Aux origines du réarmement français
Première partie. La période de 1928 à 1934 fut celle d’un vaste réarmement aérien. Un programme ambitieux mais tardif : en 1940, l’aviation française était balayée du ciel. Comment en était-on arrivé là ?
Première partie. Début des années 1930 : l’industrie aéronautique française commence une très lente mutation.
Apeine l’encre des accords de Rotonde scellant l’armistice de juin 1940 avait- elle séché que l’aviation se trouva au coeur d’une polémique nationale cherchant les causes d’une “défaite annoncée”. Les nombreux écrits parus dès juillet 1940 et la tenue du lamentable procès de Riom en 1942 eurent vite fait de désigner les coupables. Ce furent en premier lieu les personnalités marquantes de la Troisième République, civils et militaires, accusés d’imprévoyance et de laxisme. Parmi eux figuraient en bonne place Guy La Chambre, ministre de l’Air de janvier 1938 à avril 1940, auteur du fameux plan V prévoyant la construction de “4 000 avions de combat modernes”. En l’absence de Pierre Cot, ministre de l’Air du Front populaire, principal accusé d’un procès éminemment politique, Guy La Chambre, auquel il était reproché “d’avoir endormi la vigilance des organismes chargés de la préparation de la défense nationale au moyen de présentations artificieuses”, faisait figure de bouc-émissaire. Des 4 700 puis 8 000 avions promis par le plan V, l’armée de l’Air n’en alignait que 5 210 le 10 mai 1940, dont seulement 1 095 sur les 3 454 considérés “modernes” étaient en première ligne dans les formations métropolitaines. L’échec du plan V était patent. Mais fallaitil en attribuer la responsabilité aux seuls dirigeants de l’avant-guerre ?
Dix années d’errements
Le plan V, lancé en 1938, n’était que le dernier avatar de dix années d’errements politiques, industriels et militaires dont les origines remontaient à 1928, année pourtant prometteuse avec la création du ministère de l’Air. À la source de ses carences, l’aviation, dispersée jusqu’à cette date entre quatre ministères, vivotait, pour sa partie militaire, écartelée entre la Guerre, la Marine et les Colonies. Depuis la fin du premier conflit mondial, son parc aérien reposait essentiellement sur des appareils issus de la guerre auxquels s’ajoutaient épisodiquement quelques modèles plus récents mais dont la conception relevait de principes périmés. Il est vrai qu’en dépit de quelques belles réussites (Breguet 19, Potez 25), l’état de l’industrie avait de quoi désespérer les partisans d’une aviation puissante. Ne survivant que grâce à des commandes étatiques – plus soucieuses de maintenir un tissu industriel que d’encourager l’innovation technologique – son activité reposait sur
des entreprises artisanales souffrant d’un retard technique et intellectuel dramatique.
La création du ministère de l’Air, le 14 septembre 1928, permit de réunir, sous une même autorité, tous les services de l’aviation civile et militaire. Premier ministre en charge de ce lourd portefeuille, Victor Laurent-Eynac s’attaqua d’emblée au marasme qui avait contribué à l’instauration de son ministère. Dénonçant “la disette de recherches techniques, le manque de standardisation et la cristallisation de l’outillage”, il échafauda avec son directeur technique, l’ingénieur général Albert Caquot, une “politique de modernisation et de soutien” basée sur la conviction qu’une “aviation de qualité” prévalait sur une “aviation de quantité”.
La politique des prototypes
L’acte premier de cette nouvelle orientation fut de laisser aux avionneurs pleine et entière liberté de conception afin de raviver une saine émulation en matière de recherches et d’industrialisation. À ce stade, le ministre entendait borner son action à l’énoncé des besoins, leurs financements et leurs coordinations. Dans cette optique libérale, les crédits d’études passèrent dès 1929 de 36 millions de francs à 120 millions de francs. Les industriels perçurent des avances atteignant jusqu’à 90 % du prix des prototypes en construction, bénéficiant également de redevances décroissantes si l’appareil confirmait ses performances initiales. C’était, hélas, sans compter avec les abus qu’une telle démarche devait inévitablement engendrer. Profitant de cette manne étatique, certains – et non des moindres – empochèrent l’argent, multipliant les études sans fournir en retour des appareils viables ou susceptibles d’être produits en série.
