MACRON LANCE UNE GRANDE RÉFORME
Le gouvernement vient de présenter sa loi sur le logement et, la semaine prochaine, les Français découvriront avec le projet de loi de finances pour 2018 la nouvelle fiscalité de la pierre et de l’épargne. Voici tout ce qui va changer.
Sous le quinquennat de François Hollande, trois lois sur l’immobilier se sont succédé. A peine élu, Emmanuel Macron en lance une autre et va s’atteler à changer la fiscalité de la pierre.
Une révolution copernicienne ? Peut-être pas. Mais un changement de paradigme, certainement. Fini les généreuses aides de l’Etat pour acquérir des logements toujours plus chers ou acquitter des loyers structurellement à la hausse. Pour faire baisser le coût du logement, Emmanuel Macron veut diminuer les subventions en tout genre et créer un « choc de l’offre », autrement dit multiplier les mesures destinées à faciliter la construction en masse de programmes immobiliers. Une stratégie dont les principales mesures sont au menu du Conseil des ministres le 22 septembre. Mais la polémique née cet été lors de l’annonce de la baisse de 5 € des aides personnelles au logement (APL) en octobre montre que cette réforme ne passera pas forcément comme une lettre à la poste. Et d’autres mesures pourraient mettre le feu aux poudres.
LE DISPOSITIF PINEL ET LE PTZ RECENTRÉS
Le gouvernement en est persuadé : le dispositif d’investissement locatif Pinel et le prêt à taux zéro (PTZ) qui aide les primo-accédants plutôt modestes à acquérir un logement ont un coût excessif par rapport à leur effet positif sur la construction d’appartements et de maisons neufs. « Nous voulons les réorienter et les recentrer pour les rendre plus efficaces », expliquait récemment au Figaro Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires. En fait, l’exécutif semble pencher pour les réserver aux zones tendues. Ce que l’on ne sait pas. Jusqu’ici mobilisable partout sur le territoire, le PTZ ne sera-t-il supprimé qu’en zone C (zone rurale) ou aussi en zone B2 (villes moyennes) voire B1 (grandes villes) ? De même, au-delà de la suppression du Pinel qui semble acquise en zone B2, l’exécutif va-t-il réduire les avantages fiscaux en zone A et B1 ?
L’ISF DEVIENT L’IFI
Oublié, l’impôt sur la fortune (ISF). Il va être remplacé dès 2018 par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Derrière ce changement sémantique se cache le recentrage de cet impôt sur l’immobilier. Les actions, titres ou parts d’entreprise n’entrent plus dans son assiette. Désormais, seuls les biens immobiliers seront taxés. Avec une exception : l’immobilier affecté à l’exploitation de l’entreprise du contribuable. Pour le reste, pas de grand changement à attendre. Comme avec l’ISF, les contribuables seront assujettis à l’IFI s’ils ont un patrimoine d’au moins 1,3 million d’euros. La décote de 30 % pour calculer la valeur de la résidence principale est maintenue. Et la somme de l’IFI et de l’impôt sur le revenu ne pourra pas excéder 75 % des revenus du contribuable.
Ce que l’on ne sait pas. Pour l’instant, l’investissement locatif entre dans l’assiette de l’IFI. Au cours de la discussion parlementaire sur le budget, les achats de logements effectués avec le dispositif Pinel seront-ils sortis du champ de l’IFI ?
LES APL AU RÉGIME SEC
La baisse des APL s’effectuera en deux temps. Dès octobre, elles seront rognées de 5 € uniformément dans le parc privé et le social. En revanche, la réduction beaucoup plus significative (jusqu’à 50 ou 60 €) promise pour 2018 ne concernera que le parc HLM. Elle sera modulée suivant différents critères (taille du logement, situation géographique, revenus du locataire…) qui ne sont pas précisés pour l’instant.
