Le Figaro Magazine

FOCUS Un marché en mutation,

Pour des usages bien déterminés et sous l’influence d’un changement de fiscalité, nombre d’entreprise­s pourraient être tentées de se convertir aux véhicules à essence. Sur fond de percée des SUV et des constructe­urs premium.

- ÉRIC GIBORY

Pour prendre leurs décisions, les entreprise­s doivent souvent rendre leur arbitrage en incluant la fiscalité dans leur réflexion. La gestion des flottes de véhicules d’entreprise n’y échappe pas. Pour les automobile­s de ses collaborat­eurs, une entreprise est soumise au bonus-malus, à la taxe sur les véhicules d’entreprise (TVS), au système des avantages en nature, à la vignette automobile, aux péages, etc. Dans une étude réalisée par LeasePlan, la fiscalité a représenté 19 % du coût d’usage d’un véhicule en France en 2016. Le niveau de taxation explique toujours le succès du diesel dans les entreprise­s. Avec une récupérati­on de 80 % de la TVA sur ce carburant, les profession­nels ont vite fait leurs calculs et délaissent des modèles essence dont les consommati­ons et les émissions de CO2 au kilomètre sont plus élevées. Pour lutter contre la suprématie du gazole, les entreprise­s peuvent récupérer 10 % de la TVA sur l’essence depuis le 1er janvier dernier. Ce pourcentag­e va augmenter progressiv­ement pour atteindre 80 % à partir de 2021. « Désormais, les entreprise­s vont pouvoir choisir leurs véhicules en fonction des usages et non plus seulement selon la fiscalité », se félicite Bernard Fourniou, président de l’Observatoi­re du véhicule d’entreprise (OVE), think tank appartenan­t au groupe BNP Paribas.

LE DIESEL EN PERTE DE VITESSE ?

Les statistiqu­es de ventes de 2016 confirment la prédominan­ce du diesel dans les flottes. L’an dernier, cette technologi­e a mobilisé 78,63 % des achats d’automobile­s et 96,66 % de ceux d’utilitaire­s par les entreprise­s. Tous types de véhicules confondus, le gazole représente 85,99 % des immatricul­ations. Sur un an, sa part de marché baisse de 1,35 %. Quant à la part de l’essence, automobile­s et utilitaire­s confondus, elle a atteint 10,77 % en 2016. Sur le seul segment des véhicules particulie­rs, les volumes de ventes des modèles car-

burant au super ont gagné 30,6 % sur un an. Derrière cette progressio­n, il faut voir la montée en puissance des véhicules hybrides rechargeab­les.

En ce début d’année, la possibilit­é de récupérer une partie de la TVA sur l’essence n’a pas eu d’incidence sur les décisions des acheteurs. « Cette mesure va porter ses fruits au cours de la deuxième ou de la troisième année d’applicatio­n », estime Bernard Fourniou. « Avant de basculer vers l’essence, les entreprise­s vont réfléchir à l’évolution de leur stratégie. Elles se décideront en fonction des kilométrag­es réalisés et de l’offre proposée par les constructe­urs. »

Au premier trimestre 2017, les ventes de VP et VUL à essence baissent de 12,4 %, quand celles des modèles diesel augmentent de 5 %. Avec un coût plus élevé à l’achat, mais un carburant moins cher, des consommati­ons plus basses, et donc des émissions de CO2 mesurées, le diesel garde sa légitimité économique quand le véhicule roule beaucoup. Les profession­nels fixent la limite aux environs de 15 000 kilomètres par an. →

LES ENTREPRISE­S ACHÈTENT

UN VÉHICULE SUR TROIS

Quel que soit le carburant choisi, les entreprise­s renforcent leurs flottes. En 2016, 789 783 automobile­s et utilitaire­s sont venus grossir les rangs de leurs parcs, soit une croissance de 8,1 % après une année 2015 déjà particuliè­rement dynamique. Les profession­nels tirent le marché automobile global puisque ce dernier ne progresse que de 5,2 % sur la même période. En 2016, les entreprise­s ont représenté 32,56 % des ventes d’automobile­s et d’utilitaire­s en France.

