D’AMOUR ET DE VENGEANCE
POUR CE QU’IL ME PLAIST, JEANNE DE BELLEVILLE, LA PREMIÈRE FEMME PIRATE, de Laure Buisson, Grasset, 320 p., 20,90 €.
Au siècle dernier, quand le petit écran défendait encore les vertus de l’érudition, les Français de 7 à 77 ans découvraient grâce aux Rois maudits une page parmi les plus tumultueuses de leur histoire : les guerres de succession déclenchées par la mort de Philippe le Bel en 1314, fratricide prélude de la guerre de Cent Ans. Dans ces années ivres de violence, la romancière Laure Buisson a fait une pêche miraculeuse : l’histoire de Jeanne de Belleville, première femme pirate. Rien ne destinait cette noble vendéenne à devenir la « Lionne sanglante », terreur de l’Atlantique. Rien, sauf l’essentiel : l’amour et l’orgueil. Elle a 26 ans quand elle perd un premier mari épousé à 12. Quatre ans plus tard, sous la bannière « de gueules au lion d’argent armé lampassé et couronné d’or », ses noces fastueuses avec le valeureux Olivier de Clisson, chevalier du roi Philippe VI, l’adoubent au sein d’une dynastie de guerriers présents à Bouvines, Arras, jusqu’en Orient, « au temps où les rois de France n’étaient pas des criminels… ». Le 3 août 1343, en effet, Clisson, soupçonné de conspirer pour l’ennemi anglais, est décapité sur l’ordre de celui qu’il avait loyalement servi. Le deuil de Jeanne sera le grand large qu’elle sillonnera, épée en main et vengeance au coeur, à l’assaut des vaisseaux battant pavillon français. Elle n’aurait pas été mécontente du fougueux portrait qu’elle inspire à l’auteur de Blanquette. Voilà la fière Bretagne, les flamboyants tournois, les maléfices et les exploits. On embarque !
ÉLISABETH BARILLÉ