NAPOLÉON III (ENCORE) RÉHABILITÉ
Napoléon le Petit… » On a peine à mesurer, aujourd’hui, à quel point la célèbre formule que Victor Hugo lançait pour vilipender Napoléon III résonnait avec les passions de sa génération. Fils de Louis, le roi de Hollande, et d’Hortense de Beauharnais, Louis-Napoléon Bonaparte avait commencé sa carrière politique en flirtant avec les idées révolutionnaires. Devenu le premier président de la République, en 1848, il s’était ensuite appuyé sur les conservateurs. Ceux-ci soutiendront le coup d’Etat qu’il fomentera, en 1851, afin de se donner les pleins pouvoirs, tournant préludant à la proclamation du second Empire, un régime auquel le parti républicain du XIXe siècle et sa postérité voueront une haine inexpiable. La guerre des frontières perdue devant la Prusse et la capitulation de Sedan, en 1870, achèveront de discréditer ce souverain et son gouvernement dans la mémoire nationale.
Depuis une trentaine d’années, toutefois, les travaux d’historiens se multiplient à leur propos. C’est non seulement la personne du dernier empereur français qui est réévaluée, mais son oeuvre politique, économique et sociale, et même l’héritage culturel de son époque. Historien, auteur de nombreuses biographies, Alain Frerejean s’était intéressé, il y a vingt ans, au prince impérial, le fils de Napoléon III tué chez les Zoulous en 1879 (Napoléon IV, Albin Michel, 1997). Voici qu’il nous donne une biographie de son père. Un ouvrage de facture classique, vivant et documenté, et de jugement équilibré, ne tombant ni dans le panégyrique ni dans la critique systématique. L’auteur n’est pas dupe des faiblesses de son personnage, capable d’un cynisme confondant, jouant sur tous les tableaux pour parvenir à ses buts. Il n’occulte pas plus ses atermoiements, notamment en politique étrangère où Napoléon III engagea la France dans des conflits qui ne servaient pas ses intérêts nationaux. Mais Frerejean rappelle que le second Empire, c’est aussi l’embellissement et la modernisation de Paris, un formidable essor industriel, commercial et agricole du pays, des dispositions sociales novatrices ou encore l’acquisition de Nice et de la Savoie. Les vingt-deux années au cours desquelles Louis-Napoléon Bonaparte a présidé aux destinées du pays, quoi qu’on pense de lui par ailleurs, ne sont donc pas les plus sombres de notre Histoire.