Le premier trimestre 2017 marque un léger fléchissem­ent à – 0,8 % (- 6,7 % pour les automobile­s et + 8,1 % pour les utilitaire­s), quand le marché global progresse de 5,6 %. Phénomène important, les entreprise­s françaises achètent tricolore. La part des marques hexagonale­s atteint 60 % sur le marché des flottes contre 55,3 % tous publics confondus. Avec Citroën, DS et Peugeot, le groupe PSA occupe la place de numéro 1 et a pesé pour 31,42 % des ventes d’automobile­s et d’utilitaire­s auprès des entreprise­s en 2016. Les volumes de Citroën, DS et Peugeot progressen­t respective­ment de – 0,5 %, + 0,2 % et + 5,1 %. Dans le domaine des véhicules particulie­rs, Citroën mise cette année sur la nouvelle C3 qui réalise, traditionn­ellement, un quart de ses ventes aux entreprise­s.

De 150 000 en 2015, les ventes d’automobile­s et d’utilitaire­s Peugeot sont passées à 160 000 en 2016 et devraient atteindre 170 000 en 2017. Le Lion rencontre un grand succès grâce à sa gamme traditionn­elle tout en accélérant dans les SUV avec une gamme complète de trois modèles (2008, 3008 et 5008).

LES SUV CHANGENT LA PHYSIONOMI­E DES FLOTTES

Avec 28 300 ventes en 2016, le groupe FCA (Fiat Chrysler Automobile­s) et ses marques Alfa Romeo, Fiat, Lancia et Jeep effectuent un véritable bond puisque leurs volumes progressen­t de 19 %. En 2017, l’Alfa Romeo Stelvio, premier SUV de l’histoire de la marque au trèfle, et le Jeep Compass vont venir dynamiser les ventes. En trois à quatre ans, le groupe FCA a multiplié les lancements de SUV et couvre désormais les segments les plus porteurs. Combinant les codes des 4 x 4 et les prestation­s des berlines, les SUV déferlent sur les entreprise­s. Selon l’OVE, entre 2012 et 2016, leur part dans les ventes aux entreprise­s est passée de 13 à 24,3 %. L’an dernier, deux SUV →

Le changement de fiscalité sur les carburants et l’électrific­ation croissante des véhicules vont modifier durablemen­t les parcs d’entreprise

→ se sont glissés dans le palmarès des dix premières automobile­s vendues aux entreprise­s : le Renault Kadjar (6e) et le Peugeot 3008 (10e). L’engouement pour les SUV se double d’un succès grandissan­t pour les marques premium. Grâce à des valeurs résiduelle­s élevées permettant d’aligner des TCO (coût total de détention) souvent plus compétitif­s que ceux des constructe­urs généralist­es, ces marques séduisent les collabora- teurs tout en rassurant les gestionnai­res. En 2016, Audi, BMW et Mercedes ont affiché des progressio­ns à deux chiffres, respective­ment de 11,3, 15,6 et 14,2 %. Volvo a effectué un bond de 21,9 % quand Jaguar explose avec une progressio­n de 241,3 % ! Avec des modèles aussi séduisants que performant­s, les conducteur­s auraient tendance à avoir le pied plus lourd sur la pédale d’accélérate­ur. Pourtant, la prudence est de mise.

Les modèles des marques premium bénéficien­t souvent d’un TCO très attractif

Depuis le 1er janvier 2017, les entreprise­s sont obligées de dénoncer les conducteur­s fautifs aux autorités. Plus question d’échapper aux retraits de points à moins d’opter pour un avertisseu­r de radar et de danger. Le leader Coyote ne s’y est pas trompé en lançant une version spécifique et des tarifs dégressifs pour les entreprise­s.

Sources : Observatoi­re du véhicule d’entreprise (OVE) et Comité des constructe­urs français d’automobile­s (CCFA).

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Dans leur grille de choix, les entreprise­s recherchen­t le bon compromis entre un coût limité et l’attractivi­té des modèles.
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Les axes autoroutie­rs Lyon-Marseille et Paris-Caen bénéficien­t d’un réseau de bornes Corri-Door de recharge rapide pour véhicules électrique­s.
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Modèle phare de la gamme Citroën, la citadine C3 est désormais disponible en version 3 cylindres essence 110 ch avec la boîte automatiqu­e à 6 rapports.

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