STALINE, FILS NATUREL DE LÉNINE
★★ STALINE, d’Oleg Khlevniuk, préface de Nicolas Werth, Belin, 615 p., 25 €.
Staline ne fut pas pour rien le disciple de Lénine : il mit le plus grand pragmatisme au service d’une rigidité idéologique comparable à celle de son maître. S’appuyant sur des sources nouvelles
– éléments de correspondance du dictateur rouge, documents originaux et non de seconde main comme trop souvent –, l’historien russe Oleg Khlevniuk retrace les méandres de son action. Par exemple sa manière d’opposer les hauts dignitaires du régime les uns aux autres afin de consolider son pouvoir. S’il dénonce une tendance actuelle plus russe qu’occidentale à la réhabilitation de Staline, Khlevniuk succombe par moments à une forme de nostalgie, en particulier dans l’étude des années 1930.
A l’en croire, la dictature totalitaire se serait imposée à cette époque par le viol d’une nature supposée polycentriste, sinon démocratique, du bolchevisme : direction collégiale et respect d’une certaine « légalité socialiste ». Or, à trop suivre cette logique, on finirait par considérer Staline comme un pervertisseur du « vrai communisme » alors qu’il a au contraire assuré la continuité du système léniniste. Sans sa poigne monstrueuse, en effet, l’URSS se serait probablement effondrée à court terme.
RÉMI KAUFFER