Au fil des mois, cette “politique de soutien” se mua en une dispendieuse “politique des prototypes”. D’octobre 1928 à mars 1933, période durant laquelle elle fut menée, elle coûta à l’État 448,3 millions de francs répartis sur 215 marchés civils et militaires qui, pour ces derniers, aboutirent à la construction de 83 prototypes (332 projets) pour l’Aéronautique militaire, 28 hydravions (130 projets) pour l’Aéronautique navale et une douzaine d’appareils pour les Aviation coloniale et sanitaire. À titre d’exemples, pour le seul programme R2 (biplace de recon- naissance à haute altitude), huit marchés furent passés (ANF Mureaux 110 et 112, Weymann 80, NieuportDelage 580, Potez 37, Breguet 33, Latécoère 49, Wibault 260) entraînant la construction de 17 machines. De même pour le programme M4 (multiplace de combat), quatre marchés donnèrent naissance à quatre avions (Amiot 140, Blériot 137, Breguet 410 et le SPCA 30 de la Société provençale de constructions aéronautiques). Bien plus coûteux, le programme Bn4 (bombardiers de nuit quadriplace) donna lieu à huit marchés et 12 prototypes. À lui seul, le programme C1 (monoplaces de chasse) édité en 1928 et réactualisé en 1930, suscita 19 marchés pour la construction de 27 avions ! En définitive, l’ensemble n’aboutit, pour l’Aéronautique militaire, qu’à la fabrication en série d’une dizaine de types parmi lesquels les Br. 27 et Po. 39 A2 (biplaces d’observation) ; l’Amiot 140 M4 (multiplaces de combat) qui aboutira en 1934 à l’Amiot 143 ; le Farman 221 Bn4
(bombardier de nuit), premier grosporteur de l’armée de l’Air ; le Bloch MB.200 ; l’ANF Mureaux 110 et ses nombreux dérivés. Du programme des chasseurs, seuls émergèrent, ultérieurement le Blériot-Spad 510, le Loire 46, le Dewoitine 371 et les D.500 et 501.
Un bilan en demi-teinte
Contrairement aux objectifs que s’était fixés le ministre, l’industrie n’opéra ni concentration ni décentralisation hormis quelques regroupements tardifs et éphémères relevant souvent d’opérations spéculatives. Pire, les aides dispendieuses de l’État favorisèrent l’émergence de nouvelles entreprises, pourtant déjà en surnombre, dont les activités se résumèrent à la construction de prototypes sans avenir (1). Certains avionneurs, peu scrupuleux, réalisèrent vite qu’il leur était plus profitable de produire à l’unité des avions prépayés plutôt que d’investir dans de coûteux outils de production. Cette politique fut plus pernicieuse encore dans le domaine des propulseurs où pas moins de 40 marchés (371 projets) furent passés de 1928 à 1933 sans résultats immédiats, la plupart des motoristes se contentant de livrer des dérivés de modèles conçus durant la guerre.
Il convient néanmoins de nuancer ce constat. L’action d’Albert Caquot encouragea indéniablement le passage dans les ateliers du bois et toile, hérité de la Grande Guerre, à la construction méta l l i que (Amiot, Potez, Breguet). De même, elle favorisa sur quelques protot ypes l’apparition de moteurs à compresseurs et l’étude des premières hélices à pas variable. Des entreprises prometteuses émergèrent (Bloch, Dewoitine) et de nouvelles usines se délocalisèrent en province (Potez à Méaulte et Breguet au Havre). Enfin, bien que moins apparentes, les mesures internes au ministère édifièrent les structures d’encadrements et l’organisation opérationnelle qui préparèrent l’Aéronautique militaire à la conquête de son indépendance.
