UN PARC D’ATTRACTIONS POUR INGÉNIEURS
En Californie, le siège social de Facebook, situé à Menlo Park, a tous les attraits de la cité idéale pour permettre aux 5 500 salariés de s’épanouir en se sentant chez eux. Pour booster aussi leur productivité…
On pouvait l’imaginer, tel un magnat des nouvelles technologies, savourer sa réussite en solitaire, au dernier étage d’un gratteciel de San Francisco. Rien de tel chez Mark Zuckerberg. Le cinquième homme le plus riche au monde, qui gère un réseau social de 2 milliards de personnes, s’affiche toujours chez Facebook comme un employé parmi d’autres, plus abordable que jamais. Au sein du gigantesque campus de Menlo Park, le jeune homme de 33 ans s’affaire au milieu de ses troupes dans un open space dénué de tout privilège. Le quartier général californien de Facebook concentre plus de 5 500 employés sur les 20 000 que compte l’entreprise. Ici, on vient travailler chaque jour comme dans une seconde maison. Depuis la création du réseau social dans une chambre de l’université d’Harvard en 2004, tout a été fait pour conserver intact l’esprit start-up des origines. Les espaces de travail sont décloisonnés et favorisent la communication entre les équipes. Les citations galvanisantes, comme le « Move fast and break things » (« Avancez vite et cassez les codes »), qui fut longtemps la devise de l’entreprise, s’affichent en tous lieux. Sous l’enchevêtrement de câbles et les tuyauteries apparentes, qui confèrent une impression d’inachevé, les murs blancs sont livrés à la créativité de tous.
Le campus actuel de Facebook, où l’entreprise s’est installée en 2015, a été dessiné par Frank Gehry, qui a imaginé le musée Guggenheim de Bilbao, mais aussi le Walt Disney Concert Hall de Los Angeles. Les immeubles de deux ou trois étages reprennent l’architecture des quartiers de San Francisco et sont répartis autour d’une « Main Street », qui rappelle la grande artère de Disneyland. La référence est assumée. Dans les années 1940, Walt →
→ Disney fut le premier à dessiner à Burbank une ville-entreprise pour ses animateurs, favorisant leur bien-être et leur productivité. Comme dans le parc d’attractions, le même décor, la même ambiance ont été transposés dans les autres bureaux de par le monde, à Paris, Dublin, Singapour ou São Paulo. Pour un ingénieur de la Silicon Valley, être embauché par Facebook à la sortie de l’université est un rêve. « Je n’ai jamais vu telle concentration de gens brillants »,raconte un ancien salarié. La réputation est exemplaire. En plus d’excellents salaires, on ne compte plus les avantages en nature, comme les restaurants gratuits, les salles de sport, les laveries, et bientôt des appartements. Au coeur des open spaces, des distributeurs de fournitures informatiques – claviers, souris… – parent à toutes les pannes. Lorsque la pluie s’abat sur Menlo Park, des parapluies sont disposés en libre-service à la sortie des immeubles. Des navettes avec Wi-Fi ramènent les employés à leur domicile. Facebook se montre, aussi, respectueux de la vie de famille. La plupart des bureaux se vident à 17 heures, à l’heure où les parents partent s’occuper de leurs enfants. Une politique du « mercredi à la maison » permet de travailler un jour par semaine de chez soi. L’entreprise offre quatre mois de congé après une naissance, aussi bien pour les mères que pour les pères. Mark Zuckerberg a choisi de donner l’exemple et s’absentera durant deux mois pour la naissance de sa deuxième fille, August. Dans cette entreprise où les frontières entre vie personnelle et professionnelle se brouillent, on décroche difficilement de son ordinateur le soir et le week-end. Comme dans les parcs d’attractions, ce monde idéal a sa face sombre. ■
À 17 HEURES, LES BUREAUX SE VIDENT, MAIS LE PERSONNEL RESTE CONNECTÉ