Ce que l’on ne sait pas. Le gouvernement a promis des compensations aux organismes HLM qui vont avoir un manque à gagner de 1,5 à 2 milliards d’euros. Mais il n’a pas encore dit si toutes ces pistes (vente de HLM aux locataires, allongement des durées de prêt pour les organismes de logement social, gel du taux de rémunération à 0,75 % du Livret A…) seront suivies. STATU QUO SUR L’ENCADREMENT DES LOYERS
Emmanuel Macron l’a rappelé en marge d’un déplacement à Toulouse, le 11 septembre : il n’est pas favorable à l’encadrement des loyers. « Ce n’est pas une bonne méthode pour créer un choc d’offre. Vous n’allez pas convaincre des gens d’aller construire massivement des logements si vous bloquez les loyers », a-t-il déclaré. Pour autant, il ne va pas remettre en question l’encadrement des loyers là où il est en place (Paris et Lille). En revanche, il ne compte pas l’étendre à d’autres agglomérations.
Ce que l’on ne sait pas. Le président de la République fera-t-il évaluer ce dispositif, comme il l’avait promis pendant la campagne présidentielle ?
LA FISCALITÉ SUR LA VENTE DES TERRAINS REVUE
Pour l’instant, la fiscalité n’incite pas les propriétaires de terrains à les vendre. Plus ils les gardent longtemps, moins ils payent d’impôt sur les plus-values. Pour libérer plus de foncier constructible, le gouvernement voudrait enclencher la démarche inverse. Taxer d’autant moins les propriétaires de foncier qu’ils les cèdent rapidement. Une réforme qu’il réserve aux zones tendues.
Ce que l’on ne sait pas. Comment le gouvernement va-t-il faire pour échapper aux foudres du Conseil constitutionnel sur ce sujet ? En 2011, François Fillon, alors Premier ministre, qui avait avancé la même proposition s’était fait retoquer par les Sages de la Rue de Montpensier. L’EXONÉRATION PROGRESSIVE DE LA TAXE D’HABITATION
Emmanuel Macron l’avait promis pendant la campagne présidentielle : d’ici à trois ans, 80 % des ménages qui paient aujourd’hui la taxe d’habitation en seront
Des mesures visant à créer un « choc de l’offre » de logements
exonérés. Initialement, la ristourne devait concerner les foyers déclarant un revenu inférieur à 20 000 € par part fiscale. Finalement, le plafond a été rehaussé à 27 000 € pour un célibataire et 43 000 € pour un couple. Sans compter 6 000 € en plus par demi-part fiscale supplémentaire. Comme prévu, cette exonération se mettra en place progressivement. En 2018, la taxe d’habitation des ménages concernés par l’exonération baissera d’un tiers. Encore d’un autre tiers en 2019. Et elle disparaîtra en 2020.
Ce que l’on ne sait pas. Le gouvernement aura-t-il le courage politique de réformer les valeurs locatives, inchangées depuis les années 1970, qui constituent la base à partir de laquelle on calcule la taxe d’habitation ?
LE CHOC DE L’OFFRE ATTENDU
Pour bâtir beaucoup plus de logements, le gouvernement veut actionner plusieurs leviers. D’abord, concernant les recours contre les permis de construire qui bloquent la mise en chantier de « 40 000 logements », affirme Jacques Mézard, il compte durcir les sanctions contre les auteurs de recours abusifs et accélérer les procédures judiciaires. Par ailleurs, il s’engage à ce qu’il n’y ait pas de nouvelles normes, sauf en matière de sécurité, durant ce quinquennat. Une pause utile car cette inflation réglementaire contribue à l’augmentation du prix des logements. Par ailleurs, il planche sur la dématérialisation du permis de construire qui permettra l’accélération de son instruction. Enfin, il compte multiplier la vente de terrains publics à petits prix pour y développer des programmes immobiliers.
Ce que l’on ne sait pas. Pour dynamiser la construction de logements, beaucoup de professionnels recommandent que les permis de construire ne soient plus délivrés par les maires, toujours frileux face à l’implantation de nouveaux logements, mais par les présidents d’intercommunalités. Pourquoi le gouvernement a-t-il renoncé à une telle réforme ?