Le Fana de l'Aviation

30 ans au service de la dissuasion

L’aviation en 1918 - Épisode 7 “Mirage” 2000N, 1988-2018

- Par Philippe Wodka-Gallien

Retour sur 30 ans de carrière d’une composante essentiell­e des Forces aériennes stratégiqu­es.

Les adieux au “Mirage” 2000N, ce 21 juin 2018 sur la base d’Istres, avaient une saveur particuliè­re. La cérémonie nous renvoie à trois décennies de service opérationn­el d’un avion de pointe. En fait, plus de 40 ans si l’on associe e à cette chronologi­e les dévelopopp­ements de l’appareil. l. Le “Mirage” 2000N (N pour nucléaire) a porté les deux faces de la stratégie de défense de la France : la dissuasion (en France, elle est t nucléaire) et les opéraation­s extérieure­s. Pour r les Forces aériennes stratégiqu­es égiques (FAS), c’est aussi l’occasion i de d rappeler que la composante aéroportée de la dissuasion est désormais déso as assurée de sa pérennité, é, en passant au tout “Rafale”. e”.

Une révolution électroniq­ue

La perspectiv­e de doter les FAS du “Mirage” 2000 fait t suite à un contrat notitifié le 29 décembre 1977 977 à Dassault pour un biplace d’entraîd’ t î nement. Un conseil de défense de juillet 1978 permet de lancer la version de pénétratio­n nucléaire. À son entrée en service en 1988, le “Mirage” 2000N est une révolution technologi­que pour les aviateurs issus des monoplaces “Jaguar” ou “Mirage” IIIE. L’avion modifie les méthodes de travail en introduisa­nt la conduite de missions en équipage, la place arrière étant occupée par l’officier système d’armes. Autre défi, il s’agit de maîtriser un système d’armes sophistiqu­é : radar de suivi de terrain, centrales de navigation, calculateu­r de mission, guerre électroniq électroniq­ue d’autodéfens­e intégr intégrée et système au sol de d préparatio­n de mi mission informatis­é sée. Ce sera aussi l’ l’avion porteur du m missile de croisière A ASMP ( ai r- sol mo moyenne portée). Il s’ s’agit d’un missile super supersoniq­ue à statoréact­eur, un défi technologi­que i majeur j pour le missilier français, à l’époque Aérospatia­le. Le “Mirage” age 2000N 0 est prévu pour une double dou mission de dissuasion. suas La première, pré préstratég­ique, prévoit un une frappe d’ultime a avertissem­ent, typiq quement sur des obje jectifs militaires. La se seconde est d’ordre str stratégiqu­e. Dans l’espr l’esprit du “Mirage” IV, celle-ci consiste c à conduire d des raids id liti lointains en direction des objectifs vitaux de l’adversaire. Le besoin opérationn­el inscrit au cahier des charges des vols à très basse altitude – 150 pieds (45 m) – et à grande vitesse afi n de passer, de jour comme de nuit, et par tous les temps, sous la couverture radar adverse. Pour les raids lointains, l’avion est appuyé par les

ravitaille­urs C-135FR. La conduite mobilise également les centres de contrôle (à Taverny ou à Lyon MontVerdun), des “Awacs” et des chasseurs d’escorte “Mirage” 2000C. Au commissari­at à l’Énergie atomique (CEA), la direction des applicatio­ns militaires est tout désignée pour concevoir la charge thermonucl­éaire du missile stratégiqu­e.

Opérations extérieure­s et dissuasion

Peu après son entrée en service le 1er juillet 1988 à Luxueil, les unités de “Mirage” 2000N font face à une situation imprévue : apporter une réponse militaire aux changement­s géopolitiq­ues consécutif­s à la chute du mur de Berlin. Pour autant, la mission de dissuasion qui lui est confiée traverse, ce grâce à la force de son concept stratégiqu­e, la séquence post-guerre froide. En novembre 1989, la loi de programmat­ion militaire 1990-1993 limite toutefois le dispositif des FAS à trois escadrons sur un stock de 75 avions. Initialeme­nt, 112 appareils avaient été prévus pour cinq escadrons, 37 étant placés en réserve. Désignés pour les recevoir, les es- cadrons de chasse 1/4 Dauphiné et 2/4 La Fayette restent sur Luxeuil, tandis que l’EC 3/4 Limousin prend l’alerte à Istres.

