Le Figaro Magazine

HORS D’ÂGE

- D’ÉRIC NEUHOFF

Voilà autre chose. Quand on visionne les émissions culturelle­s en replay, il y a toujours avant une publicité vantant les mérites de couches pour adultes. Le générique débute. Sur le canapé du salon, les couples se regardent en chiens de faïence. On voit par là l’idée que les annonceurs se font des lecteurs. Ces gens-là s’imaginent que les clients des librairies ne se déplacent qu’en déambulate­ur. Les jurés des prix littéraire­s se doutent-ils qu’ils s’adressent à des vieillards incontinen­ts ? Jadis, le dos des Série noire était orné d’une photo pour le parfum Balafre. Ces moeurs ne sont plus de saison. Aujourd’hui, l’éditeur préférerai­t coller un placard pour les pompes funèbres. De mon côté, je vais me remettre à « Touche pas à mon poste ». Au moins, les spots évitent de me rappeler sans cesse mon âge. Quelle délicatess­e, cet Hanouna !

Encore un truc de vieux. Pariscope a cessé de paraître. Cela fait un choc. Ce fascicule hebdomadai­re avait un format lui permettant de tenir dans la poche d’un manteau. Le journal répertoria­it les films, les pièces, les restaurant­s. Le mercredi, on y cochait au feutre les longs-métrages à ne pas rater. Ils étaient classés par genre, par salles, par arrondisse­ments. C’était à une époque le seul moyen d’avoir le programme de la Cinémathèq­ue. Sur une page, les critiques égrenaient leurs étoiles. Longtemps, sous la houlette d’André Halimi puis d’Annick Geille, des écrivains y déclinaien­t leurs humeurs. Le sang circulait. Une rubrique était consacrée aux spectacles érotiques. On garde un souvenir ému du théâtre des Deux Boules. De vaillants acrobates s’accouplaie­nt dans un filet au-dessus du public. Cela remonte à une période mérovingie­nne. Aux Champs-Elysées, le Gaumont Ambassade vient de fermer ses portes. La salle va devenir un magasin de chaussures. Dans un coin, le grand blond pleure.

Quelle délicatess­e, cet Hanouna !

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France