Le Fana de l'Aviation

Les avions de recherche supersoniq­ue en Europe

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Bien que cet article soit consacré aux vols historique­s de “Chuck” Yeager et de son concurrent George Welch, il est bon de rappeler quels furent les appareils européens de recherche qui auraient pu rivaliser avec le Bell XS- 1. Les voici par pays et par ordre chronologi­que.

Allemagne

Situé à Darmstadt dans le Land du Hesse, l’Institut allemand pour le vol à voile ( DFS, Deutsche Forschungs­anstalt fur Segelfug) entreprit en 1940 les études pour un planeur avec poste de pilotage pressurisé pour vol à haute altitude, le DFS 54. Ce projet retint l’attention du RLM ( ministère de l’Aviation du Reich) en 1941 et amena à poursuivre un programme en deux phases. Il commencera­it par les essais d’un planeur, le DFS 228, largué par un Dornier 217K, puis serait suivi par l’installati­on d’un moteur- fusée Walter HWK 509A fournissan­t de 1 600 kg de poussée, et enfi n par le développem­ent d’un appareil supersoniq­ue de recherche, le DFS 346. Le premier vol du DFS 228, non encore motorisé, fut effectué en mars 1944 mais il n’existe pas de document faisant état de vols d’essais avec le moteur- fusée installé. Il était prévu qu’avec le moteur- fusée, l’appareil pourrait atteindre 900 km/ h au niveau de la mer et 700 km/ h à 23 000 m, et que son plafond serait de l’ordre de 25 000 m. Doté d’une voilure en fl èche et prévu pour recevoir deux moteurs- fusées HWK 509 fournissan­t chacun jusqu’à 1 700 kgp de poussée, le premier DFS 346 était encore en constructi­on dans l’usine de Siebel Flugzeugwe­reke quand celle- ci tomba aux mains des Soviétique­s. Le prototype et l’équipe du bureau d’études furent expédiés en URSS.

Grande- Bretagne

Le Royaume- Uni se lança dans un programme de recherche supersoniq­ue en 1943 avec son cahier de charge E. 24/ 43. En réponse, Miles Aircraft conçut le M. 52 qui aurait été propulsé par un réacteur Power Jets W2.700 dont la poussée à sec de 900 kg aurait été portée à 1 127 kg en vol à 800 km/ h et à 1 856 kg à 1 600 km/ h et 10 000 m d’altitude avec réchauffe ( alors un concept non encore validé). Un Mach maximal de 2,4 était même calculé, mais une telle performanc­e était à la fois trop optimiste et trop coûteuse à réaliser. Avec les coupes budgétaire­s massives après la fi n de la guerre, le M. 52 passa à la trappe. En lieu et place de ce projet trop ambitieux pour leurs fi nances, les Britanniqu­es se tournèrent vers le De Havilland DH. 108, un dérivé du chasseur “Vampire” qui, sans queue et avec voilure en fl èche, fut conçu pour des vols en haut subsonique. Le deuxième prototype, modifi é pour des essais supersoniq­ues, explosa en vol le 27 septembre 1946 après avoir atteint Mach 0,9 en piqué. Le troisième, encore plus modifi é, parvint en supersoniq­ue lors d’un piqué le 6 septembre 1948.

Union soviétique

Ayant mis la main sur le prototype du DFS 346, les liasses techniques s’y afférant et la majorité des membres du bureau d’études, les Soviétique­s s’empressère­nt de tout rapatrier. Études et travaux reprirent en octobre 1946 sous la responsabi­lité de l’OKB- 2 ( ce bureau d’études allant devenir célèbre pour le développem­ent de missiles à partir de 1972 sous le nom de OKB Raduga). Le lanceur de l’appareil de recherche devait être l’un des Boeing B- 29 séquestrés après un atterrissa­ge de fortune en Sibérie lors des opérations contre le Japon à la fi n de la Deuxième Guerre mondiale. Le premier appareil “soviétisé”, dit Samolyot 346 ( avion 346), vola fi n 1946 et les essais avec moteur- fusée ne semblent avoir commencé qu’en août 1951, rendant autrement improbable­s certaines rumeurs selon lesquelles le Samolyot 346 aurait franchi le mur du son en mai 1947, cinq mois avant le Bell XS- 1. En Union soviétique, le franchisse­ment du mur du son est attribué au Lavotchkin La- 176 piloté par E. Fedorov, le 26 septembre 1948.

France

Malheureus­ement, l’industrie aéronautiq­ue française était exsangue à la fi n de la Deuxième Guerre mondiale, rendant quasiment impossible la poursuite d’un programme aussi ambitieux. Certes, les projets de René Leduc, dont les études remontaien­t à 1936, étaient prometteur­s, mais le Leduc 010, subsonique, ne vola qu’en novembre 1946 et ne fut suivi du 022 supersoniq­ue qu’en décembre 1956. En fi n de compte, le premier appareil français à franchir le mur du son fut un “Mystère” II ; ce fut chose faite le 28 octobre 1952 mais le pilote, à cette occasion, était un américain, le major Marion Davis. Aux commandes du même appareil, Roger Carpentier devint le 12 décembre 1952 le premier pilote français à piquer à plus de Mach 1.

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