En prenant ses fonctions, Laurent-Eynac avait prévenu. Le rassemblement sous un même toit de toutes les aviations militaires n’interdisait pas de songer à “une force autonome nouvelle qui sera certainement la grande force aéronautique de demain”. Le message était clair : la création du ministère de l’Air préludait à celle d’une armée de l’Air autonome. Trois autres ministres se succédèrent au portefeuille de l’Air avant que la tâche échoie, en janvier 1933, au radical-socialiste Pierre Cot, arrivé aux affaires dans le premier gouvernement Daladier, et à son chef d’état-major, le général Victor Denain. La mission n’était pas aisée. Non contents de vouer une hostilité constante à un ministère qui les amputait d’une partie de leurs prérogatives, les responsables de l’armée de Terre et de la Marine livrèrent aux partisans de l’autonomie aérienne une véritable guerre doctrinale. Les aviateurs prônaient la bataille aérienne et l’action stratégique indépendantes alors que l’armée de Terre entendait préserver et garder sous tutelle une puissante aviation de coopération. Pour les marins, qui se refusaient à toute distinction entre un navire de surface et un hydravion, les choses étaient plus simples encore : toute action à la mer relevait de leur autorité. C’est dans ce climat, et en dépit des combats d’arrière-garde livrés aux plus hauts échelons de la hiérarchie militaire (Pétain et Weygand pour l’armée de Terre, Durand-Viel et Lanxade pour la Marine), que l’armée de l’Air fut finalement créée par le décret du 1er avril 1933 et institutionnalisée le 2 juillet 1934 par le Parlement avec une dotation budgétaire de 1,5 milliard de francs, en baisse de 500 millions de francs par rapport au précédent budget déjà bien en deçà de ceux des autres armées.
Une armée de l’Air à part entière
Se substituait à l’Aéronautique militaire – “5e Arme” consacrée par la loi du 8 décembre 1922 – une armée de l’Air à part entière, disposant de sa propre administration, de ses corps de troupes et de ses organes de commandements à rang égal à ceux de leurs homologues de Terre et de Mer. Mais les divergences demeuraient et transpiraient dans l’imprécision des missions attribuées aux aviateurs : “Participation aux opérations aériennes, aux opérations combinées avec les armées de Terre et de Mer et à la défense aérienne
du territoire.” Tout cela relevait du compromis. Chacun y voyait ce qu’il voulait y voir, pour les uns “la priorité donnée à une bataille aérienne indépendante”, pour les autres “la prédominance de la notion de coopération”. Cette ambiguïté originelle allait alimenter l’interminable conflit doctrinal et cloisonner l’armée de l’Air dans une autonomie opérationnelle relative dont les conséquences s’avéreront désastreuses.
Nouvelle orientation : le plan I
Les aviateurs héritèrent en 1933 d’un parc aérien hétéroclite et désuet. 3 500 appareils composés, pour l’essentiel, de sesquiplans Nieuport 62/622 et Gourdou-Lesseure 32 pour la chasse ; de biplans Breguet 19 et Po. 25 pour le renseignement et l’appui au sol ; de bombardiers moyens Amiot 122 et d’antiques Lioré et Olivier LéO.20 et Blériot 127 pour le bombardement lourd. Il est vrai que l’Aéronautique navale, “force d’appoint” laissée en grande partie dans le giron de la Marine (2), n’était pas mieux lotie avec ses dangereux Goliath montés sur flotteurs, ses avions torpilleurs Levasseur PL-7 et PL-10, ses quelques hydravions CAMS 37A et un ramassis d’antiqui- tés prélevées dans les inépuisables stocks dont l’armée de l’Air cherchait à se débarrasser. De l’avis même de ses chefs, “l’aviation française avait alors cinq ans de retard sur les aéronautiques les plus en pointe”.
Rompant avec la “politique des prototypes” qui n’avait jusqu’alors permis d’introduire en unités qu’une poignée d’inutiles Br. 270 A2, Pierre Cot confia au général Denain l’élaboration d’un programme de réarmement ne visant pas à accroître les effectifs mais à rapidement remplacer les matériels les plus obsolètes. Dans la nouvelle organisation, il revenait à l’état-major de l’armée de l’Air de définir les caractéristiques des appareils à construire et de les transmettre à la Direction technique et industrielle du ministère pour analyse et approbation. Les études débutèrent en juin 1933 et, un mois plus tard, le Conseil supérieur de l’Air validait les propositions de Pierre Cot et du général Denain.
