Un avion très redoutable
Quatrième et dernière partie. Le Breguet 14 s’imposa par ses qualités. Il fut bon à presque tout : observation, réglage d’artillerie, reconnaissance à très haute altitude, bombardement, chasse, évacuation sanitaire, transport. Une polyvalence exceptionnel
Quatrième partie. Vint le temps de partir sur les cinq continents.
Le procédé consistant à lâcher des bombes en traînée par des formations d’avions, tel qu’il était défendu par les frères Michelin, n’était pas en soi plus précis que la méthode antique du jeté de projectile pardessus bord ; il augmentait simplement les chances de frapper le coeur de la cible. En revanche, contre des concentrations de troupes, le largage en pluie de projectiles d’un calibre encore moyen pouvait être ravageur. Il le fut du 15 au 17 juillet 1918 pendant la seconde bataille de la Marne, plus haut fait d’arme des escadres de Breguet 14, alors que les Allemands lançaient ce qui fut leur dernière offensive, traversant la Marne sur des passerelles tendues sous la surface de l’eau, invisibles du sol mais pas du ciel, hors de portée de l’artillerie mais pas de l’aviation. Le bombardement aérien français et les combats que livrèrent les chasseurs allemands, dont les Fokker D. VII désormais nombreux et aussi performants que les Spad 13, emplirent les matins et les après-midi de ces trois journées. “Cette fois encore, écrivit René Martel, non sans exagération, le bombardement de jour lancé par masses dans la mêlée oubliait toute préoccupation de tactique. Les escadres partaient, attaquaient à basse altitude, revenaient à leurs centres [bases], faisaient le plein d’essence et de bombes avant de s’engouffrer à nouveau dans la fournaise. L’artillerie antiaérienne éclaircissait
leurs rangs. (…) Une inhabituelle clémence du sort (…) voulut que les pertes ne fussent pas excessives.” Composante de bombardement de la 1re Brigade, la 12e Escadre lança le 15 juillet six passages à travers la Marne, sous un ciel couvert et bas, de 9 heures du matin à 9 h 35, 88 Breguet 14 protégés par les Caudron R 11 des escadrilles C RXI 239 et 240. Les assauts furent portés de 800 à 1 200 m d’altitude avec 17 224 kg de bombes et 6 500 cartouches ; 74 Breguet renouvelèrent ces attaques vers 18 heures avec 18 620 kg de bombes (250 kg par avion) et 3 500 cartouches. L’escadre perdit deux avions et eut un blessé. Les mêmes cibles furent visées à peu près au même moment par 62 Breguet 14 de la Brigade Féquant, lâchant 9 t de bombes. Le lendemain 16 juillet, sous l’orage, en milieu d’après-midi, tandis que la chasse livrait de difficiles combats dans les lignes ennemies, 70 Breguet escortés par quatre Caudron s’en prirent de nouveaux aux passerelles encore utilisables et, surtout, à des concentrations de troupes avec près de 17 t de bombes et trois milliers de cartouches. Deux Caudron réussirent à décourager une douzaine de Fokker, mais un autre fut perdu par ailleurs ; un chasseur allemand fut abattu. La Brigade Féquant s’en prit de nouveau aux passages de la Marne avec 36 Breguet répartis en cinq pelotons, mais y laissa quatre avions. La Royal Air Force se jeta sur l’ennemi au ras du sol avec des effets terrifiants et des pertes bien plus élevées pour elle.
Il est certain que l’aviation joua pendant ces trois journées un rôle décisif qui fit d’un franchissement de rivière un enfer inattendu pour les Allemands, et contribua largement à enrayer leur progression. Le 18 juillet, le gain par les Alliés de cette autre bataille de la Marne annonça la défaite allemande dans la guerre. Lors de la contre-offensive française, les deux escadres de bombardement, 12e et 13e, furent réunies sur le même aérodrome pour aller détruire les dépôts des Allemands puis harceler leurs positions, cette fois à très basse hauteur, contraintes à cela par une très mauvaise météo mais aussi parce que l’évidence de leur efficacité galvanisait les équipages. Le 21, les armées allemandes lâchant prise, les Breguet eurent pour mission de “prendre l’offensive et d’augmenter la confusion des lignes arrières de l’ennemi de 4 à 8 heures du matin et de 12 à 16 heures” (le délai servant à panser les plaies, aux ravitaillement et réarmement). Nouvelle tactique aussi : les Caudron devaient se placer aux points d’entrée et de sortie des bombardiers un quart d’heure avant eux pour nettoyer le ciel, d’autres se maintiendraient au-dessus des objectifs en couverture.
