Le Figaro Magazine

DEUTZ, LA FORCE TRANQUILLE

VIN Depuis vingt ans, Fabrice Rosset fait le succès de cette maison champenois­e qui séduit en nombre les consommate­urs avertis comme les novices.

- STÉPHANE REYNAUD S. R.

Fabrice Rosset se présente d’entrée comme un « simple businessma­n », avec une vision et des réflexions de « businessma­n », expression prononcée avec un parfait accent américain, preuve qu’on peut être né à Epernay et avoir roulé sa bosse en Californie, entre autres. L’homme a d’ailleurs l’allure et l’élégance cool de ces héros tels qu’on les retrouve dans la série Mad Men. Direct et détendu, il évoque son quotidien au coeur de la propriété d’Aÿ (Marne) qu’il dirige depuis deux décennies, après vingt-deux ans passés chez Roederer. Au moment du rachat de Deutz par la famille Rouzaud (également propriétai­re de Roederer, Delas, des domaines Ott, Pichon Comtesse et Ramos Pinto), l’entreprise n’était pas au mieux. Rosset prend la barre : « Mes 19 exercices se sont terminés par 19 records. Pour le vingtième, j’ai qualité-prix. » Rien de révolution­naire dans le propos, mais la mise en applicatio­n est exemplaire. Deutz s’impose comme un vin grand public, dans le bon sens du terme. Il ne déçoit pas les connaisseu­rs et, ni compliqué, ni exubérant, sans fard, il plaît aux néophytes. Notons que ce best-seller des grandes chaînes de cavistes s’est fort bien passé de campagnes de publicité classiques. Oui, mais l’homme – dont les proches racontent les fulgurance­s et quelques opérations marketing d’anthologie – sait vendre mieux que personne. « Enfin, dit-il, il s’agit de bien choisir ses distribute­urs, ses importateu­rs, ses agents… » Et d’en changer si nécessaire. Ce qu’il vient de faire dans plusieurs pays clés où la marque est exportée. Tout cela semble si facile. Avec Rosset, on finit par se dire qu’on peut se lancer dans le champagne demain pour faire fortune après-demain. Ce pragmatiqu­e se double d’un optimiste qui ne redoute en rien la concurrenc­e montante des vins mousseux : « Plus il y aura de sparkling wines, plus l’aspiration pour le champagne sera forte. Cela ne peut que nous stimuler, nous pousser à être encore meilleurs et désirables. Nous allons y gagner. » CQFD. Pour ceux qui l’auraient oublié, Deutz est un champagne de records. C’est l’histoire d’un domaine qui n’a cessé de travailler la qualité de ses vins ces dernières années. Le responsabl­e de cette évolution, Michael Baum, un entreprene­ur français qui a fait fortune aux Etats-Unis dans le secteur des nouvelles technologi­es avant d’investir en Bourgogne, s’est mis en tête de passer l’ensemble de la propriété en biodynamie. Il faudra cependant patienter encore quelques années pour apprécier les résultats. En attendant, déguster le millésime 2012 reste une excellente idée. Un nez floral, une grande subtilité, de la légèreté et du caractère. Voilà un formidable ambassadeu­r de sa région. Seule ombre au tableau : les crus du Château de Pommard sont encore très rares chez les cavistes et dans les restaurant­s car la très grande majorité de la production est vendue au château aux amateursco­nnaisseurs de passage.

CHÂTEAU DE POMMARD 2012

Prix conseillé : 98 €.

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