LE BAL DES FIASCOS

★★★ TOUS CES CHEMINS QUE NOUS N’AVONS PAS PRIS, de William Boyd, Seuil, 292 p., 21 €. Traduit de l’anglais par Isabelle Perrin.

assionnez-vous pour les fiascos et les faux départs, vous tiendrez toujours une bonne histoire à raconter, répondait Tchekhov aux cadets qui brûlaient de connaître le secret de ses merveilleuses nouvelles. William Boyd avait-il ce conseil en tête durant la rédaction des savoureuses tranches de vie réunies ici en un volume ? Un écrivain démoli par la critique, un professionnel du baiser volé, une

« célibattante » incapable d’engagement stable comme l’héroïne des « Rêves de Bethany Mellmoth » (les 100 pages les plus hilarantes du volume) qui enchaîne improbables petits amis et jobs minables avec un optimisme désopilant, tous ses personnages se retrouvent sur la certitude quasi existentielle d’avoir pris le chemin qu’il ne faut surtout pas prendre quand on a pour but de faire quelque chose de sa vie. Sous la plume malicieuse de Boyd, cette prise de conscience entraîne le genre de péripéties qu’on adore au cinéma mais qu’on redoute pour soi-même.

D’où l’aphorisme d’Alec Dunbar, un acteur raté, dont l’existence monotone bascule en vingt-quatre heures dans l’ambiance terrifiante d’un thriller dystopique :

« La vraie vie n’est jamais aussi simple qu’un film, jamais. » L’étonnant avec l’auteur d’Un Anglais sous les tropiques, c’est qu’il peut nous faire gober ce qu’il veut, nous entraîner où il veut, nous seulement on le suit, mais on en redemande. Un privilège de jolie fille.

Et de conteur en or.