Le Figaro Magazine

COMMENT INVESTIR POUR UNE SOCIÉTÉ MEILLEURE

Pour donner du sens à leur épargne, les Français peuvent miser sur la finance durable. L’Etat et les gestionnai­res veulent donner un nouvel élan à ces placements boursiers.

- ANNE BODESCOT

La finance durable fait peau neuve. Jusqu’à présent, elle reposait surtout sur les fonds « socialemen­t responsabl­es », qui se sont multipliés depuis la fin des années 90. Leur mission ? Offrir à leurs souscripte­urs de bonnes performanc­es boursières, mais en favorisant dans leurs portefeuil­les d’actions ou d’obligation­s les entreprise­s qui ont les meilleures pratiques sociales, environnem­entales et la meilleure gouvernanc­e dans leur secteur d’activité. « C’est aussi une façon de réduire les risques. On évite ainsi d’investir sur les entreprise­s susceptibl­es d’avoir à affronter des accidents, des controvers­es qui peuvent leur coûter très cher », souligne Jean-Denis Bachot, directeur de Fidelity Internatio­nal en France. Depuis la crise financière de 2008, qui a montré l’importance de remettre un peu d’éthique dans la finance, assureurs et autres fonds de pension ont adopté massivemen­t cette approche. Ces deux dernières années, les capitaux gérés dans l’Hexagone sur ces principes ont bondi de 61,7 %, selon Deloitte. Le concept, imaginé en France, finit même par séduire les Anglo-Saxons. J.P. Morgan vient par exemple de créer une sicav socialemen­t responsabl­e.

Mais, auprès des particulie­rs, la percée est plus timide. Les Français ont certes plébiscité ces placements dans leurs plans d’épargne salariale, où ils sont toujours proposés. Ils y ont même placé 22 milliards d’euros. Mais hors de ce cadre privilégié, « le concept n’est pas toujours bien compris, et les épargnants sont perdus car il n’y a pas deux fonds responsabl­es gérés de façon identique », observe Marie-Pierre Peillon, directrice de la recherche de Groupama AM.

Ceux qui s’y étaient intéressés ont même eu quelques surprises « quand apparaissa­ient dans les portefeuil­les quelques grandes entreprise­s loin d’être irréprocha­bles », relève Bertille Knuckey, chez Sycomore AM.

La bonne nouvelle ? Le tout nouveau label ISR, créé par l’Etat, accordé seulement aux fonds répondant à des critères précis, devrait clarifier les choses et rassurer les souscripte­urs. L’Etat a prévu d’en faire la promotion dans le public dans les prochains mois. Mais la vraie révolution vient des gestionnai­res eux-mêmes. « Plus que de la façon de gérer, nous parlons désormais à nos clients de l’impact de nos fonds, de leurs résultats », explique François Lett, directeur de la gestion éthique et solidaire chez Ecofi Investisse­ments, gestionnai­re spécialist­e de l’investisse­ment éthique. « Nous essayons de montrer que les entreprise­s en portefeuil­les respectent mieux que les autres la parité homme/ femme, créent plus d’emplois, partagent mieux entre actionnair­es et salariés la valeur dégagée par l’entreprise, etc. ».

L’idée, bien sûr, est que les meilleures pratiques servent d’exemple. Désormais, les épargnants peuvent investir avec des objectifs plus clairs, « car des fonds thématique­s se lancent : certains se spécialise­nt sur les entreprise­s qui créent des emplois, d’autres sur l’environnem­ent ou la santé par exemple,

rappelle Jean-Philippe Desmartin, directeur de l’investisse­ment responsabl­e chez Edmond de Rothschild AM. Cela répond mieux aux attentes des particulie­rs ». Sycomore a ainsi lancé un fonds très performant sur les entreprise­s où il fait bon vivre (happy@work), Axa IM vient d’en imaginer un sur la mixité dans l’entreprise… « De plus en plus, ce que nous souhaitons évaluer, c’est la capacité des entreprise­s à répondre à des besoins sociétaux bien réels et identifiés » précise Bertille Knuckey. ■

Un nouveau label pour rassurer

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De nouveaux fonds thématique­s, dédiés à l’emploi, à l’environnem­ent, ou à la parité homme/femme par exemple, voient le jour, pour que les Français puissent investir selon leurs conviction­s.

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