Le Figaro Magazine

En vue : Michel Field

Après une campagne électorale musclée avec les candidats, puis l’éviction de David Pujadas, France Télévision­s a accepté la démission de son directeur de l’info.

- • PIERRE DE BOISHUE

Rien ne va plus à France Télévision­s. Après la mise à l’écart brutale et injustifié­e du présentate­ur-vedette David Pujadas, le directeur de l’informatio­n Michel Field a pris les devants lundi dernier en présentant sa démission « par souci d’apaisement ». La veille du jour où il allait devoir faire face, avec la présidente Delphine Ernotte, à une motion de défiance déposée par une rédaction de plus en plus remontée par les méthodes du duo. « Il a servi de fusible », dit-on sur place, à propos de celui qui avait pris ses fonctions en décembre 2015 et qui avait déjà été visé par un texte en avril 2016… voté à 65 % en sa défaveur.

La colère des journalist­es du groupe, réputés pour leur indépendan­ce et leur façon de travailler en vase clos, a eu raison cette fois de son avenir à ce poste. Ses dernières sorties, il est vrai, ressemblai­ent à de vrais couacs (à moins qu’ils n’étaient conçus ainsi à dessein…). A l’image de cette tribune publiée dans Libération, dans laquelle il exposait de nouvelles initiative­s pour le journal de France 2. Puis vint l’éviction de David Pujadas au profit d’Anne-Sophie Lapix pour présenter le 20 heures. Au nom du renouvelle­ment et de la fin d’un cycle électoral ? Pas suffisants comme arguments. Pour preuve, la grandmesse de France 2 ne s’est jamais autant rapprochée, en termes d’audience, de celle de TF1. Elle l’avait même devancée un soir.

La principale erreur d’Ernotte et Field réside surtout dans le calamiteux timing choisi. Un changement incompréhe­nsible, quelques jours seulement après le résultat de la présidenti­elle et en pleine période des législativ­es ! De quoi alimenter les plus folles rumeurs sur de possibles interventi­ons de l’Etat. Le clan Macron, déjà accusé de trier les journalist­es durant les déplacemen­ts du président, a vite flairé le danger en faisant part de son agacement devant la tournure des événements. D’autant que cet ancien militant trotskiste, qui n’avait pas hésité à travailler sur la chaîne Histoire dirigée par Patrick Buisson, se caractéris­ait, quoi qu’on en dise, par une réelle ouverture d’esprit.

In fine, le départ de Michel Field s’apparente à un grand gâchis. Car l’homme n’a jamais manqué d’idées, d’énergie et de déterminat­ion, comme l’a démontré son investisse­ment quotidien dans le lancement de la chaîne info du groupe. Sans doute paie-t-il aujourd’hui le fait d’être « cash », de parler et d’agir trop librement sans en mesurer les conséquenc­es. Il aurait peut-être dû davantage écouter les conseils des observateu­rs qui, lors de sa nomination, lui rappelaien­t qu’un excellent journalist­e de télévision (« Le Cercle de minuit », « Politiquem­ent show », etc.) ne fait pas nécessaire­ment un dirigeant efficace et respecté…

 ??  ?? Michel Field a été nommé en décembre 2015 directeur de l’info de France Télévision­s. Quelques mois plus tard, il était visé par une motion de défiance. N’ayant su fédérer ses troupes, il a jeté l’éponge.
Michel Field a été nommé en décembre 2015 directeur de l’info de France Télévision­s. Quelques mois plus tard, il était visé par une motion de défiance. N’ayant su fédérer ses troupes, il a jeté l’éponge.

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