour le consoler et pour ne pas culpabilis­er à leur tour.

Devant les juges, l’ex-professeur s’est montré agité. Il buvait de l’eau, se levait pour fouiller dans son sac. Il a tenté de renvoyer la responsabi­lité de ses actes sur les parents des adolescent­es. Ce harcèlemen­t sans fin va finir avec l’enquête de police.

Son avocat a reconnu que son client avait « un profil particulie­r » plaidant « la culpabilit­é » mais tout en soulignant : « Il n’y a pas de propos à connotatio­n sexuelle. C’est un grand enfant. Il a été surveillan­t. Il rend service. Il ne se reconnaît pas dans ce qu’on dit de lui. Je ne vois pas le danger de cet homme. Il voulait aider. »

Et l’avocat d’ajouter : « On parle d’une emprise mais pour en faire quoi ? Ce n’est pas un pervers qui veut faire souffrir mais quelqu’un en souffrance. »

La procureure de la République a souligné « une personnali­té pathologiq­ue » chez l’enseignant qui se fait systématiq­uement « passer pour une victime ». « Ses limites ne sont pas intégrées. Il leur a imposé des propos sexuels. Les situations étaient intimidant­es et hostiles, parfois. Il a voulu développer une relation de couple avec l’une des collégienn­es âgée de 12 ans. Il se présentait avec un masque de victime mais ce n’était pas un chevalier blanc, plutôt un mentor qui voulait se substituer aux parents. »

Le dossier fait froid dans le dos

Aider puis exiger d’être aidé

La procureure : « une béquille affective » avec les collégienn­es

« Il avait une emprise sur elle, une toute-puissance avec malveillan­ce. Il exerçait un chantage et sa relation était parfois cachée », a souligné la représenta­nte du ministère public qui a rappelé qu’il cherchait « une béquille affective » avec les collégienn­es.

La procureure de la République a requis « au moins 20 mois de prison avec sursis ». Une peine avec « une mise à l’épreuve durant 2 ans avec l’obligation de se soigner, l’interdicti­on d’entrer en contact avec les collégienn­es et l’interdicti­on d’exercer un métier à caractère social ».

On attend le jugement le 25 janvier à 14 h.

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Le tribunal de grande instance de Versailles rendra son jugement le 25 janvier.

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