En septembre, la bataille de Conflans, en Lorraine, sur un noeud ferroviaire tout proche de l’aérodrome de la chasse allemande à Jarny, donna lieu à un combat aérien de 40 minutes au cours duquel “chasseurs et bombardiers se fusillant à 20 m”, cinq Breguet et un Caudron furent abattus avec leurs équipages tués, deux autres Breguet ramenant chacun un blessé ; huit victoires furent revendiquées par les Français. Le 23, l’ensemble des
unités de bombardement de jour fut regroupé au sein d’une brigade de bombardement commandée par une célébrité, le chef de bataillon Louis de Goÿs de Mézeyrac, et placée plus en retrait du front afin de pouvoir agir à la demande sur une plus vaste étendue. En octobre, cette brigade lança, avec jusque 150 Breguet 14 simultanément, 119 t de bombes que les témoins assimilèrent au déversement de cailloux par des tombereaux. Dernière sortie offensive de la guerre : le 10 novembre, 86 bombardiers français touchèrent les alentours de Marienbourg, en Allemagne, à 150 km du front cette fois.
Une lecture rapide des pertes des unités de Breguet 14 (1) avec 645 tués en combat et plus de 300 avions perdus au feu de l’ennemi, montre que le taux des pertes fut équivalent à celui que put subir, par exemple, le Bomber Command de la Royal Air Force pendant la Deuxième Guerre mondiale.
Le Breguet 14, avion espion
On sait peu qu’un palmarès officiel des as du bombardement fut établi pour honorer les pilotes et observateurs ayant accompli au moins 100 missions. Le premier d’entre eux fut le lieutenant Lemaître. Il est aussi un autre as, également oublié bien que son nom soit familier au moins à nos lecteurs : Paul-Louis Weiller fut l’As de la reconnaissance, ce qui lui valut de se faire offrir très officiellement en 1917, par le ministre de l’Armement, un cabriolet blanc Sigma en même temps que son camarade chasseur Georges Guynemer. Ingénieur centralien de 21 ans à la déclaration de guerre, Paul-Louis Weiller était venu à l’aviation par l’Artillerie. Son introduction de la photogrammétrie (2) dans l’aviation de reconnaissance et sa détermination l’avaient vite fait remarquer. Pilote de reconnaissance à partir de 1915, titulaire d’une victoire en combat aérien, blessé plusieurs fois, il tira parti du renom et des relations de son père député et industriel, Lazare Weiller, pour dénoncer dans la presse en 1916 la mauvaise qualité des avions français, provoquant indirectement un esclandre à l’Assemblée nationale et, finalement, en mars 1917, le renvoi du ministre de la Guerre, le général Hubert Lyautey ! En octobre 1917, il fut promu au commandement de l’Escadrille 224, transformée peu après sur Breguet 14 A2.
À cette époque, les chefs des unités de reconnaissance et d’observation se plaignaient de plus en plus d’un règlement inadapté. Fort de sa réputation, de ses soutiens politiques et de l’expérience acquise avec des appareils photographiques de très longue focale (jusqu’à 2 m pour des formats 18 x 24 mm), Paul-Louis Weiller préconisa la création d’unités de grande reconnaissance pour travailler non plus autour du front,
mais en profondeur au-dessus des territoires adverses sur de grandes distances à très haute altitude. Le Breguet 14 avait les performances nécessaires pour une telle mission qui, au début, en avril 1918, fut exécutée avec des A2 allégés par démontage de leur éolienne et de deux des mitrailleuses. Les équipages affrontaient un froid glacial et le manque d’oxygène qui les endormait malgré une migraine douloureuse ; la mauvaise carburation du moteur provoquait des vibrations qui déformaient les avions dont il fallait régler les cellules après deux ou trois vols. Néanmoins, seuls les avions à moteur ayant moins de 30 heures de fonctionnement, donnant encore toute leur puissance, pouvaient dépasser 5 000 m.
