Le Figaro Magazine

BORDEAUX REDÉCO UVRE SON FLEUVE

La 48e édition de la Solitaire Urgo Le Figaro sera lancée des quais de la Garonne le samedi 3 juin. Sur le ponton d’honneur, les skippers retrouvent une ville en lien de plus en plus étroit avec son fleuve.

- PAR OLIVIER MICHEL

S’il n’y avait pas eu le fleuve et la mer, Bordeaux ne serait pas cette ville magnifique âgée de 20 siècles. » Dans son bureau, Stephan Delaux, adjoint au maire en charge du tourisme, de la promotion touristiqu­e du territoire, de l’animation de la ville et de la vie fluviale, répond ainsi à tous ceux qui auraient oublié le lien indéfectib­le qui unit depuis toujours l’Océan et la Garonne à Bordeaux. Et d’ajouter : « Mais il est vrai que l’élection d’Alain Juppé en 1995 et son projet pour Bordeaux ont permis de redonner une vie au fleuve, et le fleuve à sa ville. »

Tout le monde en convient, l’arrivée d’Alain Juppé à la mairie, avec un projet urbain ambitieux, a tout changé. En libérant les quais des grilles rouillées qui en interdisai­ent l’accès, des hangars noirs, crasseux, et des milliers de tonneaux qui bouchaient la vue, il a sérieuseme­nt rafraîchi la mémoire collective de ses habitants, leur permettant de retrouver leur fleuve, de s’en rapprocher, et finalement, de renouer de façon concrète avec l’histoire maritime de leur ville.

Même si elle se trouve à 60 kilomètres de la mer, Bordeaux a toujours été une cité de marins, d’armateurs, de négociants. Dès 1793, d’innombrabl­es chantiers navals équipent la flotte corsaire et, au début du XIXe siècle, deviennent les leaders des clippers (bateaux à coque en bois et en acier), multiplian­t par la suite les vapeurs fluviaux pour le trafic local. Après 1875, on assiste à l’essor des grands navires de commerce, paquebots et cargos, mais surtout à celui des bateaux militaires, cuirassés, croiseurst­orpilleurs. Bordeaux s’enorgueill­it d’être le « premier arsenal privé » de France, titre qu’elle conservera jusque dans les années 1950. En 1924, le port de Bordeaux obtient le statut de port autonome. Des hangars standardis­és remplacent tentes et baraquemen­ts ; l’espace portuaire et le fleuve sont isolés de la ville au point que la promenade des Quinconces, un peu en hauteur, ne permet même pas de voir le fleuve. Pour se faire une idée précise de l’atmosphère qui régnait sur les quais, il faut voir les toiles du musée

d’Aquitaine ou du musée des Beaux-Arts qui illustrent parfaiteme­nt les lieux. Enfin, la ville est tellement maritime que le permis de navigation en mer est toujours valable, de l’Océan jusqu’au pont de Pierre.

Mais Bordeaux, port de fond d’estuaire, va décliner lentement jusque dans les années 1980. Aujourd’hui éclaté en neuf points, il ne prétend plus rivaliser avec Hambourg ou Le Havre. Il s’est transformé en s’imposant comme deuxième port de la façade atlantique pour les escales de croisières maritimes. En 2016, 50 bateaux se sont amarrés près de la place de la Bourse et permettant à 32 000 touristes de découvrir un patrimoine inscrit à l’Unesco et un vignoble exceptionn­el. En cinq ans, Bordeaux est devenue, l’une des plus belles destinatio­ns maritimes urbaines au monde.

La Garonne n’a jamais été un fleuve d’agrément ;

il a donc fallu lui imaginer une autre vie. C’est chose faite. Bordeaux s’est affirmée comme tête de ligne pour les spécialist­es de la navigation fluviale. Des compagnies organisent des croisières d’une semaine pour découvrir la Garonne jusqu’à Cadillac et la Dordogne jusqu’à Libourne, agrémentée­s de visites des vignobles. Deux navettes fluviales, accessible­s par cinq pontons, permettent de se déplacer d’une rive à l’autre pour le prix d’un ticket de tramway. Et ce n’est pas tout. Après avoir libéré ses rives, Alain Juppé a voulu réanimer le fleuve. Depuis 1999, les Bordelais ont droit tous les deux ans à la Fête du fleuve, en alternance avec la Fête du vin. « Au début, la fête durait un long week-end, précise Stephan Delaux, et l’on n’y invitait que des villes jumelles. Depuis la Solitaire du Figaro en 2013, elle dure une dizaine de jours sur deux week-ends. Chaque fête a son thème : la vie de l’estuaire, ses berges, son patrimoine, sa faune et sa flore, ses communes. Et cette année, on organise la Parade des héros, une grande parade fluviale pour fêter l’arrivée des 43 skippers et de leurs monotypes qui, après avoir remonté l’estuaire, vont s’ancrer au ponton d’honneur en ville. Il n’y a pas meilleur chemin que la Garonne pour découvrir la ville et le vignoble bordelais ; Blaye, Saint-Emilion, Bourg, Entre-deux-Mers, Sauternes, Pessac-Léognan sont les seules propriétés viticoles au monde que l’on peut visiter en bateau. Enfin, sur ce même fleuve, vous pouvez participer à des régates organisées par l’école de voile Les Marins de la Lune, ou voir passer les immenses barges qui emmènent à Toulouse des parties d’A380. » Pour la troisième fois depuis 2013, Bordeaux reçoit la Solitaire Urgo Le Figaro et lui réserve dix jours de fête entre terre et mer, eau et vin, fidèle à sa réputation de porte ouverte sur l’Océan. ■

BORDEAUX A TOUJOURS ÉTÉ UNE CITÉ DE MARINS, DE NÉGOCIANTS ET D’ARMATEURS

 ??  ?? Chaque année, 50 bateaux de croisière s’amarrent au quai de Bordeaux, permettant à des dizaines de milliers de touristes de découvrir un site inscrit au patrimoine de l’Unesco en 2007.
Chaque année, 50 bateaux de croisière s’amarrent au quai de Bordeaux, permettant à des dizaines de milliers de touristes de découvrir un site inscrit au patrimoine de l’Unesco en 2007.
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France