Le Cycle

Roger la gouaille

Pomeys (Rhône) – Chère à Gérard Salmon, son fondateur, la Vélocithèq­ue, une associatio­n de collection­neurs et d’historiens, avait choisi pour sa réunion annuelle d’évoquer la vie et la carrière du champion stéphanois.

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Jean-Paul Bourgier, professeur d’histoire et de géographie à la retraite, auteur de plusieurs ouvrages remarqués sur le vélo, a parlé de l’impact qu’a eu la chute de Roger Rivière dans la descente du col du Perjuret lors de la 14e étape du Tour de France 1960 dans Saint-Étienne, « ville prospère, ouvrière et laborieuse » . Les gens ont pris « un coup sur la tête » . « Toutes proportion­s gardées, ajouta-t-il, son accident et son abandon forcé ont provoqué localement le même effet que dans le monde l’annonce de l’assassinat de Kennedy. » Roger Rivière, en effet, était appelé à un grand avenir sportif. Admiré, adulé, vainqueur du Tour d’Europe des amateurs et indépendan­ts en 1956, avec deux étapes, deux fois détenteur du record du monde de l’heure en 1957 et en 1958, lui qui avait commencé à l’usine comme ajusteur incarnait cette formidable promotion sociale. Dès ses premiers succès, il s’offre une villa à Veauche, dans la plaine du Forez, à quelque trente kilomètres de sa ville natale. Mais le destin en décida autrement. Sa carrière fut une succession d’exploits et de drames qui ont alterné sans arrêt. Le Tour d’Espagne 1959 perdu sur crevaison avec une voiture qui n’arrive pas. L’année suivante, c’est une échappée à deux en compagnie de Louison Bobet sur ParisRouba­ix avant de se faire rejoindre. Fin 1957, une fracture de la clavicule et fin 1958, une fracture du pubis perturbent sa saison. Lors du Tour 1959, Rivière avait dominé Anquetil avec un contre-lamontre. Il y eut le record du monde de l’heure deux fois mais aussi six minutes éblouissan­tes. Le 4 septembre 1958, sur la piste du Parc des Princes, à Paris, il remporta haut la main les Championna­ts du monde de poursuite. Vingt jours plus tard, sur la piste du Vigorelli, à Milan, Roger Rivière portait le record du monde de l’heure à 47, 347 km malgré une crevaison dont certains ont dit qu’elle lui avait fait perdre un tour, soit 400 mètres. Quant à sa reconversi­on forcée, elle fut chaotique. Ses diverses affaires, la brasserie Le Vigorelli, en plein centre de Saint-Étienne, son garage, sur le cours Fauriel, son camp de vacances, se sont toutes terminées par des faillites. Contempora­in de Poulidor, malade, opéré d’un cancer, Roger Rivière termina sa vie le 1er avril 1976, à l’âge de 40 ans, après seize années de souffrance.

G.P.

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Gérard Salmon, fondateur de la Vélocithèq­ue.

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