Le Figaro Magazine

MODE LE LUXE D’UNE AUDACE TAILLÉE SUR MESURE

Dans le monde très fermé du soulier de luxe, les premiers pas de l’Atelier du Tranchet tracent la voie d’un succès assuré. Découverte.

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On serait tenté de ne rien dire, de garder pour soi cette adresse encore confidenti­elle. Taire l’existence de l’Atelier du Tranchet serait d’autant plus facile que cette discrète et jeune officine échappe aux circuits balisés qui guident habituelle­ment les pas de l’amateur de souliers d’exception. Pas de vitrine dans le Paris cachemiré. Le rare a parfois des pudeurs de sainte-nitouche qui sait susciter désir et convoitise. Pas de patronyme pour nom d’entreprise, le trio à la tête de la société a privilégié la symbolique d’un outil indispensa­ble au travail du cuir : le tranchet. Cette lame d’acier est l’âme d’un métier que Christophe Corthay et Christophe Algans, maîtres bottiers, tous deux compasouli­ers gnons du devoir passés par des maisons de renom, ont eu envie d’exercer autrement. Librement, plus follement. Quand ils ont pris leur saint-crépin pour filer dans le nord du XIXe arrondisse­ment, un quartier de la capitale en pleine mutation, leur envie était de retrouver l’exaltation de la création et un rapport plus intime avec le client accueilli comme dans le loft d’un particulie­r.

« Ce qui nous distingue n’est pas un style mais une façon d’être différente, explique Christophe Corthay, inventeur d’une forme de pulpleathe­r. Les clients qui frappent à notre porte savent que l’on peut bousculer les codes. Aujourd’hui, qui se paye encore le luxe d’oser ? » Vive les pas de côté. On piétine les interdits. On botte en touche les convention­s à la mesure de l’audace de chacun. Les collection­s, des baskets aux derbys, l’originalit­é de certains modèles dont les noms sont un appel du pied à HR Giger ou à Dark Vador, sont l’expression amusée d’un savoir-faire séculaire sérieuseme­nt maîtrisé. Les Christophe sont des pointures. Entre leurs mains naissent des aux formes confortabl­es, au classicism­e élégamment chahuté. Six à neuf mois sont nécessaire­s pour réaliser une paire. La première rencontre avec le futur propriétai­re se fait plutôt à l’atelier pour favoriser les échanges.

« Il n’y a pas d’intermédia­ire, d’obséquiosi­té, d’ouvriers qui s’exécutent tête baissée, précise Christophe Algans.

Chez nous, le client trouve une vérité. » Prises de mesures, sélection des plus belles peausserie­s (France, Italie, Louisiane, Madagascar), patronage, montage, patine… L’excellence est convoquée à chaque étape jusque dans le moindre détail devenu une signature comme ces dessous de talons en fer à cheval. « Nous ne réaliseron­s qu’une quarantain­e de paires par an, confie Philippe de Paillette, qui après une carrière dans le luxe a changé de vie pour

se consacrer à sa passion pour le beau soulier. Chaque paire réclame au minimum 40 heures de travail, voire 80 pour certaines. C’est du très haut de gamme ! » Une culture de l’exception qui se traduit par la volonté d’offrir la version miniature de quelques modèles. Et parce que l’imaginatio­n et le talent s’expriment ici sans limites, l’artisan se fait artiste en exposant une collection de pièces uniques baptisées les Sakura. De l’humour, du rare, de l’audace… Il ne faudrait rien dire des merveilles signées par l’Atelier du Tranchet. Vous connaissez ? Répondez… et surtout mentez ! LAURENCE HALOCHE A partir de 4 500 € la paire de souliers sur mesure, 128, bd Macdonald, Paris XIXe (01.42.45.86.53 ; info@tranchet.paris).

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Objets d’art, les Sakura sont des pièces uniques : ici, poisson en cuir (1 800 €).

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