UN UNIVERS OÙ LES CULTURES COHABITAIENT
mais distinctes des villes indigènes dont il entend respecter les traditions et les coutumes. Car il craint les effets dévastateurs de la culture occidentale sur l’urbanisme traditionnel, il veut aussi éviter le mélange excessif, la grande ambiguïté de l’Algérie, fruit d’une colonisation aux racines si anciennes et si profondes, et ses promesses inquiétantes pour l’avenir. Ce qui n’exclut pas – bien au contraire – d’extraordinaires influences artistiques mutuelles, souvent imprégnées de style néoclassique et d’Art nouveau, dont l’impact sera sensible jusqu’en France même, avec le Palais de la Porte Dorée et le succès immense de l’Exposition coloniale. C’est pourquoi le Maroc de Lyautey déroge un peu à l’esprit du « vestige » : c’est de manière très vivante qu’il reste aujourd’hui inscrit au plus profond des paysages, en particulier à Rabat, ou à Casablanca.
Car chez les Français,
on ressent toujours
– osons le mot - ce côté « fonctionnaire », ou « administrateur » qui s’exerce avec métier, imagination et grandeur. A cet égard, l’empire est un irremplaçable terrain d’expérience et d’action. Rien de plus faux ou excessif que l’image du Français jouisseur ou languissant, se limitant à faire travailler les autres. Certes, chez un grand colonial comme Lyautey – mais il en est d’autres, moins illustres et également actifs -, subsiste à jamais l’artiste, l’esthète, même. Mais il ne s’agit pas de perdre son temps. Il faut construire des choses utiles, et si possible construire de belles choses. L’empire ne doit pas être une simple mosaïque de possessions, somptueuses, voluptueuses ou pittoresques, réparties aux quatre coins du monde, car « il n’y a pas telle ou telle colonie, ni même tel ou tel groupement de colonies. Il n’y a qu’un empire, un et indivisible, pour se servir de la légendaire formule ». Ce n’est