Le Figaro Magazine

UN HOMME DÉRÉGLÉ

- C’est tout ce que j’ai à déclarer. OEuvre poétique complète, PHILIPPE BLANCHET

Bob Dylan vient d’obtenir le prix Nobel et Jack London, d’entrer dans la Bibliothèq­ue de la Pléiade. Richard Brautigan n’a pas eu le Nobel et ne figurera sans doute jamais dans la prestigieu­se collection. Pourtant il appartient à la même famille des poètes-voyageurs. Afin de réparer cette terrible injustice, Le Castor Astral vient de rassembler l’intégralit­é de son oeuvre poétique en un immense volume bilingue de près de 800 pages. Pour l’occasion, cette petite maison d’édition, créée à Bordeaux en 1975, devrait être rebaptisée « Le Trésor Astral », voire « Oh Le Beau Fabricant de Cadeaux de Noël Tombés du Ciel ». Dans son émouvante préface, la fille de Richard Brautigan raconte comment son père, jeune clodo céleste de Californie du Nord qui dormait dans des arrêts de bus, fut interné et électrocut­é dans un asile de fous, avant d’imprimer (à ses frais) de petites plaquettes de poèmes absurdes qu’il déposait à la librairie City Lights de San Francisco, entre deux parties de badminton en appartemen­t. C’était en 1954, bien avant le flower power. Lawrence Ferlinghet­ti, fondateur de la librairie de la Beat generation, déclara publiqueme­nt que Richard Brautigan « était bien plus en phase avec les truites qu’avec les gens ». Mais n’est-ce pas le job qui veut cela ? La poésie s’obtient grâce à diverses méthodes, toutes nuisibles à la santé autant qu’à la société. Arthur Rimbaud l’a expliqué dans sa lettre à Paul Demeny en 1871 : « Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglemen­t de tous les sens. » Les professeur­s de lycée font aujourd’hui étudier cette citation à leurs élèves sans s’apercevoir qu’ils manipulent de la nitroglycé­rine. Si l’on écoute Rimbaud, on pourrait vite finir SDF nourri au whisky. La femme de Brautigan, Virginia, pense qu’il préférait les carpes aux truites puisque « la carpe vit longtemps et qu’elle peut (…) subsister sans pratiqueme­nt rien manger. » Un livre qui nous permet de comparer les mérites poétiques de la truite et de la carpe au lieu de parler des primaires socialiste­s mérite d’être offert sur-le-champ à tous vos amis, pas vrai ? C’est tout ce que j’ai à déclarer rassemble tous les recueils publiés entre 1957 et 1976, ainsi que de nombreux poèmes inédits dans notre idiome. C’est une merveille de drôlerie désespérée. Cet homme savait alléger la vie. Il est le chaînon manquant qui mène d’Emily Dickinson à Charles Bukowski. Cela dit, la poésie se paie au prix fort : non seulement Richard Brautigan s’est tiré une balle dans la tête à l’âge de 49 ans, mais en outre son livre coûte 32 euros.

de Richard Brautigan, Le Castrol Astral, 757 p., 32 €. Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Thierry Beauchamp, Frédéric Lasaygues et Nicolas Richard.

une mare de sang humain tout juste coagulé, l’affaire prend une autre allure. D’autant qu’au même moment, l’inquiétant­e disparitio­n de deux garçons du coin, deux individus pas très recommanda­bles, vient compliquer un peu plus cet étrange puzzle…

En trente ans de carrière (et 22 enquêtes au compteur), l’inspecteur divisionna­ire Banks en a vu de toutes les couleurs. Ça n’empêche pas notre homme de garder un flegme tout britanniqu­e et d’écouter Nick Drake au volant de sa Porsche en passant d’une scène de crime à une autre. Cette nouvelle énigme, un modèle du genre, va lui donner du fil à retordre. Elle offre en tout cas à son auteur, Peter Robinson, l’occasion de prouver qu’il reste plus que jamais un très habile orfèvre du polar anglais.

 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France