IL EST ENCORE TEMPS D’AGIR
Près de 343 000 contribuables paient l’ISF. Cette année encore, ils devront déclarer la valeur de leur patrimoine au fisc. Nos conseils.
C’est, en principe, le montant de votre patrimoine au 1er janvier 2017 que vous devrez déclarer au fisc, soit avec votre déclaration de revenu, si votre patrimoine est inférieur à 2,57 millions d’euros, soit sur la déclaration spécifique n° 2 725 s’il excède ce montant. Mais rien ne vous empêche de prendre les meilleures options pour réduire la note. Attention, vous devrez déclarer et payer l’impôt cette année, quel que soit le résultat de l’élection présidentielle. Certains candidats prônent, en effet, sa suppression, mais celle-ci n’interviendrait, au mieux, qu’à compter de 2018. Voici nos conseils pour ne pas déclarer un euro de trop.
IMMOBILIER : appliquez les bonnes décotes
Vos biens immobiliers doivent être évalués sur la base de leur valeur vénale. Il s’agit du prix auquel vous auriez pu les revendre au 1er janvier, compte tenu de leurs caractéristiques propres (superficie, état d’entretien, standing, emplacement…) et du jeu de l’offre et de la demande. Une fois cette valeur déterminée, vous pouvez appliquer un certain pourcentage de décote suivant la nature du bien.
■ Il s’agit de votre résidence principale : appliquez un abattement de 30 %, même si vous ne la détenez qu’en usufruit (mais le démembrement de propriété ne donne droit en lui-même à aucun abattement). « En revanche, vous ne pouvez pas appliquer cet abattement de 30 % si vous détenez votre résidence principale par le biais d’une SCI car, dans ce cas, ce sont les parts de la SCI que vous allez déclarer et pas un bien immobilier », rappelle Sandrine Quilici directeur de l’ingénierie patrimoniale chez Pictet Wealth Management.
■ Vous le détenez en indivision : vous pouvez appliquer une décote de l’ordre de 20 % compte tenu de la difficulté de vendre un bien indivis.
■ Vous le détenez par l’intermédiaire d’une SCI : vous pouvez pratiquer une décote d’illiquidité de l’ordre de 10 % si vous détenez la majorité des parts, pouvant même atteindre 20 % s’il s’agit d’une participation minoritaire ou d’une société familiale.
■ Vous le donnez en location à titre d’habitation : vous pouvez appliquer une décote de l’ordre de 15 à 20 % puisque, là aussi, le bien est plus difficile à vendre que s’il était libre. A noter que la Cour de cassation, dans un arrêt du 16 février 2016 (chambre commerciale, n° 14-23.301), a accepté de cumuler l’abattement pour location avec celui relatif à l’indivision. Mais le fisc n’a pas, pour le moment, souhaité donner à cet arrêt une portée générale. Ce cumul doit donc être appliqué avec prudence.
TITRES DE SOCIÉTÉ : vous pouvez minorer leur valeur
Si vous avez un portefeuille d’actions cotées (hors PEA pour lequel vous devez obligatoirement retenir sa valeur liquidative), vous avez le choix entre retenir le dernier connu au 30 décembre 2016 ou la moyenne des 30 derniers cours de Bourse de l’année 2016. Ces deux méthodes peuvent être utilisées simultanément : autrement dit, pour chaque ligne de titres, vous pouvez retenir l’évaluation la plus basse.
Si vous détenez des actions ou parts de l’entreprise dans laquelle vous exercez (ou avez exercé) votre activité principale en tant que salarié ou mandataire social, vous pouvez bénéficier d’une exonération partielle d’ISF à hauteur de 75 % de leur valeur. Pour cela, il faut prendre l’engagement de les conserver - lors du dépôt de votre déclaration d’ISF - pendant au moins six ans. « Une condition supplémentaire a été ajoutée cette année pour bénéficier de cette exonération. La notion d’activité principale doit correspondre à une véritable activité professionnelle donnant lieu à une rémunération normale, représentant plus de la moitié des revenus professionnels du contribuable », prévient Catherine Costa directeur à l’ingénierie patrimoniale à la Banque Privée 1818. Sous cette réserve, il est possible de bénéficier de l’exonération, quel que soit le mode de détention des titres, y compris lorsqu’ils sont détenus dans le cadre d’un plan d’épargne entreprise, que ce soit en direct ou par le biais d’un fonds commun de placement d’entreprise (FCPE).
