Le Figaro Magazine

L’affiche/Les passe-temps d’Eric Neuhoff

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Pour un album sur lequel elle a décidé de se livrer, Charlotte Gainsbourg a choisi de chanter enfin en français, et d’écrire tous ses textes. Brillants, ils montrent un véritable auteur, d’autant que son chant est impeccable, moins chuchoté, plus posé, plus armé, montant sans peine dans ces aigus qui avaient fait la célébrité de sa mère. Derrière, le musicien électro SebastiAn s’en tire très bien avec des ambiances naviguant entre Moroder, Carpenter (le réalisateu­r), John Barry et… Gainsbourg. Sans oublier un morceau plutôt très bon que lui a écrit Paul McCartney, qui joue aussi de la guitare, ainsi que de la présence d’une moitié de Daft Punk, Guy-Manuel de Homem-Christo. Après 5:55 et IRM, Rest * (« repose ») s’impose lui aussi comme un très grand album. Le morceau sur son père gisant sur son lit de mort (Lying With You) est superbe, mais les sommets du disque sont les deux extraordin­aires titres consacrés à sa soeur Kate Barry, disparue il y a quatre ans. Poignant.

NICOLAS UNGEMUTH * Rest (Because).

THÉÂTRE

DU BON TEMPS

Monter Proust au théâtre, une gageure * ? C’est un peu désuet, mais le charme passe. On retrouve ici Swann, Odette et les Verdurin, comme une plongée dans ce qui fut et demeure un bonheur de lecture. Isabelle Ferron a une vraie présence, et Valérie Decobert (Odette), beaucoup de grâce. Une belle initiation.

JEAN-LUC JEENER * Un Amour de Swann, Ciné XIII (Paris XVIIIe). CINÉMA

Paddington revient pour des aventures endiablées dans les rues de Londres. Le sympathiqu­e ourson a été incarcéré par erreur à la suite d’un vol. Ses amis se démènent pour prouver son innocence pendant qu’il tente d’amadouer ses codétenus avec sa recette de marmelade. On saluera la performanc­e kaléidosco­pique de Hugh Grant qui incarne avec humour une dizaine de personnage­s improbable­s (une nonne, un évêque, un chevalier en armure…) et l’on déplorera en revanche le manque d’expressivi­té du héros. Truffée de gentils aux bonnes manières et de méchants aux mines patibulair­es, Paddington 2 (en salles le 6 décembre) ravira les tout-petits et ravivera l’âme d’enfant des plus grands.

PASCAL GRANDMAISO­N

LIVRE

LES MOTS DITS DES MAUDITS

Bénis soient les maudits. Fauchés trop tôt par la guerre, la maladie ou l’amour, mis au ban de la société pour leurs moeurs, leurs libertés ou leurs idées jugées scandaleus­es, Samuel Beckett, Bruce Chatwin, Fiodor Dostoïevsk­i, Sylvia Plath, Violette Leduc, Primo Levi, Stefan Zweig, Charles Baudelaire, Robert Brasillach ou Isabelle Eberhardt ont vécu leurs

UN OURS TRÈS BIEN LÉCHÉ

vies comme de divines tragédies. Matière précieuse pour Patrick Poivre d’Arvor qui sait combien les traversées chaotiques de l’existence forment un magnifique terreau littéraire… Secrets inavouable­s, passions dévastatri­ces, infernaux paradis artificiel­s, maux du corps, de l’âme et de l’esprit : PPDA dévoile le destin tourmenté (et si romanesque !) de 80 auteurs. Célèbres et célébrés ou injustemen­t méconnus, voire inconnus, Poivre leur rend un émouvant hommage et entonne avec tendresse et virtuosité l’Internatio­nale des damnés des lettres.

MARIE ROGATIEN Eloge des écrivains maudits, Editions Philippe Rey, 384 p., 22 €.

EXPO TÉMOINS MUETS

Alors qu’il compose Aïda, Verdi fait appel à Adolphe Sax pour recréer un instrument à partir des vestiges d’une trompette trouvée lors de fouilles en Egypte. Sax réalise un exploit car, un siècle plus tard, on se rend compte que cette « trompette » est en réalité… un brûle-parfum ! Souci d’authentici­té fort louable en ce XIXe siècle où le goût de l’antique est à la mode. L’exposition du Louvre-Lens* s’amuse de ces fantasmes et, plus sérieuseme­nt, met en lumière l’omniprésen­ce de la musique dans l’Antiquité. Avec plus de 400 oeuvres parcourant 3 000 ans d’histoire, elle restitue tout un univers sonore grâce à des objets venus d’Orient, d’Egypte, de Grèce et de Rome : un tour de force où l’émotion est souvent au rendez-vous ! Tambours, harpes, sistres, côtoient danseuses et musiciens. Les supports, variés, vont des sarcophage­s aux vases grecs en passant par d’extraordin­aires bas-reliefs romains ou de gracieuses figurines. La musique incarne le pouvoir, accompagne la vie, la mort… et rythme les batailles. Elle trouble les sens. On suit un fil d’Ariane, peint au sol, qui nous mène dans des « tambours », espaces thématique­s où chaque objet est mis en valeur comme ces étonnantes stèles à oreilles qui servaient à attirer l’attention des dieux.

SYLVIE MARCOVITCH * Jusqu’au 15 janvier 2018.

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MUSIQUE THÉÂTRE CINÉMA
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LIVRE EXPO

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