Un parfum de folie
Inspirations sauvages ou poétiques, techniques inédites… Dans le sillage des surréalistes naissent encore des essences délicieusement hors normes.
Associations d’idées flirtant avec l’absurde, poésie déroutante… Le caractère surréaliste de L’Ecume des jours s’exprime aussi dans certains parfums qui rejettent les schémas traditionnels de la création. Ainsi, Concrete de Comme des Garçons assume l’incohérence entre le brut de son flacon – du verre trempé dans du béton (concrete, en anglais) – et la langueur sensuelle de son santal épicé. Chez d’autres, c’est le nom même qui parle à rebours des conventions. Comme Dent de Lait de Serge Lutens, avec une note métallique froide (le goût du sang), planant sur des pétales doux bordés d’encens poignant. L’odeur du thuriféraire n’est pas si loin, annonçant la fin tragique de l’héroïne de Boris Vian, victime de son nénuphar planté dans le poumon. Une fleur ici déplaisante, inquiétante, et pourtant les fleurs imaginaires de la parfumerie séduisent par leur abstraction qui chamboule les sens. Un bon exemple en est Gabrielle de Chanel, un bouquet flou de pétales blancs qui caressent délicatement la peau. Suggérer la féminité plutôt que de l’imposer est bien dans la veine surréaliste. Tout comme Hot Cologne, dans la collection des Exceptions Mugler : un véritable oxymore olfactif tant la fraîcheur aromatique est ici contrariée de gingembre, cardamome et café amer. Mais pour s’imprégner encore plus de ce courant artistique, rien ne vaut le dernier-né des parfums Salvador Dalí, Sunrise in Cadaquès pour Homme. Si ce boisé épicé verse dans le classique de bonne facture, son flacon garde, lui, la signature du maître. ■