LES POSITIONS DE SANDERS LE CLASSENT À L’EXTRÊME GAUCHE
connu des primaires âpres et difficiles et que l’électorat démocrate ne lui est pas entièrement acquis. Certes, les outrances de Donald Trump auront fini par convaincre beaucoup de sceptiques de voter pour elle. Mais l’ancienne secrétaire d’Etat devra compter avec une base démocrate fissurée. Les bons scores du sénateur du Vermont durant les primaires ont démontré qu’à gauche aussi, le radicalisme prospérait. Car, mesurées sur l’échelle de la politique américaine, les propositions et les positions politiques de Bernie Sanders le classent à l’extrême gauche : abolition de la peine de mort, légalisation du cannabis, taxation à 90 % des plus-values encaissées par les plus riches, création d’un taux d’imposition à 52 % pour les plus hauts revenus, gratuité des universités d’Etat, encadrement du prix des médicaments, relance budgétaire pour effectuer des grands travaux d’infrastructures, lutte contre la concentration dans les médias, plafonnement des dépenses de campagne… Le message radical de ce parlementaire de 75 ans blanchi sous le harnais – inscrit comme indépendant et non comme démocrate –, sénateur depuis près de dix ans après avoir siégé à la Chambre des représentants pendant seize ans, a séduit des millions d’Américains, notamment chez les jeunes.
Si elle remporte l’élection, Hillary Clinton n’aura pas la tâche facile. L’ancienne étudiante de Yale, activiste de la campagne McGovern de 1972, vient d’une culture politique post-soixante-huitarde qui s’épuise. Aux yeux de jeunes gens qui ont supporté Sanders, ces « libéraux libertaires » ont divorcé de l’Amérique qui trime pour se rapprocher des élites nanties, chic et bobos. La candidate a beau souligner ses origines modestes, elle ne peut faire oublier la fortune qu’elle et son mari ont accumulée grâce, entre autres, à des conférences grassement rémunérées.
La classe ouvrière blanche a échappé depuis longtemps au Parti démocrate – elle se retrouve en majorité derrière Donald Trump aujourd’hui – et la jeunesse idéaliste ne se reconnaît pas en une Hillary Clinton frappée du sceau de la gauche caviar. Pis, ses e-mails personnels piratés par WikiLeaks ont révélé la duplicité de son discours, notamment en matière de traités de libre-échange et d’indulgence vis-àvis de Wall Street et de ses banques. Quand Bill Clinton a été élu en 1992, sa victoire, à 46 ans, avait symbolisé l’arrivée au pouvoir des « nouveaux » démocrates, libérés des chaînes du clientélisme, d’un syndicalisme sulfureux et de barons sudistes hostiles à l’émancipation des Noirs. En 2016, à 69 ans, Hillary hérite, elle, d’un Parti démocrate fané et entouré de suspicion.