Le Figaro Magazine

CHARLES PASI, DE L’HARMONICA AU CHANT

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C’est l’histoire d’un harmonicis­te devenu harmoniste. Entendez : un habile joueur d’harmonica qui a choisi d’exceller dans l’harmonie. Comme beaucoup d’adolescent­s, Charles Pasi faisait le désespoir de ses parents. Et puis un jour, au retour du collège dans son habituel bus numéro 48, à la faveur d’un embouteill­age et d’un chauffeur furieux qui coupe son moteur, Charles descend et se retrouve, hasard ou destin, devant le magasin de piano Hamm à Montparnas­se. Il a justement en tête la rengaine de Bob Dylan Mr. Tambourine Man.

Il entre dans le magasin et demande au vendeur l’harmonica de Dylan. Il y consacre tout son argent de poche – 100 francs – et ressort, nanti de l’instrument et de l’adresse d’un cours de quartier, où il apprendra à jouer tous les samedis matin. Médiocre élève au collège, le voici premier en classe d’harmonica, instrument « marginal et antiacadém­ique » qui lui offre une belle estime de lui-même, mais encore absorbe ses humeurs qu’il avait déjà fortes. Il a désormais aussi l’impression d’avancer « plus vite que les autres ». Il commence à jouer ici et là, à chanter aussi, avec une voix qui s’accorde à l’instrument. Début de l’aventure.

Ce mois-ci, Charles Pasi sort son quatrième album Bricks chez Blue Note. On écoute et d’emblée, on est conquis. Délicat, intimiste – même si les paroles sont en anglais –, Pasi déploie son univers qu’on pourrait qualifier de nostalgiqu­e, bien qu’il s’en défende. « Ma musique est le testament d’une certaine gaieté », insiste-t-il pourtant, soulignant l’esthétisme d’une chanson qu’il revendique comme une marque d’attention pour le public. « Comme dans l’amour il faut se faire plaisir, faire plaisir à l’autre et se faire plaisir ensemble. »

Avec le public encore, il partage son exploratio­n personnell­e, ses tâtonnemen­ts dans l’expression de ses sentiments et de ce qu’il veut dire. En concert*, il n’hésite pas à parler entre les morceaux. Il aime expliquer, s’expliquer, il ne peut « pas s’en empêcher ». Que ceux qui regrettent de ne pas l’entendre chanter en français se consolent. Il leur suffira d’aller l’écouter à l’étranger. C’est une autre caractéris­tique du personnage : il aime surprendre, et être là où on ne l’attend pas. Lui-même d’ailleurs hésite sur ses désirs profonds : écrire une chanson culte qui entrera dans l’inconscien­t collectif, ou se cantonner, « sans se diluer » à un public plus restreint, mais qui saura toujours l’apprécier pour ce qu’il est, et tel qu’il est. *Prochaines dates : le 30 septembre à Coupvray, le 26 octobre à Lyon, le 27 à Thonon-les-Bains, le 5 décembre à Paris (Le Trianon).

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