LES “ANCIENS” RETROUVENT LE CHÂTEAU DE LEUR ENFANCE
→ visiteurs ont pu pousser les grilles du château d’Esquelbecq pour en visiter le jardin… et découvrir les principes de la permaculture, chers à Johan. « On aimerait retrouver les gestes d’autrefois, réutiliser par exemple la fiente des poules de notre poulailler comme engrais pour nos vieux arbres fruitiers. Ma génération a totalement perdu le lien avec la nature, les réflexes de réutilisation des choses : j’aimerais que l’on puisse redécouvrir tout cela en venant à Esquelbecq », glisse-t-il. C’est avec cette idée derrière la tête qu’à l’occasion des dernières Journées européennes du patrimoine, Johan a eu l’idée d’ouvrir un « repair café » dans les anciennes écuries du château. Chacun pouvait venir y partager un moment de convivialité tandis que Midou (le régisseur du château) et Sam (le jardinier) s’échinaient à réparer le petit matériel cassé que les uns et les autres avaient apporté. Dans les autres parties des communs, les visiteurs pouvaient aller à la rencontre d’artisans locaux qui présentaient leurs savoir-faire. C’est cette sympathique ambiance, ce dynamisme, qui ont séduit Philippe Forestier, 40 ans, peintre décorateur venu de Belgique où il réside. Ancien compagnon du Tour de France, il a proposé gracieusement ses services à Johan pour redécorer le salon de marbre que les visiteurs devraient pouvoir admirer au printemps prochain, une fois sa restauration achevée. Philippe Forestier y effectue un travail remarquable, dans les règles de l’art, maniant – avec une dextérité que nous avons pu observer – les techniques de faux bois ou de faux marbre. Ses seules motivations ? La passion du travail bien fait et l’amour du patrimoine.
Pas à pas, les projets de Johan prennent forme. L’ouverture d’une maison d’hôtes est prévue pour 2018, peut-être aussi celle d’un restaurant. Il faudra également développer la location de salles et des jardins, restaurer la serre (grâce au prix Villandry), créer un musée dédié au jardin, ouvrir les salons et les cuisines aux visiteurs, organiser comme l’été dernier
les visites aux flambeaux du château… Sans oublier la fête des jardins que Johan organisera les 4, 5 et 6 mai à Esquelbecq et pour laquelle il espère trouver des sponsors acceptant de parrainer les créations de paysagistes intéressés par l’art flamand des jardins. Les 2 et 3 juin, rebelote avec l’opération « Rendez-vous aux jardins », qui sera l’occasion de lancer l’exposition annuelle que Johan, grand amateur d’arts, souhaite organiser de façon régulière. Celle de cette année, intitulée « Mémoires », présentait le travail remarquable de deux artistes, Stéphane Fedorowsky et Olivier Lasson. Dans les carrés du jardin, on peut encore admirer une série de portraits d’hommes et de femmes au visage buriné par les ans, imprimés sur de grands cubes blancs posés sur l’herbe. Ce sont les vieux d’Esquelbecq. Avec leurs mots, ils témoignent de leur attachement au château. On y lit leur douleur d’avoir vu ses grilles se refermer pendant trente-trois ans sur leurs souvenirs d’enfance, comme sur un jardin interdit. Mais le passé reprend vie : ils racontent leurs fous rires d’enfant durant les parties de cache-cache organisées dans les jardins, les promenades interdites dans les tours, la trappe que l’on soulevait en cachette pour apercevoir les oubliettes (dans le fond, il y avait des piques, dit-on…), la guerre et l’occupation du château, devenu le siège de la Kommandantur, le patronage que l’abbé Loywick organisait avec la bénédiction de la châtelaine, la joie de voir le grand-père de Johan ouvrir le coffre de sa voiture, quand il arrivait de Paris le samedi matin, distribuant des plaquettes de chocolat à tous les enfants (M. Morael était le directeur des chocolats Vinay). Sans oublier les mariages et les grands dîners au château, qui faisaient briller les yeux des gamins : on regardait les invités arriver, en gloussant derrière la baraque à frites, et chacun avait un peu le sentiment de participer à la fête.
Un château, une famille, un joli bourg du nord de la France… Esquelbecq, c’était un peu tout cela à la fois. Grâce à Johan et à ses parents, ce n’est pas fini. N’en déplaise au beffroi, cruel témoin du temps qui passe sous le bas ciel de Flandre ! « Un jour, il faudra reconstruire le donjon, dit Johan. Mais ce sera la cerise sur le gâteau. » ■
Château d’Esquelbecq, place Bergerot, 59470 Esquelbecq. (www.chateaudesquelbecq.com, https://fr-fr.facebook.com/ chateaudes quelbecq).