VIN LA THÉORIE BOURGUIGNONNE APPLIQUÉE À L’ESPAGNE
Olivier Rivière, jeune vigneron de Vosne-Romanée, réinvente les cuvées de la Rioja.
Après un BTS viticulture-oenologie en Gironde, Olivier Rivière choisit de mettre en pratique son apprentissage sur un tout autre vignoble : « Je voulais comprendre cette notion de terroir, et pour cela, il me semblait intéressant d’aller en Bourgogne. On le lit dans les livres, mais il est incroyable de constater sur place comment le goût varie selon les sols. » Il rejoint l’équipe de Lalou Bize-Leroy, propriétaire du domaine Leroy à Vosne-Romanée, héritière de la Romanée-Conti et grande prêtresse de la biodynamie bourguignonne. Quatre ans plus tard, le jeune homme décide, sur un coup de tête, de partir pour l’Espagne. Dès 2006, celui que l’on surnomme « Gabaxo » – « Le Français d’Espagne » en Castillan –, guette les opportunités d’achat de raisins provenant de très vieilles vignes de tempranillo, grenache et carignan (entre 50 et 100 ans d’âge) du Rioja et de l’Arlanza – deux dénominations situées au nord de l’Espagne, en altitude – et tente sa chance quand elle se présente. Petit à petit, il achète des parcelles jusqu’à constituer un capital de 7 hectares de vignes qui s’ajoute à celles en location. Sa volonté est de traiter le terroire espagnol à la bourguignonne : « Ici, il n’y a jamais eu d’analyse des sols et de leurs différences. » Il entame un long programme d’étude avec une géologue. Le style Olivier Rivière est à contre-courant de ce qui se fait là-bas, ses cuvées de rouge comme de blanc sont tournées vers l’élégance et non la puissance, fraîches et peu marquées par le chêne : « Je n’utilise pas de bois américain qui masque le vin, et ressemble alors à une femme trop maquillée. » Pour trouver sa voie, le vigneron se plonge dans d’anciens livres de cave où il apprend qu’il y a cent ans, les vins blancs représentaient presque la moitié de la production locale (40 % contre 5 % aujourd’hui) et qu’ils étaient enrichis de xérès. Cette vision lui inspire sa cuvée Mirando al Sur, un blanc 100 % viura vieilli dans d’anciens fûts de xérès, dense et dynamique à la fois, aux notes oxydatives subtiles, un ovni de Rioja blanc : « Contrairement aux idées reçues, nos terroirs sont plus frais que nombre de ceux du sud de la France. » Le néo-Rioja est né. GABRIELLE VIZZAVONA