La Région veut faire sans l’Eure
L’Eure ne veut pas payer pour le projet d’autoroute ? On fera sans, rétorquent la Région Normandie, le Département de Seine-Maritime et la Métropole Rouen Normandie. Ils revoient leur participation financière à la hausse.
« Cela fait 40 ans que la Normandie attend le contournement Est. » Hervé Morin s’impatiente ! Le 13 septembre, le président de la Région Normandie a présenté un nouveau plan de financement pour le projet d’autoroute. En bouclant le budget, il espère convaincre le gouvernement de lancer le chantier au plus vite. La Métropole Rouen-Normandie et le Département de la Seine- Maritime ont revu leur participation à la hausse pour pallier la défection du Département de l’Eure, qui avait annoncé qu’il ne mettrait pas un sou dans le projet.
890 millions d’euros
La nouvelle autoroute doit relier l’A13 à l’A28 entre Le Vaudreuil et Quincampoix : 42 kilomètres, deux fois deux voies, et un chantier estimé à 890 millions d’euros.
Selon le plan de financement présenté le 13 septembre, 400 millions d’euros seraient à la charge du concessionnaire (en échange de quoi il fera payer un péage). Le reste serait financé par les deniers publics. L’État mettrait sur la table 245 millions et les collectivités locales se partageraient les 245 millions restants : 157 millions pour la Région, 66 millions pour la Métropole et 22 millions pour le Département de la Seine-Maritime.
« Cet accord permet d’envisager la mise en service en 2024 de ce chaînon manquant de l’axe CopenhagueLisbonne et par là même, de celui du grand contournement de Rouen » , assurent les signataires, Hervé Morin, Pascal Martin (pour la Seine-Maritime) et Frédéric Sanchez (président de la métropole).
Les regards se tournent vers Sébastien Lecornu
Le grand absent de cet accord, c’est le Département de l’Eure. Quand il était président de l’Eure, Sébastien Lecornu avait annoncé que sa collectivité ne financerait pas le projet en l’état. Le Conseil départemental ne s’opposait pas à la construction de la nouvelle autoroute, mais posait ses conditions (voir encadré).
Les regards se tournent à nouveau vers Sébastien Lecornu, devenu membre du gouvernement. Il est aujourd’hui secrétaire d’État auprès de Nicolas Hulot, le ministre de la transition écologique et solidaire, qui prône une politique bas carbone.
Nicolas Mayer- Rossignol, ancien président socialiste de la Région Haute-Normandie, et grand défenseur de ce projet d’autoroute, s’inquiète. Il prend à partie les deux ministres eurois, Sébastien Lecornu et Bruno Le Maire.
« L’absence du Département de l’Eure dans ce tour de table est choquante et inquiétante. Elle semble annoncer un désengagement du gouvernement. Ce dernier compte en effet deux ministres eurois, MM. Lecornu et Le Maire. Comment ne pas s’inquiéter de les voir cautionner, de fait, le retrait du Département de l’Eure ? Faut-il voir dans leur attitude le signal d’une menace pesant sur l’avenir même du contournement est ? »
Hervé Morin met la pression. Le 13 septembre, au JT de France 3, il s’emportait : « Si l’État refusait de financer ce projet, ce serait, pour la Région Normandie, une agression, purement et simplement ! » .
Le dossier du contournement est bien dans les mains du Conseil d’État qui doit reconnaître le projet « d’utilité publique » avant le 11 janvier 2018. C’est seulement à partir de ce moment que l’État pourrait s’engager financièrement et lancer les travaux.
Les grands projets passent à la moulinette
Mais cela n’est pas encore joué. La collègue de Sébastien Lecornu, Elisabeth Borne, secré- taire d’État chargée des transports, vient justement de lancer les Assises de la Mobilité : on doit y étudier tous les grands projets (comme l’autoroute) qui seront définis dans la loi d’orientation début 2018. Elisabeth Borne demande clairement aux acteurs du transport de revoir leur copie en termes de financement : « Il faudra trouver de nouvelles ressources » .
Les opposants à l’autoroute veulent y voir un signe. « On fait une pause dans les grands projets » croit savoir Laëtitia Sanchez, élue écologiste à la Région Normandie. « Avec ces assises de la mobilité, toutes les régions repassent à la moulinette. »