DONS : une solution pour réduire la note
Vous pouvez déduire du montant de l’ISF à payer 75 % des dons consentis à certains organismes d’intérêt général. Le montant de cette réduction est plafonné à 50 000 € (45 000 € si vous profitez aussi de la réduction ISF-PME, voir ciaprès). Attention, les organismes permettant de bénéficier de cet avantage ne sont pas les mêmes que ceux retenus pour la réduction d’impôt sur le revenu : il doit s’agir d’une fondation reconnue d’utilité publique ou d’un organisme agissant dans le domaine de la recherche, de l’enseignement supérieur ou de l’insertion des personnes en difficulté. « Notre système fiscal français est un des plus favorables à la philanthropie. Certes, la réduction d’im-
pôt n’a jamais été la motivation première des donateurs, mais elle a un effet d’amplificateur. Elle leur permet de donner plus que ce qu’ils comptaient donner », explique Axelle Davezac, directeur général de la Fondation de France.
INVESTIR DANS LES PME : jusqu’à 18 000 € de réduction d’ISF
L’an dernier, près de 45 000 redevables de l’ISF – un nombre multiplié par deux en quatre ans – ont placé 11 600 € en moyenne dans des fonds dédiés aux entreprises régionales (les Fonds d’investissement de proximité, FIP) ou innovantes (via les Fonds communs de placement dans l’innovation, FCPI). Ajouté à ceux qui y ont investi pour diminuer leur impôt sur le revenu, cela fait près de 1 milliard d’euros ainsi drainés vers les entreprises en quête de financement. Les investisseurs y trouvent aussi leur compte, avec une réduction d’ISF comprise entre 40 et 50 % des sommes investies, selon les fonds, pour
L’an dernier, près de 45 000 assujettis à l’ISF ont investi dans des fonds dédiés aux PME
une réduction maximale de 18 000 €. Malheureusement, la performance finale de son investissement est inconnue au départ, et la rentabilité pas toujours au rendez-vous. Selon nos calculs, près de 60 % des 700 FIP ou FCPI sont d’ailleurs en perte. Mais une fois les réductions d’impôt intégrées, seul 1 fonds sur 5 devrait faire perdre de l’argent aux souscripteurs, tandis que 30 % devraient leur rapporter plus de 6 % net par an. Cette année, de nouvelles contraintes sont venues compliquer la gestion de ces produits, au détriment des FIP. Pour être financées par des fonds immatriculés depuis le 1er janvier 2016, les sociétés doivent avoir débuté leur activité commerciale depuis moins de dix ans dans le cas des FCPI, voire moins de sept ans (pour les FIP). « Cela ne change rien pour nous, argumente Philippe Pouletty, cofondateur de Truffle Capital, plus de 20 FCPI à son actif. Nous avons toujours été dans l’esprit de la loi, qui est d’accorder des avantages fiscaux en contrepartie d’un soutien aux jeunes entreprises, notamment innovantes. Or, nous sommes cofondateurs, voire fondateurs de 80 % des entreprises que nous finançons ». Intéressés par des entreprises plus mûres, les acteurs du capital-développement se veulent également confiants.
« Il existe plusieurs cas de figure permettant de continuer à financer des entreprises plus âgées via des FCPI, relativise Eric Boutchnei, d’Isatis Capital, en quête de PME innovantes ayant déjà fait leurs preuves. Les gérants spécialisés dans les FIP auront plus de difficulté. » Les petites sociétés de gestion sont, elles aussi, davantage pénalisées. Tous les fonds immatriculés depuis le 23 décembre dernier ne peuvent plus prélever des frais supérieurs à 30 % des versements des investisseurs (décret n° 2016-1794 du 21.12.16). « Cela pénalise surtout les gérants qui n’ont pas la taille suffisante pour amortir les frais fixes très importants dans ce métier », commente Eric Boutchnei.
Il reste une possibilité pour diminuer l’ISF : investir directement au capital de PME, la réduction d’impôt de 50 % pouvant alors atteindre 45 000 €. C’est possible via les holdings ISF proposées par quelques sociétés de gestion. En revanche, c’en est fini des « mandats ISF », ces montages juridiques alambiqués au travers desquels les frais de gestion ne sont pas facturés aux souscripteurs, mais aux entreprises financées, au risque de les mettre en péril. Le décret encadrant les frais du capital-investissement y a mis un terme. A noter, enfin, qu’il est aussi possible d’investir via une plateforme de finance participative telle qu’Anaxago, Happy Capital, SmartAngels, Sowefund ou Wiseed, présentant des entreprises en quête de financement.
« Choisir la PME dans laquelle investir permet à la fois de répondre à ses aspirations tout en pouvant espérer un bon retour sur investissement », plaide Stéphanie Savel, présidente de Wiseed.
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