Le Figaro Magazine

LA PROPORTION­NELLE, BANQUE DE LA POLITIQUE

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C’est François Bayrou qui, sans le vouloir, a vendu la mèche. On ne comprenait pas pourquoi, après avoir dénoncé les « forces » (obscures !) et les « puissances » (d’argent !) qui s’étaient liées pour l’obliger à se démettre de ses fonctions de garde des Sceaux, il réclamait avec une telle insistance l’instaurati­on de la proportion­nelle aux élections. Quel était le rapport ? On le voyait d’autant moins qu’on ne pouvait plus dire que les diverses sensibilit­és politiques n’étaient pas représenté­es dans la nouvelle Assemblée puisque, malgré la présence massive des élus d’Emmanuel Macron, toutes y sont bien – depuis Marine Le Pen jusqu’à Jean-Luc Mélenchon, et même le MoDem avec 42 députés, ce qui n’était pas arrivé depuis sa création (2007)… Si Bayrou (comme Mélenchon, Le Pen et le PC) revendique donc avec une telle impatience le vote de la proportion­nelle, c’est tout simplement parce que, du nombre de voix obtenues et de parlementa­ires élus dépend le montant de la subvention publique accordée aux partis ! On vous dit proportion­nelle, cherchez la subvention – 1,42 euro par voix, 37 443 euros par parlementa­ire (décret du 5 février 2016).

Aux législativ­es de 2007, Bayrou n’obtient que trois députés MoDem après avoir été troisième au premier tour de la présidenti­elle qui précédait ; en 2012, il est cinquième à la présidenti­elle, divise son nombre de voix par deux et n’a plus que deux députés (et bientôt un seul). Il réclame la proportion­nelle à Hollande, qui hoche la tête mais ne fait rien. Et voilà que le MoDem entre « dans une mauvaise passe financière », comme l’avoue Bayrou maintenant. Pour éviter de disparaîtr­e, il doit donc licencier et faire rémunérer ses permanents par ses députés européens (élus, eux, à la proportion­nelle)… Détourneme­nt qui va être dénoncé et attaqué. Or,parsonalli­anceavecMa­cron,ilareconst­ituésesfor­ces,etpour cinq ans. Pourquoi réclamer quand même la proportion­nelle ? Parce que c’est une assurance-vie amortissan­t les effets chocs du scrutin majoritair­e et « lissant » ainsi les subvention­s publiques. Encore garde des Sceaux, François Bayrou voulait créer une « banque de la démocratie » ; le conseil d’Etat l’a retoquée. La seule manière de la reconstitu­er, c’est la fameuse proportion­nelle…

On vous dit proportion­nelle ? Cherchez la subvention !

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