EVGENY KISSIN : CHI VA PIANO VA SANO
Evgeny Kissin aime l’esquive, il en est même passé maître. Sans doute parce que ce grand pianiste aime s’échapper et ne veut laisser aucune prise à ceux qui voudraient savoir qui il est ou comment il vit. Quand on est une légende, se protéger est essentiel et l’esquive oblige le public à se concentrer sur l’interprétation.
Alors Evgeny a beau jeu de prétendre être un homme normal : comment le serait-il ? Bébé, il retenait et chantait toutes les mélodies qu’il entendait ; à 2 ans, il commençait le piano ; à 11 ans, il donnait son premier récital ; l’année suivante, il jouait les deux Concertos pour piano de Chopin ; à 17 ans, Herbert von Karajan le mandatait pour jouer le Concerto pour piano n° 1 de Tchaïkovski. « Genya », comme le surnomme son entourage, n’est pourtant pas un stakhanoviste du piano : pas plus d’une cinquantaine de concerts par an. Ce pourquoi sa venue en France est un événement. Ce sera d’abord à la Fondation LouisVuitton (1), où il jouera comme d’habitude la Sonate n° 29 « Hammerklavier » de Beethoven. Et puis surtout, il sera l’invité d’honneur des Rencontres musicales d’Evian (2) : une première pour ce pianiste, que les mélomanes pourront enfin écouter dans la fameuse Grange au Lac, cette salle de concert en bois qu’Antoine Riboud avait offerte à Rostropovitch. Si sur une saison il joue souvent les mêmes oeuvres (cette année : Beethoven et Rachmaninov), à Evian, outre son récital, il clôturera le festival avec le Quatuor Modigliani qui interprétera une de ses compositions.
De nationalité israélienne depuis 2013 mais installé à Prague depuis un an, Evgeny Kissin reste profondément attaché à notre continent dont la culture est la plus proche de son coeur car l’art y est omniprésent : « L’art est une part de ma vie et pour créer, il faut un environnement artistique de qualité qui génère des impressions et des expériences. » Quant à lui parler de la routine des grands concertistes, n’y songez pas : elle lui est étrangère. « Vous devez être mal informé », s’insurge-t-il quand on évoque une éventuelle lassitude à ce sujet. Et d’insister : « J’adore les surprises. » La preuve : il retourne chez Deutsche Grammophon avec un nouveau disque consacré à Beethoven qui sortira fin août.
(1) Le 1er juillet (01.40.69.96.00).
(2) Les 5 et 9 juillet (04.50.71.39.55).