Weiller pensa que le Breguet 14 devait être rendu monoplace pour être réaménagé avec une plus grosse réserve de carburant et d’huile et un équipement spécifique. Quelle fut donc cette version idéale ? Depuis l’été de 1917 existait le Br 14 B1, monoplace désarmé à grande autonomie. Les 150 kg d’armes, de munitions, d’équipement et de mitrailleur de la tourelle arrière étaient transformés en environ 200 l d’essence supplémentaires, soit deux heures et demie d’autonomie en plus, le tout placé au centre de gravité, devant le pilote dont la position était reculée. Devant celui-ci, il y avait donc bien assez d’espace pour installer verticalement un appareil photo à très longue focale. Cependant, dans un témoignage rédigé pour L’Aéronautique pendant la guerre mondiale, édité par de Brunoff en 1920, Paul-Louis Weiller évoque sans trop de détails la suppression de la tourelle puis de l’observateur, procurant “pour ses avions surchargés de 5 heures d’essence, [un gain de 150 kg] particulièrement appréciable” ; L’avion était donc un A2 à bord duquel l’appareil de prise de vue verticale était placé dans le dos du pilote, sur sa droite. C’est pourquoi Weiller mentionne aussi la nécessité qu’il y eût de concevoir des appareils photo “pouvant être maniés par le pilote tout seul aussi bien pour le déclenchement que pour l’escamotage”, or apparurent en très petit nombre, à partir de 1918, des appareils photo Aubry automatiques à commande électrique ; sans doute s’agissait-il de ceux-ci. Ces Breguet monoplaces de reconnaissance à haute altitude possédaient une génératrice éolienne pour fournir du courant, y compris pour des combinaisons de vol chauffantes (plus ou moins fiables), un inhalateur d’oxygène alimenté par deux bouteilles, un réservoir d’essence supplémentaire et une caméra spéciale électrique ; ils auraient été officieusement désignés A1.
Avec une caméra spéciale de grand format à changement de
plaque semi-automatique et longue focale, il était possible d’établir des relevés photographiques du sol sur plusieurs centaines de kilomètres de long et quelques milliers de mètres de large. À très haute altitude, le pilote respirant normalement au moyen du masque inhalateur d’oxygène, le Br 14 était, grâce à sa vitesse, quasiment invulnérable ; la protection d’un mitrailleur ne lui était plus nécessaire, pas plus que celle d’une escorte ,si bien que, solitaire, il était quasiment indétectable depuis le sol. Au-dessus du territoire ennemi, loin du front, comme il n’avait plus de défenses à craindre, il pouvait éventuellement descendre pour ramener des images encore plus précises. “Au cours des trois derniers mois de la guerre, écrivait Weiller, ces reconnaissances furent conduites journellement à des altitudes comprises entre 6 400 et 6 700 m (…) Ce travail prit naissance en juillet 1918. L’avion partait de nuit pour se trouver avant le jour au point qui lui était indiqué, à une centaine de kilomètres à l’intérieur des lignes ennemies”, de sorte que le pilote pouvait noter les passages des trains, principal outil de la logistique allemande qui ne circulait plus de jour dans les environs du front depuis 1916. Weiller ne dit pas ce que ces missions avaient de très éprouvant pour l’organisme.
Il fallait une certaine audace pour imaginer ce profil de mission, ou, plus simplement, un esprit logique sans affect. Dans L’Aéronautique pendant la guerre mondiale, PaulLouis Weiller exposait aussi ce qu’était la charge de travail du pilote solitaire lors de ses missions si particulières à très haute altitude, sur un parcours fixé à l’avance qu’il fallait suivre très rigoureusement dans une froidure extrême, aux commandes d’un avion évoluant à son plafond, à la limite du décrochage comme sur une tête d’épingle, tout en surveillant de près le fonctionnement du moteur. Il appartenait aussi au pilote de calculer de tête le temps séparant deux prises de vue en fonction de la vitesse de l’avion par rapport au sol, de sorte que les images fussent légèrement superposées pour constituer un panorama continu ; l’intervalle moyen cité était 40 secondes. La charge de travail était donc lourde.
