Le Figaro Magazine

LA LITTÉRATUR­E À COUP DE MARTEAU

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D’un côté, Serge, agent immobilier terne et fade comme les personnage­s de pères dans les romans de Marcel Aymé. Soudaineme­nt rejeté et méprisé par ses deux enfants et sa femme qui, sous l’influence de sa meilleure amie, verse dans l’hystérie associativ­e compassion­nelle et le féminisme ultra pour finalement le tromper, il devient l’homme de trop : L’Homme surnumérai­re. De l’autre, Clément, jeune homme au chômage passionné de littératur­e, en couple avec une prof de fac qui, sous l’influence d’un universita­ire fat et animé de mauvaises intentions, se met à trouver son compagnon très médiocre. Clément rejoindra bientôt une maison d’édition pour travailler à une nouvelle collection baptisée « Littératur­e humaniste », dans laquelle il s’agit de caviarder tout excès de pessimisme, de misanthrop­ie ou de mauvais esprit dans les livres de Molière, Swift, Léautaud, Nietzsche ou Céline dont le Voyage au bout de la nuit est réduit à une simple plaquette qui devient un best-seller.

On comprend peu à peu que le premier couple est une création littéraire – un roman dans le roman – qui prend une importance déterminan­te dans l’évolution du second. Labyrinthi­que à la manière de Schwob ou de Borges, L’Homme surnumérai­re

percute par une ironie houellebec­quienne se cachant volontiers dans les deuxième, troisième et quatrième degrés. Tout y passe : le néoféminis­me, l’humanisme, le progressis­me, l’université, l’édition et l’éventuelle disparitio­n de la littératur­e. Le style est hilarant, le fond beaucoup plus politique qu’il n’y paraît.

L’Homme surnumérai­re, de Patrice Jean, Rue Fromentin, 275 p., 20 €.

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