Le Figaro Magazine

L’éditorial de Guillaume Roquette

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Coucou le revoilà ! Après quelques mois de diète médiatique, François Hollande vient de se rappeler au bon souvenir des Français. Avant de partir à Séoul donner une conférence au Forum mondial du savoir (espérons que ce n’était pas pour y vanter les réformes de Najat Vallaud-Belkacem), l’homme qui n’aimait pas les riches a qualifié de « brutale » la politique de son successeur. Convenons que le qualificat­if est un peu croquignol­et, pour reprendre un mot à la mode cette semaine : on n’avait pas le souvenir d’un François Hollande si sensible durant son quinquenna­t, quand il matraquait fiscalemen­t les classes moyennes ou faisait matraquer (au sens propre cette fois) les familles qui manifestai­ent contre le Mariage pour tous.

Mais revenons aux états d’âme présents de l’ancien président : il critique sans ménagement la suppressio­n des emplois aidés et, plus largement, la politique sociale et fiscale de son successeur qu’il juge inéquitabl­e. L’attaque ne brille pas par son originalit­é, mais elle est surtout à côté de la plaque. Car s’il y a une brutalité dans la France de 2017, elle est moins sociale ou fiscale qu’économique. Ce qui est brutal, et se produit chaque jour sous nos yeux, c’est la fameuse destructio­n créatrice théorisée par l’économiste Schumpeter, ce « nouveau qui naît à côté de l’ancien et lui fait concurrenc­e jusqu’à le tuer ». Ce sont les usines qui ferment, les métiers qui disparaiss­ent, les pans entiers de notre économie sapés par l’ubérisatio­n du monde. C’est cette brutalité qu’Emmanuel Macron s’efforce de contrer en faisant émerger une France plus compétitiv­e, plus réactive et plus favorable aux investisse­urs. Laissons-lui sa chance.

On peut toujours regretter le temps où l’on promenait la tête des privilégié­s au bout d’une pique, mais c’est un peu anachroniq­ue au XXIe siècle. D’autant que, même si une poignée de super-riches va profiter du reformatag­e de l’ISF, les moyen-riches continuent à être très lourdement taxés en France. On ne rappellera jamais assez que 40 % de l’impôt sur le revenu est payé par les 2 % de foyers les plus aisés, tandis que plus de la moitié des ménages – jamais ils n’ont été aussi nombreux – ne débourse pas un centime. L’injustice n’est pas toujours là où on le croit. Nonobstant les cris d’orfraie de François Hollande, le libéralism­e insufflé par le nouveau pouvoir est des plus tempérés.

Il ne remet en cause ni les 35 heures, ni le RSA, ni le smic ni aucun autre totem de notre modèle social. En réalité, le seul vrai danger du macronisme est d’ériger la liberté individuel­le en norme de référence non seulement de l’économie (ce qui est souhaitabl­e), mais de la société tout entière, au détriment des valeurs comme la famille, la culture ou les frontières, tout ce patrimoine commun qui coalise une nation. Et sur ces registres, Emmanuel Macron n’a pas rassuré les Français dimanche dernier.

LES MOYEN-RICHES CONTINUERO­NT À ÊTRE LOURDEMENT TAXÉS EN FRANCE

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