LES IDOLES DÉJEUNENT
Il y a eu les acteurs. Ces êtres inaccessibles convolaient entre eux. Ils vivaient sur les Champs-Elysées, n’apparaissaient qu’en smoking, se déplaçaient sur des tapis rouges. Leur sourire était inoxydable. Il n’y en avait que pour eux.
Puis ce furent les chanteurs, avec leurs cheveux longs et leur guitare électrique. Les filles poussaient des cris quand ils entraient sur scène. On les voyait au bras de grandes bringues blondes. Ils épousaient des princesses nicaraguayennes à Saint-Tropez, avaient des accidents de voiture, s’achetaient des châteaux sur la Loire. Des émissions comme « The Voice » mirent fin à tout ça. Vinrent ensuite les footballeurs. La chose surprit. Ils étaient bleus. Ils avaient le crâne rasé, s’exprimaient par monosyllabes, tournaient des publicités pour des hamburgers. Ils ignoraient les paroles de La Marseillaise et se mariaient avec des mannequins de l’Est. De temps en temps, leur nom figurait dans les faits divers. Cela faisait désordre. L’heure est aux cuisiniers. Ils sont partout, sauf devant leurs fourneaux. Ils ornent les couvertures des magazines aux côtés de comédiennes. Ils ont de la barbe et des tatouages. Ils paradent à la télévision. Leur accent est généralement méridional. Au besoin, ils le réapprennent.
La France a donc aimé les odeurs de fond de teint, les parfums de haschich, les effluves de transpiration, les relents de friture. Cette nation éclectique a les narines solides.
Les cuisiniers : ils sont partout, sauf devant leurs fourneaux