Le Figaro Magazine

UNE MAISON DE VACANCES AUX BALÉARES

A Minorque, les Anglais ont longtemps dominé le marché immobilier, tout comme dans le nord de Majorque, mais les Français arrivent en force avec des budgets souvent plus importants. Bien que les prix aient retrouvé leurs niveaux d’avant la crise, ils rest

- DE NOTRE ENVOYÉE SPÉCIALE CAROLE PAPAZIAN

Mi-mai à Minorque, les touristes sont encore rares, alors qu’à Pollença et à Port de Pollença, dans le nord de l’île de Majorque, les terrasses des cafés et les ruelles sont déjà bien remplies. Aux Baléares, la saison touristiqu­e démarre plus tôt dans une île que dans l’autre. Et ce n’est pas par hasard.

Classée réserve de biosphère par l’Unesco, Minorque est une île un peu à part dans l’archipel grâce à ses côtes et ses paysages préservés. A côté de la festive Ibiza, plus bling-bling, de Formentera, hippie chic, et de Majorque bien aimée des touropérat­eurs, Minorque cultive l’image d’un repaire encore secret. D’un certain entre-soi. Un repaire que les Anglais adorent depuis longtemps et que les Français commencent seulement à investir. « Depuis quelques années, nous avons beaucoup d’acheteurs français et ils ont souvent des budgets supérieurs à ceux des Anglais », constate Francisco Arnau, le responsabl­e local d’Engel & Völkers, le réseau immobilier allemand qui s’est implanté avec succès aux Baléares. « Ils nous disent souvent que notre île leur rappelle ce qu’était le sud de la France il y a une trentaine d’années », ajoute ce Minorquin fier de son île et de son caractère catalan. « Ici, tout le monde se connaît, on peut laisserses­cléssursav­oiture,mais il faut comprendre les règles », insiste-t-il. Le marché immobilier de Minorque, qui a accueilli l’an dernier 1,5 million de visiteurs (contre plus de 10 millions pour Majorque), est en plein boom et les prix qui avaient chuté, parfois de 40 %, comme partout en Espagne à la suite de la crise

Sur le segment du luxe, les prix ont augmenté de 15 % en un an

de 2008, ont retrouvé et même dépassé leurs sommets d’autrefois. On croise encore quelques vestiges de cette crise, de petits programmes pas finis ou vides qui ont été saisis par les banques et pas remis sur le marché parce que souvent mal situés. Mais ils sont rares.

Les Baléares attirent une partie des vacanciers qui partaient auparavant en Tunisie ou au Maroc et ce nouvel élan entraîne les marchés immobilier­s locaux. D’autant que les liaisons aériennes avec les pays européens, et notamment la France, se sont multipliée­s. Ceux qui ont fait de bonnes affaires, ce sont bien sûr les acheteurs arrivés il y a six ou sept ans. Selon Engel & Völkers, les prix ont augmenté de 15 % en →

→ moyenne à Minorque depuis un an pour les villas qui ont vue sur la mer et les fincas, ces grandes propriétés rurales. A Minorque, les acheteurs savent qu’ils ne trouveront pas d’immense plage de sable blanc comme à Formentera, mais qu’ils auront le choix entre de nombreuses criques à l’eau turquoise.

Le centre de l’île est préservé et de nombreuses fermes sont toujours en activité. Richard Branson, le flamboyant entreprene­ur fondateur de Virgin, quiasillon­nélemonde,traversé l’Atlantique en ballon gonflable et la Manche en kitesurf, pose régulièrem­ent ses valises à Minorque. Consciente­s de la nécessité de préserver leur capital nature, les autorités locales ont institué des règles de constructi­on strictes. Certains quartiers à l’entrée des villages sont dédiés à l’urbanisati­on, mais ils sont bien circonscri­ts. « Pour être sûr de ne pas faire une mauvaise affaire, il faut faire appel à un juriste local », conseille Laurent Morel-Ruymen, un Français installé à Minorque qui a rénové un magnifique palais de Ciutadella pour y installer Can Faustino, un hôtel Relais & Châteaux. Car, mieux vaut être prévenu, des déconvenue­s sont possibles si l’on ne maîtrise pas bien ces règles d’urbanisme locales. Ainsi, l’acheteur français d’une ancienne propriété en pleine campagne, qui a rasé entièremen­t les murs existants pourbâtiru­nenouvelle­maison, risque bien de se retrouver dans l’impossibil­ité de la construire ! « Bâtir une constructi­on neuve dans la campagne est interdit », explique sans frémir Francisco Arnau.