Rattachés à la Force aérienne tactique, les premiers 2000N sont

versés trois ans plus tard aux FAS, une décision effective le 1er septembre 1991. Les 25 premiers appareils sont livrés au standard NK1, une configurat­ion qui autorise uniquement le tir de l’ASMP. Les suivants profitent du standard NK2, celui-ci donnant une capacité d’assaut convention­nel avec des bombes lisses de 250 kg ou des roquettes. Les “Mirage” 2000N intervienn­ent en Bosnie-Herzégovin­e lors des opérations Deny Flight en 1994, Crécerelle et Salamandre en 1996. Les sessions d’entraîneme­nt à “Red Flag” (1992, 1994, 1998), “Cope Thunder” (2001) aux États-Unis puis “Mapple Flag” au Canada (2004) viennent opportuném­ent aguerrir les équipages au titre des exigences nouvelles imposées par les opérations extérieure­s, le paradigme post-guerre froide. Les “Mirage” 2000N ont reçu en 2001 la capacité au tir de bombes guidées laser de type “Paveway” II, le guidage imposant l’appui d’un appareil équipé d’une nacelle optronique de désignatio­n laser (un “Mirage” 2000D ou un “Rafale”) ou encore un observateu­r avancé au sol. À partir de 2009, ils reçoivent le nouveau uveau mis missile ASMP-A (Amélioré) é) dont la portée accrue vient renforcer nforcer la crédibilit­é de la force de e frappe.

Mission remplie

Suite à la constituti­on tion d’un premier escadron ron nucléaire sur “Rafale” en 2009 (le 1/91 Gascogne), le 2/4 La Fayette devient le dernier des trois escadrons de combat des FAS à mettre en oeuvre le “Mirage” 2000N. Les dernières missions de guerre sont conduites dans la bande sahélo-saharienne et au Proche-Orient dans le cadre des opérations Barkhane et Chamal. À cette fin, la configurat­ion à quatre bombes guidées laser GBU-12 est validée entre 2015 et 2017. Fin août, le La Fayette poursuivra la mission de dissuasion sur “Rafale”, ceci après s’être porté à Saint-Dizier aux côtés des appareils appa du Gascogne. Au sein des de escadrons de combat des FAS, le “Mirage” 2000N a donc parf parfaiteme­nt réussi sa mission : ne jamais avoir reçu l’ordre d des plus hautes autorités politiques po de tirer de missile nucléaire. Tel est le parado paradoxe de la dissuasion frança française : faire en sorte, par l’entraîneme­nt et la crédibilit­é opérati tionnelle, d’être prêt à chaque instant à d délivrer l’arme nucléaire, pour po ne jamais avoir à le faire “en “e vrai”. Comme le dit en toute simplicité le général André Lanata, chef d’état-major de l’armée de l’Air, “la relève est assurée, une page se tourne, mais la mission continue”.

 ?? ANTHONY PECCHI ?? 30 ans de service pour le “Mirage” 2000N, en service opérationn­el depuis 1988.
ANTHONY PECCHI 30 ans de service pour le “Mirage” 2000N, en service opérationn­el depuis 1988.
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Une page se tourne avec le départ des 2000N, remplacés par les “Rafale”.
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 ?? ARMEE DE L’AIR ?? Sous les “Mirage” 2000N, le missile de croisière ASMP.
ARMEE DE L’AIR Sous les “Mirage” 2000N, le missile de croisière ASMP.
 ?? JACQUES GUILLEM ?? Les insignes des escadrons équipés de 2000N. De gauche à droite : le Limousin, le La Fayette, le Dauphiné et le Champagne.
JACQUES GUILLEM Les insignes des escadrons équipés de 2000N. De gauche à droite : le Limousin, le La Fayette, le Dauphiné et le Champagne.
 ?? ANTHONY PECCHI ?? Anthony Pecchi immortalis­e le dernier “Mirage” 2000N dans le ciel de Provence.
ANTHONY PECCHI Anthony Pecchi immortalis­e le dernier “Mirage” 2000N dans le ciel de Provence.
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