DANS LE VISEUR DE LA GAUCHE
C’est tout juste si François Fillon ne s’était pas disqualifié à la primaire de la droite en étant élu par une France bourgeoise, catho et conservatrice : il lui manquait les classes populaires ! La gauche n’est jamais en retard d’une discrimination. Trois exemples saisis au vol le même jour. Le 14 décembre, au journal de 8 heures de RTL, une enquête sur le vote à 16 ans : « Ça nous permettra d’en finir avec les vieux Blancs en costard », dit un gamin au micro. Le Monde rend compte d’un meeting de Philippe de Villiers à Versailles : « Une foule blanche, chrétienne et familiale ». L’éditorial du même quotidien traite de l’équipe Trump : « Cette administration est d’abord masculine, blanche et riche… » Décidément, les Blancs sont mal partis. Peu après son arrivée à France Télévisions, Delphine Ernotte (50 ans en juillet dernier), déclarait, péremptoire : « On a une télévision d’hommes blancs de plus de 50 ans, il va falloir que ça change. » Après les quotas, de nouveaux apartheids ? Tout cela nous arrive, avec retard, des EtatsUnis. Et c’est toujours dans Le Monde, qui n’en est pas à un paradoxe près, qu’on a pu lire, dans son édition du 9 décembre, une page entière d’un professeur à la Columbia University, Mark Lilla, absolument lumineuse sur les conséquences politiques de la dénonciation systématique des Blancs par la gauche américaine. « Quand on joue au jeu de l’identité, il faut s’attendre à perdre », écrit l’auteur.
A quoi la gauche américaine a-t-elle joué ? A ce que la gauche française s’est mise à imiter, cette promotion obsessionnelle des minorités de toute nature. Aux Etats-Unis : « L’électorat noir, latino, féminin, gay ou transsexuel »… En France, les minorités « visibles », féministes et sexuelles. Ce faisant, la gauche démocrate a commis « une erreur stratégique », dit Mark Lilla, car son « obsession de la diversité a incité les Américains blancs, ruraux, croyants, à se concevoir comme un groupe défavorisé à l’identité menacée ». Et ceux-ci ont réagi en votant Trump. Mais pas seulement eux : une part significative des électeurs noirs et latinos ont fait le même choix, parce qu’ils se sont considérés comme montrés du doigt, au même titre que les Blancs, en étant bêtement hétérosexuels, pratiquants, et vivant de leurs salaires. On a vu le résultat.
C’est comme ça que la gauche française a perdu son électorat populaire, puis ses classes moyennes ; à continuer ainsi, elle est promise à la disparition.
Quand on joue au jeu de l’identité, il faut s’attendre à perdre