Le Figaro Magazine

TRAGÉDIE MUSICALE

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Woodstock revient. On en a fait une comédie musicale *. Dans la salle, cela doit sentir le patchouli. Les spectatric­es se seront décolorées au henné. Quand même, il s’agissait du plus grand festival pop de tous les temps. On ne pensait pas revoir ça. Trois jours de paix, de musique et d’amour, disait le slogan de 1969. Là-bas, la guerre du Vietnam battait son plein. Les naïfs révoltés de l’Amérique fumaient de la marijuana et se roulaient dans la boue. Il a plu, à Woodstock, et les organisate­urs ont été dépassés par l’événement. Les hippies se prenaient pour des rebelles, ils étaient les produits dérivés de la société de consommati­on. Le futur passe la marche arrière. Il va donc falloir se laisser pousser les cheveux jusqu’aux épaules, porter des sabots suédois et des tuniques indiennes, écouter Grateful Dead et Jefferson Airplane. Jimi Hendrix et Janis Joplin sont morts d’abus divers. Joe Cocker ne joue plus de guitare dans le vide. On vend des tee-shirts frappés d’une colombe. Les parents poussaient de gros soupirs et signaient les chèques. Quelle musique de sauvages ! Jeunesse se passera. Ces enfants gâtés épelaient le mot « fuck » en cadence, écartaient les doigts pour former un V. Ils protestaie­nt contre l’armée et enfilaient des treillis kaki. Aujourd’hui, ils sont tous devenus notaires. Vieille histoire. Balzac et Flaubert l’avaient déjà racontée. Comme ils semblent lointains, avec leurs pantalons à pattes d’éléphant ! On dirait qu’ils appartienn­ent à un film en noir et blanc. Tout ce folklore remonte à la plus haute antiquité. Ils chantaient

« Peace and love ». L’époque leur répond

« Allah akbar ! » Nous voilà bien.

* Lire aussi page 104

Le futur passe la marche arrière

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