Le Figaro Magazine

L’apostrophe de Jean-Christophe Buisson/Ecrans

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CHÈRE JULIETTE BINOCHE, que diable êtesvous allée faire dans cette galère baptisée

Un beau soleil intérieur (en salles le 27 septembre) ? Un film de Claire Denis, à la rigueur, pourquoi pas ? Mais coscénaris­é par Christine Angot ! Mettre votre talent immense au service d’une histoire sans queue (façon de parler) ni tête ! Où l’on vous voit prendre banalement le métro, le taxi et le train, dîner banalement au restaurant, boire banalement des cafés, acheter banalement du cabillaud, vivre banalement des histoires sans lendemain avec des hommes (donc des salauds : lâches, pervers ou indécis, c’est ainsi chez Angot) et surtout, surtout, vous retrouver dans un film où l’on peut entendre ceci :

« Tu t’es branlée ce week-end ? - Non. Et toi ? » (Le style Angot dans toute sa splendeur délicate.)

« Je n’ai plus de désir dans ma vie, mais je peux en avoir ailleurs. » (Où ça ? sur Mars ? dans l’audelà ? chez tante Suzette ?)

« Tu saurais quoi dire ?

- Oui, mais je me sentirais trop nu. J’aurais trop peur de me mettre à la merci de… » (De quoi, on ne le saura jamais.)

« Elle est belle, ta chambre, Isabelle. » (Sérieuseme­nt, on est payé pour trouver ce genre de réplique ?)

« Elle est sympa, ta parka, elle te va bien. » (Même remarque.)

« Ce paysage, c’est rien et ça rentre en toi. » (Phrase définitive prononcée par Charles Pépin, il est vrai philosophe.) On en passe et des pires.

Au milieu de ce fatras, donc, les affres sentimenta­les de Juliette Binoche, filmée par une caméra amoureuse et qui, de ce scénario et de ces dialogues échappés d’une explosion nucléaire, parvient, comme Nicolas Duvauchell­e et Xavier Beauvois, à faire quelque chose de regardable : un film comique. Ce n’était sans doute pas le souhait de Mlle Denis mais c’est ainsi : le ridicule prête souvent à rire. Soyons honnêtes. Les cinq dernières minutes du film où Gérard Depardieu (mi-marabout, mi-psychanaly­ste) soliloque sur l’avenir amoureux de Juliette Binoche valent à elles seules le déplacemen­t. Elles sont un morceau d’anthologie.

Post-apostrophu­m : apparition également remarquabl­e de Bertrand Burgalat, qui porte joliment le béret bordeaux.

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