Le Figaro Magazine

ÉLOGE DE LA PLUIE ESTIVALE

- NICOLAS UNGEMUTH

Les vacanciers qui choisissen­t comme destinatio­n estivale les pays et régions où il pleut (l’Islande, tout le Royaume-Uni avec une mention spéciale pour l’Ecosse, mais aussi l’Irlande ou la Bretagne, voire la Normandie) ont un avantage certain sur les autres : ils se retrouvent entre gens de goût, entre esthètes. Là, personne ne sue car il ne fait pas chaud. Personne ne dégouline d’huile solaire car il n’y a pas de soleil. Personne ne porte ces vêtements ridicules roses ou jaunes pour faire ressortir le bronzage car personne n’est bronzé. Par ailleurs, il n’y a pas de jeunes idiots acnéiques qui écoutent de la techno à fond sur la plage en s’arrosant de champagne car, hormis quelques pêcheurs de palourdes, les plages sont vides et tout le monde boit du cidre. Les autres se sont suicidés. L’autre avantage avec les vacances sous la pluie, c’est qu’il n’y a rien à faire, et d’ailleurs, on ne veut plus rien y faire. Certains lisent toute la nuit car ils savent que rien n’est prévu le lendemain : ils pourront dormir toute la sainte journée. D’autres regardent frénétique­ment des séries déprimante­s comme The Handmaid’s Tale pour être cohérents avec le climat. Les enfants s’ennuient : tant mieux, ils devront développer leur imaginatio­n. Il n’y a plus de barbecue, ni d’apéro, ni de dîner entre amis : on fait des économies en préservant sa ligne, d’autant qu’au bout d’un moment, on ne fait même plus les courses ; on se contente de survivre avec l’épicier du coin et on se finit aux coquillett­es avec une boîte de thon. On ne voit plus personne, quel bonheur… Certains arrêtent même de se laver : l’humidité ambiante leur suffit.

Les vacances sous la pluie, c’est un peu comme être à l’hôpital sans être malade, ou à l’hospice sans être vieux : un rêve…

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