Paul- Louis Weiller commença d’expérimenter en décembre 1917 sa méthode exigeant un long apprentissage, préparation minutieuse et matériels spéciaux ; selon le témoignage du lt Jean Cornot, commandant la Br 229, les grandes reconnaissances furent instaurées après le début de la grande offensive Michael allemande du 21 mars 1918. En juillet 1918, le haut commandement créa avec les escadrilles Br 45 et Br 220 le Groupement Weiller de grande reconnaissance, rattaché directement au généralissime Ferdinand Foch, commandant en chef du front Ouest, pour opérer sur l’ensemble de ce front, des Vosges à la Manche. Chaque mission pouvait photographier un territoire de 150 km de long jusqu’à 120 km en profondeur chez l’ennemi et ramener des informations d’une importance considérable. Saisissons-nous aujourd’hui ce que cela signifiait en 1918 ? C’était aussi futuriste et extraordinaire que les missions des U-2 pendant la guerre froide ! Paul-Louis Weiller inventa, d’une certaine manière, l’“avion espion”. Mais qui put le savoir en dehors de quelques officiers supérieurs du Grand Quartier général ? Car, raconte l’historienne du renseignement Marie-Catherine Villatoux dans la Revue historique des armées n° 261 (2010), ce ne fut pas “le fait du hasard si c’est Foch en personne qui, le jour de l’armistice, remet dans son bureau au jeune officier l’insigne de chevalier de la Légion d’honneur et lui fait jurer de garder le secret sur sa méthode de reconnaissance photographique de grande profondeur”. Foch tint Weiller en si haute estime qu’il en fit son aide de camp pendant la négociation du traité de Versailles en 1919.
Le dernier vol de guerre
Ce qui est considéré comme la dernière mission de la guerre fut accompli par un Br 14 A2, et se déroula ainsi, selon le témoignage du lt Gustave Minier, pilote à la Br 35 (3) : “Je courus au hangar où s’abritait mon vieux Breguet et je donnai l’ordre à mon mécano, absolument ahuri, d’enlever les mitrailleuses et de placer à chaque extrémité des ailes de grandes flammes blanches.
Après quoi, ce fut l’attente. Mes camarades partaient en mission et faisaient leur travail quotidien pen- (3) Cité par Albin Denis sur son site.
dant que je me morfondais dans l’attente d’un ordre qui ne venait pas. Enfin, dans la nuit du 10 au 11 [novembre 1918], la sonnerie du téléphone résonna dans la tente que je partageais avec le chef d’escadrille et un autre camarade, le lt Henri de Puybaudet, pilote comme moi.
Nous entendîmes une exclamation : “Ah ! bravo !” et immédiatement, le capitaine nous cria : “C’est fini, les enfants, l’armistice est signé.” Il ajouta, à mon intention : “Un parlementaire allemand vient du GQG, vous partirez avec lui dès qu’il sera arrivé, prenez vos dispositions.” Le kapitän Hermann von Geyer (futur général), porteur de la convention d’armistice signée, fut ainsi transporté depuis Tergnier jusqu’au quartier général allemand de Morville à Spa, en Belgique.
Le Breguet 14 et ses semblables étrangers
La polyvalence du Breguet 14 est facile à résumer avec quelques chiffres. Le 11 novembre 1918, 870 Br 14, principalement des A2, étaient engagés sur l’ensemble des fronts de cette guerre. L’avion dotait 82 escadrilles françaises, 15 de bombardement, 21 de réglage de tir, 24 de corps d’armée (reconnaissance, appui, observation), 14 de reconnaissance, auxquelles on peut ajouter huit escadrilles franco-serbes, soit le tiers de l’ensemble des escadrilles des forces aériennes françaises. Sa valeur se mesure aussi à l’aune de sa concurrence, à savoir les Gotha et les DH 4. Il est indubitable que, pour les Français, à partir de la fin 1916, la référence allemande était le bombardier Gotha G.IV ou G.V, bimoteur (deux Mercedes D IVa de
260 ch) et triplace, capable d’emporter 300 à 500 kg de bombes à plus de 4 000 m d’altitude sur un peu moins de 500 km, mais à 140 km/h au mieux. Cependant il n’en fut pas construit 500.
L’équivalent britannique du Br 14 fut le plus petit De Havilland DH 4 de 220 à 400 ch, dont une version put atteindre 230 km/ h, mais qui volait généralement entre 170 et 190 km/h. Il en fut construit près de 6 300 dont plus de 4 800 aux ÉtatsUnis. Le DH 4 emportait 200 kg de bombes avec une autonomie de 3 à 4 heures et demie, et fut décliné en une foultitude de versions et variantes militaires et civiles. Son successeur DH 9, avec des performances comparables, fut construit en plus de 4 000 exemplaires.
Avatars militaires et civils de l’après-guerre
Deux dérivés directs du Breguet 14 étudiés pendant la guerre ne furent mis en service qu’après l’armistice. Le premier fut le bombardier de nuit biplace Breguet 16 Bn2. Le changement principal par rapport au 14 était l’envergure, portée à 16,90 m pour les ailes supérieures comme inférieures munies d’une paire d’ailerons supplémentaire. La surface totale était 72,8 m2. La longueur hors-tout était portée à 9,75 m par un agrandissement important du gouvernail ; la dérive était réduite. Les deux habitacles étaient réunis en un seul, ce qui rapprochait le pilote et son équipier.