C’est à ce dernier, devenu à son tour ministre de l’Air en février 1934 dans le gouvernement Doumergue, que revint la tâche d’inclure les nouveaux programmes de production dans le cadre d’un projet de grands travaux intéressant l’ensemble de la défense nationale. Étalée sur cinq ans, la part “Air” de ce programme de renouvellement, baptisé
plan I ou “plan des 1 010”, prévoyait la construction de 350 avions de chasse, 350 autres de bombardement et 310 de renseignement. Un volant de fonctionnement (réserve et rechanges) de 33 % assurait le réapprovisionnement des unités en cas de pertes.
Dans une véritable psychose de guerre consécutive à l’arrivée au pouvoir d’Adolf Hitler, le plan I – dans sa première mouture – fut entériné par les Chambres le 6 juillet 1934. Le Parlement autorisa l’engagement d’une première tranche de 980 millions de francs devant conduire à la mise en ligne, au 31 décembre 1935, de 580 appareils “modernes” de chasse, bombardement et renseignement. Sur ce premier engagement financier, établi en complément des budgets annuels de 1934 et 1935, la part consacrée à la mobilisation industrielle et aux études n’était que de 70 millions de francs ! Le choix était clair : l’effort se portait dans l’urgence sur le quantitatif plutôt que le qualitatif
Le BCR ou “l’avion à tout faire”
Le bombardement, jusqu’alors essentiellement perçu comme une force d’accompagnement, devenait l’élément clé d’un plan sensible aux théories du stratège italien Giulio Douhet faisant du “croiseur aérien” l’outil suprême de la primauté de l’aviation dans la guerre moderne. Séduits, plus que convaincus, par cette thèse, Cot et Denain avaient défini en octobre 1933 un concept “à la française” d’avion multiplaces polyvalent de bombardement, coopération et renseignement, doté d’un puissant armement défensif devant pallier le manque attendu de vélocité. La formule, incluse au plan I, présentait deux avantages : elle limitait à un seul modèle le nombre d’avions différents qu’il eut fallu acquérir pour remplir ces trois missions et présentait l’opportunité de satisfaire l’état-major de la Guerre dans son exigence de coopération interarmées. Incidemment, elle offrait également aux aviateurs leur première doctrine d’emploi tactique, compromis hybride mais cohérent entre le conservatisme des “terriens” et leur soif d’indépendance. Ainsi naquit le programme BCR (bombardement-combat-renseignement) auquel il restait toutefois à trouver l’avion adéquat…
Le plus simple et le moins onéreux fut d’avoir recours à des appareils existants. Autrement dit, ceux issus des marchés de 1928-1930 ayant, comme caractéristiques communes, d’être bimoteurs (5 à 7 t), multiplaces (quatre à cinq hommes d’équipage), de disposer d’un “puissant” armement de défense (au moins trois postes de tir en tourelles) et d’emporter une
charge offensive conséquente (500 à 1 000 kg de bombes). Huit candidats correspondaient à ces critères : l’Amiot 140, le Bloch MB.130, les Br. 413 (version plus puissante du Br. 410) et Br. 460, le Farman 420, le SPCA 30M et deux nouveaux venus, le SAB AB. 80 de la Société aérienne bordelaise et le Po. 540 développé sur fonds propres.
Hormis le SPCA 30, incapable de répondre aux performances requises – une vitesse de 350 km/ h, un plafond opérationnel de 4 000 m et une distance franchissable de 1 300 km – et le Br. 413, accidenté et remplacé par le Br. 460, les autres encombrèrent inutilement les centres d’essais jusqu’en 1937. En pure perte… Le Bloch 130B, dernier rejeton du programme BCR apparu en 1935, serait accidenté et détruit deux ans plus tard à Villacoublay après que 17 dérives différentes eurent été expérimentées, sans résoudre ses problèmes d’instabilité ! Les batailles livrées dans le ciel d’Espagne mirent brutalement fi n à l’illusion de l’avion apte à tout usage, ni assez rapide ni assez armé pour échapper aux feux de l’adversaire. La jeune armée
de l’Air s’était fourvoyée dans un programme sans avenir dont seul émergera le Po. 540 qui équiperait jusqu’en 1938 ses unités de grande reconnaissance.