Les biens immobilier­s à vendre dans l’île, comme d’ailleurs à Majorque, sont nombreux et quel que soit son budget on peut trouver ce que l’on cherche. L’échelle des prix est grande : à Minorque, on peut acheter à 2 000 €/m2 dans les zones les plus touristiqu­es près des hôtels à Cala en Porter, Punta Prima,

Dans les zones les plus touristiqu­es, les petits budgets peuvent investir à partir de 2 000 €/m2

Cala en Blanes, Cap d’Artrutx par exemple, mais il faut compter au moins 5 000 €/m2, parfois nettement plus, pour devenir propriétai­re dans les spots les plus prisés comme Cala Morell,Ciutadella,Alcaufarou­Mahón. Un appartemen­t de 80 m² sur le port de Mahón, ville principale de Minorque avec deux chambres (photo ci-dessus) est par exemple en vente 350 000 € (il vaudrait trois fois plus à Majorque). Attention d’ailleurs à comprendre comment on compte ces fameux mètres carrés ! Les surfaces aux Baléares ne correspond­ent pas à celles qui sont indiquées « loi Carrez » en France. Les agents immobilier­s comptent là-bas la moitié des terrasses dans les mètres carrés habitables.

Ceux qui veulent être face à la mer paieront deux fois plus cher que pour une villa en deuxième ligne. Si vous êtes un inconditio­nnel de tennis, sachez que Carlos Moya, ancien vainqueur deRoland-Garrosetno­uvelentraî­neur de Rafael Nadal, a mis en vente sa maison minorquine avec accès direct à la mer dans la Cala Morell pour 1,8 million d’euros. « Une villa avec un terrain de 1 000 m2 peut valoir autour de 740 000 €, mais 1,5 million si elle a une vue mer », relève Francisco Arnau qui prévient, un rien abrupt : « Il ne faut pas essayer de tout négocier, ici, cela ne marche pas comme ça. » Climat méditerran­éen oblige, la location peut se faire plusieurs mois dans l’année. « A Pollença par exemple, à Majorque, une petite ville qui vit toute l’année, on peut louer 14 semaines par an », estime Gary Hobson, directeur de plusieurs agences Engel&VölkersàMi­norqueetMa­jorque. La plupart des investisse­urs louent d’ailleurs leur propriété une partie de l’année pour amortir les charges. Attention toutefois à bien vérifier les règles locales ici encore. A Minorque, certains appartemen­ts ne sont ainsi pas ouverts à la location touristiqu­e de courte durée (c’est le cas à Mahón, photo), et là-bas comme ailleurs, la location de longue durée se fait à des tarifs évidemment plus bas. Appartemen­t de bord de mer ou vraie maison de campagne, voire propriété agricole, toutes les options sont ouvertes à Minorque et à Majorque, et c’est une particular­ité méconnue de ces îles méditerran­éennes. Il reste possible aux Baléares de s’offrir une grande propriété dans une nature préservée. Dans le nord de Majorque, un couple d’Allemands a mis en vente la sienne, achetée il y a ving-cinq ans, en pleine campagne face aux montagnes et entourée de 28 hectares, pour 7 millions d’euros (photo p. 142).

Difficile de croire en prenant le café sur la terrasse que les plages sont toutes proches. A Minorque, une propriété d’une centaine d’hectares en bord de mer est actuelleme­nt sur le marché. Prix demandé : autour d’une quinzaine de millions d’euros. Un Français se serait déjà offert l’an dernier pour près de 12 millions d’euros une autre grande propriété agricole en bord de mer. « Les chefs d’entreprise à la recherche de calme et de discrétion investisse­nt aujourd’hui dans l’île dont ils apprécient le caractère préservé »,

indique Laurent Morel-Ruymen,quiestauss­ileproprié­taire de l’agence immobilièr­e Menorca Fincas et accompagne ceux qui se lancent dans des travaux de restaurati­on. Aux Baléares, les acheteurs d’aujourd’hui ne peuvent plus espérer faire d’aussi bonnes affaires que ceux qui sont arrivés juste après la crise. Mais à Minorque et dans certains endroits de Majorque, ils trouvent l’authentici­té, des biens « dans leur jus », comme disent les agents immobilier­s. « Ils peuvent espérer un marché porteur, dont les prix devraient s’apprécier à moyen terme de 5 % par an », estime Gary Hobson.

 ??  ?? Cette propriété de 28 ha dans le nord de Majorque est mise en vente autour de 7 millions d’euros.
Cette propriété de 28 ha dans le nord de Majorque est mise en vente autour de 7 millions d’euros.
 ??  ?? Cet appartemen­t de 80 m2 sur le port de Mahón, à Minorque, est à vendre 350 000 €.
Cet appartemen­t de 80 m2 sur le port de Mahón, à Minorque, est à vendre 350 000 €.

Newspapers in French

Newspapers from France