FAITES LE PLEIN SUR VOS CONTRATS
Envisagée à partir de l’automne 2018, la grande réforme de la fiscalité de l’épargne ne laissera pas l’assurance-vie intacte. Une incitation à remplir rapidement les contrats.
En annonçant pendant la campagne qu’il traiterait à égalité la plupart des placements financiers, avec un taux forfaitaire de 30 % incluant les prélèvements sociaux, Emmanuel Macron a pu réjouir les actionnaires individuels et les détenteurs de sicav, qui verront le poids de l’impôt diminuer, mais il a inquiété les millions de Français qui détiennent une assurance-vie. C’est près d’un tiers d’impôts et cotisations sociales supplémentaires qui, potentiellement, guette les épargnants (lire encadré). Pas de panique pour autant : cette nouvelle taxation ne devrait intervenir qu’à compter de 2019, si l’on en croit les déclarations écrites faites par l’équipe d’Emmanuel Macron à la Faider, une fédération d’associations pour l’épargne retraite. Elle pourrait en effet être présentée à l’automne 2018 au Parlement. Ensuite, elle ne porterait que sur les nouveaux versements, et non sur les capitaux déjà constitués. L’épargne existante ne serait pas touchée. Enfin, seuls les encours supérieurs à 150 000 € seraient concernés. Les contrats moins bien garnis continueraient à profiter de la fiscalité actuelle. « Il est difficile d’y voir clair, constatePhilippeCrevel,secrétaire général du Cercle de l’épargne. Les déclarations de l’équipe du candidat ont parfois été contradictoires. » Il n’est pas possible de savoir, pour le moment, si le seuil des 150 000 € sera retenu par contrat ou par personne. « S’il s’agit d’un montant par contrat, la règle sera facile à contourner en répartissant ses investissements sur plusieurs produits, indique Philippe Crevel. S’il s’agit d’un montant par personne, cela pose un problème de confidentialité car les assureurs devront avoir connaissance des autres contrats souscrits par l’épargnant. » Il existe aussi une inconnue de taille : ce prélèvement de 30 % s’appliquerait-il quelle que soit la durée du contrat ? Si c’est le cas, la taxation deviendrait bien plus avantageuse pour les contrats récents qui sont aujourd’hui taxés à 50,5 % s’ils ont moins de quatre ans (35 % + 15,5 % de prélèvements sociaux) et à 30,5 % (15 % + 15,5 %) s’ils ont entre quatre et huit ans. L’ob- jectif étant de renforcer l’épargne longue et productive, il y a peu de chance que ce dernier scénario soit le bon, et les taux de prélèvements devraient donc rester inchangés en deçà de 8 ans. « Ce point doit être précisé, estime Gérard Bekerman, le président de l’Afer. L’assurance-vie est populaire, et si l’on veut qu’elle serve au financement des entreprises, à l’économie, à la croissance, il ne faut pas la fiscaliser davantage. »
Pour les épargnants fortunés, susceptibles d’être touchés par ce durcissement, il est donc l’heure de faire le plein d’assurance-vie pour mettre le maximum d’argent à l’abri des nouvelles règles. « Dans la mesure où Emmanuel Macron s’est engagé à ne pas recourir à la rétroactivité fiscale, il n’existe aucune raison de freiner pour l’heure ses investissements », explique Philippe Crevel. Selon lui, il sera temps de réexaminer la situation l’an prochain, en fonction de la tournure de la réforme. En outre, aucun changement de la fiscalité successorale n’étant prévu, les détenteurs de grosses fortunes qui jouent l’assurance-vie pour organiser une transmission avec le moindre frottement fiscal n’ont aucune raison de s’en détourner.
Les assureurs voient aussi dans les projets d’Emmanuel Macron une raison de se frotter les mains : « La sortie de l’assurance-vie de l’assiette de l’ISF est un point positif », juge Gérard Bekerman.
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La nouvelle taxation devrait être précisée à l’automne prochain