Premières commandes de séries
Avant même le vote des crédits par le Parlement en juillet 1934, le ministre de l’Air avait pris sur lui de passer les premiers marchés du plan I. Dès l’automne 1933, à l’issue d’une – trop – rapide évaluation des potentialités industrielles, une com- mande de 73 ANF-112, -133, -114 R2 et CN2 (reconnaissance et chasse de nuit) avait été passée aux Ateliers des Mureaux, suivie en novembre de plusieurs dizaines d’Amiot 143 à l’usine SECM de Colombes et, le 29 décembre, d’un marché avec le groupe Bloch-Potez pour 30 bombardiers MB. 200 à répartir entre Courbevoie et Méaulte. Pas moins de 57 chasseurs D.500 furent aussi partagés entre la Société aéronautique française (SAF) de Toulouse et les établissements Lioré et Olivier d’Argenteuil. Ainsi, au moment de l’adoption définitive du plan I, 203 avions étaient déjà commandés. Dès que les premiers crédits furent débloqués, durant l’été 1934, de nouveaux marchés furent passés : 50 D.501 en août et 45 MB.200 en septembre, suivis de 20 LéO H-257bis (pour l’Aéronautique maritime autonome) et de 44 Po. 540 durant l’automne.
Au 31 décembre 1934, la première tranche du plan I totalisait déjà 160 commandes s’ajoutant aux 203 précédentes. Mais les premières livraisons se faisaient attendre : au 1er janvier 1935, seuls 90 avions modernes inscrits au plan I avaient été pris en compte, auxquels s’ajoutaient
141 appareils de types anciens, dits de “transition” (Nid. 629, LeO.206, Po. 39, Br. 270), derniers reliquats de commandes antérieures.
Une volonté contrariée
L’impatience était d’autant plus grande que les craintes suscitées par l’arrivée des nazis au pouvoir se doublaient à présent de l’évidence du réarmement allemand. Convaincu de l’éminence d’un conflit armé, Denain prit sur lui de passer de nouvelles commandes en marge des marchés réguliers et obtint du gouvernement d’engager par anticipation une nouvelle enveloppe de près de 1 millions de francs.
La manoeuvre était risquée mais la volonté louable. Parmi tous les avions modernes disponibles, des appareils comme les D.500 et 501, prévus pour remplacer les antiques Nieuport 622 et 629, pouvaient être considérés en 1934 comme des chasseurs récents et performants. Le premier était équipé d’un moteur en ligne Hispano-Suiza 12Xbrs de 690 ch et armé de deux ou quatre mitrailleuses de 7,5 mm. Le second et son dérivé tardif le D.510, bénéficiaient d’un moteur surcompressé plus puissant (860 ch) et d’un armement renforcé avec un canon de
20 mm et deux mitrailleuses en voilure. Monoplans de construction métallique à ailes basses cantilever mais à trains fixes, les Dewoitine frisaient les 370 km/ h, vitesse qu’aucun chasseur italien ou allemand de série n’atteignait encore. Pour les bombardiers, le Bloch MB.200 et l’Amiot 143, toujours à trains fixes mais équipés de moteurs à compresseur Gnome et Rhône de 760 ch, affichaient des vitesses de 280 km/ h à 300 km/ h et des charges utiles de 1 800 kg à 3 000 kg, bien supérieures à celles des biplans LeO. 20 et LeO. 206 Bn3 qui dotaient la majorité de nos escadres de bombardement. Avec ses quatre moteurs de 800 ch, ses 300 km/h et sa charge utile de 5 000 kg autorisant un plafond de 7 000 m, le bombardier lourd à long rayon d’action Farman 221 n’avait encore aucun équivalent opération- nel dans les forces étrangères. À en croire leurs concepteurs, tous ces appareils portaient à court terme la promesse d’un fort potentiel de développements. Mais l’industrie, longtemps restée atone, avait-elle les moyens matériels de ses ambitions ? On pouvait en douter. La légèreté avec laquelle fut engagée la politique industrielle du plan I allait avoir de terribles conséquences…