UN MONSTRE HUMAIN, TROP HUMAIN
★★★ HITLER, de Peter Longerich, Editions Héloïse d’Ormesson, 1 226 p., 45 €.
Diverses manières existent d’appréhender le personnage de Hitler et son rôle historique. Les marxistes en ont fait une sorte de marionnette du capitalisme, simple exécutant d’un système qui le dépassait. D’autres voient en lui le contraire : un homme doué d’un tel charisme qu’il aurait fait basculer l’Allemagne tout entière pour lui imposer une dictature solitaire. Directeur du centre de recherche sur l’Holocauste et l’histoire du XXe siècle à l’université de Londres, biographe de Himmler et Goebbels, Peter Longerich emprunte une voie médiane. Il veut comprendre pourquoi et comment cet homme sorti du néant ou presque a pu acquérir une pareille dimension, quels ressorts psychologiques étaient les siens, évaluer son adaptabilité politique au service d’une idéologie antisémite, son talent à mettre à profit les êtres et les événements. Fort d’une connaissance parfois écrasante de son sujet, Longerich dément nombre d’idées reçues : Hitler n’a jamais complètement fédéré le peuple allemand autour de lui par exemple. Il explore des domaines peu ou mal abordés comme l’opposition des églises catholiques et protestantes aux projets totalitaires du Führer. Un dictateur rendu, justement, à sa totalité personnelle, analysable comme tous les êtres humains, fussent-ils, comme lui, les plus monstrueux.