L’éditorial de Guillaume Roquette
La première impression est souvent la bonne. Surtout quand elle est mauvaise, ajoutait facétieusement Coco Chanel. Alors pourquoi donc Emmanuel Macron a-t-il inauguré la politique économique de son quinquennat en volant ostensiblement au secours de deux entreprises privées en difficulté ? Certes, la verrerie Arc International – qui vient d’être opportunément recapitalisée avec l’aide de la Caisse des dépôts – est une société qu’il avait déjà aidée lorsqu’il était à Bercy. Certes encore, les syndicats de l’équipementier automobile GM & S menaçaient de faire sauter leur usine si on ne leur trouvait pas de nouveaux clients pour éviter la liquidation. Certes, enfin, les élections législatives sont dans deux semaines. Mais venant d’un gouvernement que l’on croyait acquis à l’économie de marché, doté d’un Premier ministre qui se revendique de droite et d’un ministre de l’Economie – Bruno Le Maire – venant du même bord, ces premières mesures économiques laissent perplexes.
Car si les deux entreprises concernées se révèlent économiquement viables, ce qu’on leur souhaite de tout coeur, pourquoi l’Etat devrait-il jouer les pompiers de service ? Est-ce le rôle du ministre de l’Economie d’enjoindre à Peugeot et Renault, comme il l’a fait le week-end dernier, de se fournir chez GM & S ? Malgré tout son talent, qui est grand, on peut douter que Bruno Le Maire soit l’homme le plus qualifié pour décider chez qui nos constructeurs automobiles nationaux doivent acheter leurs carters d’huile ou leurs colonnes de direction. A chacun son métier.
L’Etat (qui serait en faillite depuis belle lurette si on lui appliquait les normes de gestion du secteur privé) n’a jamais résisté à la tentation de sauver des entreprises en difficulté, dès lors qu’elles se retrouvaient sous le feu des médias. On se souvient de François Hollande forçant la SNCF à acheter au prix fort à Alstom des TGV dont elle n’avait aucun besoin, pour les faire rouler sur des voies Intercités. Ou de Nicolas Sarkozy organisant le sauvetage d’une société de lingerie fine.
Malheureusement, c’est le contribuable qui paye le plus souvent la facture de ces sauvetages spectaculaires. Il n’y a que Jean-Luc Mélenchon pour croire qu’on peut sauver une entreprise « en deux coups de téléphone », comme il l’a démagogiquement assuré aux salariés de GM & S. Quand une entreprise privée est compétitive, elle n’a pas besoin de l’intervention publique pour trouver des clients ou des investisseurs.
Dans quelques semaines, Emmanuel Macron et son Premier ministre s’attaqueront – ils l’ont promis – à une ambitieuse réforme du code du travail. Il leur faudra engager un bras de fer avec les syndicats, mais surtout convaincre les Français que nos entreprises ont besoin d’un nouvel environnement social avec plus de liberté et moins d’interventionnisme public. Bref, qu’il faut laisser le secteur privé vivre comme il l’entend. Ce n’est pas exactement le message qui vient d’être envoyé.
EST-CE AU GOUVERNEMENT DE DÉCIDER À QUI RENAULT DOIT ACHETER SES CARTERS D’HUILE ?