Le 8 août 1918, Jean Caninet fit les essais officiels de cet avion. Ce ne fut guère mirifique. Avec un moteur 12Fe, la charge utile de 1 128 kg comprenait 500 kg de bombes, mais, à la masse totale de 2 396 kg, ce Breguet était un veau. Une large ouverture protégée par un saute-vent, sur le flanc droit du fuselage sous la tourelle, devait en outre augmenter la traînée. L’avion montait mal (à peine moins d’une heure pour atteindre 3 500 m) et pas très haut, ne dépassait pas 160 km/h près du sol à 1 560 tours ou 154 km/h à 1 000 m, et possédait des qualités de vol très médiocres. Avec une surface alaire dépassant celle d’un Dassault “Falcon” 7X, mais 350 ch, c’était une sorte de gros moto-planeur difficile à manier en atmosphère agitée ; la présence des deux ailerons supplémentaires le montre, mais ces quatre gouvernes actionnées par un même câble alourdissaient encore une commande de roulis déjà peu réputée pour sa souplesse. “Les commandes sont lourdes en général ce qui le rend plutôt fatigant”, commenta Caninet, qui ajoutait “la visibilité est infi niment moins bonne, surtout pour le passager… Le moteur chauffe”, avant de mettre en garde contre cette envergure qui amenait les ailes dangereusement près du sol si on inclinait un peu au décollage ou à l’atterrissage. En 1919, la remotorisation du Br 16 fut étudiée avec un “Liberty” de 450 ch.
Construit en 200 exemplaires, le Br 16 Bn2 entra en service en 1921 au sein du 21e Régiment d’aviation où il remplaça dès 1922 le bimoteur Farman 50, né à peu près en même temps que lui, mais insuffisamment performant et brièvement utilisé pendant la guerre. Quelques-uns furent exportés.
Dans le cadre du programme des chasseurs biplaces de 1918, Louis Breguet étudia plusieurs projets dont celui d’un dérivé de Br 14
avec un moteur Lorraine 12Da de 370 ch. Ces travaux donnèrent le Breguet 17 C2, une extrapolation plus compacte, motorisée avec un Renault 12 Ka de 420 ch et armé avec deux mitrailleuses synchronisées commandées par le pilote, deux autres sur la tourelle et une cinquième, ventrale. 450 l d’essence étaient contenus dans deux réservoirs, l’un blindé, l’autre éjectable. Le moteur 12 K avait à peu près l’encombrement du 12 Fe bien que, avec un alésage et une course de 134 et 180 mm, sa cylindrée fut 26 l. Ce moteur fut essayé sur un Br 14 A2 qu’il tirait à 203 km/h à 2 000 m.
Les essais du Br 17 prototype, fin août ou début septembre 1918, furent décevants avec une vitesse de peu inférieure à 208 km/h, des temps de montée trop longs et des commandes trop lourdes. La STAé estima que les “SEA” 4 et Hanriot C3 faisaient mieux… Breguet dut modifier son Br 17. La structure de la voilure fut renforcée pendant les essais statiques, amplement réussis au coefficient de 7,5 le 10 octobre 1918. Avec un profil de voilure plus creux qui réduisit sensiblement les temps de montée, un gouvernail de direction équilibré par un bec débordant et agrandi, et un Renault 12 Kb de 450 ch, les performances relevées en novembre furent meilleures. Les caractéristiques et les résultats d’essais en vol du 31 juillet au 6 août 1919 furent les suivants : envergure : 13,4 m (14,24 en prenant en compte les becs d’équilibrage des ailerons de l’aile supérieure) ; longueur : 8,1 m ; hauteur : 3,42 m ; moteur Renault 12Kb ; hélice Ratier 82 ; charge utile : 625 kg ; poids total : 1 846 kg. Vitesse maximale : 216,5 km/h à 1 670 tours et 1 000 m, 183 km/ h à 5 000 m. Plafond pratique : 6 900 m.
Le Hanriot 3 fut le seul chasseur biplace français à entrer en service – dans une seule escadrille – tout en fi n de guerre, et le nombre de Breguet 17 C2 construit n’est pas connu mais n’a probablement pas excédé quelques dizaines. Leur autonomie fut mise à profit par quelques pilotes de… bombarde-