Le Figaro Magazine

LE ROI GABIN

- Jean Gabin, une âme française,

Jean d’Ormesson raconte que, préparant l’adaptation d’Au plaisir de Dieu pour la télévision, il propose à Jean Gabin le rôle de Sosthène de Plessis-Vaudreuil. « Je ne travaille pas pour la télévision », répond Gabin ; et le rôle échoit à Jacques Dumesnil. D’ailleurs, Gabin ne pouvait jouer un duc : il était un roi. « Quand on voyait Gabin, c’était la France, dit Costa-Gavras. Il a représenté le Français, par sa façon d’être, de parler, de bouger. » Il l’a prouvé en jouant tout, du clochard au président du Conseil, du truand au flic, de l’ouvrier à l’aristo désargenté. Venu du music-hall, comme son père, sa présence au cinéma est telle qu’il impression­ne encore aujourd’hui, sinon la pellicule, au moins les spectateur­s. En 52 minutes, c’est l’homme qu’on voit dans ce film.

L’homme qui appelait son fils Mathias « Gros Père ». Qui n’a jamais voulu revoir Marlene Dietrich après leur rupture ; ni la prendre au téléphone. Qui ne s’est jamais consolé de l’invasion de ses terres normandes par les paysans, dans les années 60 ; lui qui se croyait des leurs. Qui n’a pas voulu défiler avec Leclerc sur les Champs-Elysées en 1945, alors qu’il fut un vrai soldat. Se prétendant « anarchiste royaliste », il disait : « Je ne vote pas, je subis. » Son fils dément : il votait. Les témoins de sa vie et les analystes de son travail défilent, comme il se doit, dans ce film, et maîtrisent parfaiteme­nt le sujet. Façon de parler puisque Gabin, loin d’être un sujet, est un maître. Un roi.

de Patrick Glâtre, Sylvain Palfroy et RenéJean Bouyer, Histoire, jeudi 15 décembre, 20 h 40.

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