POLITIQUE ÉTRANGÈRE “UN SANS-FAUTE”
Selon notre chroniqueur, « la France est replacée au centre du grand jeu diplomatique mondial » d’où elle avait été « évincée » à cause de François Hollande.
En six mois d’une politique étrangère à la fois réaliste, énergique et imaginative, Emmanuel Macron a réussi à replacer la France au centre du grand jeu diplomatique mondial, d’où elle avait été évincée par la politique brouillonne et moralisante de François Hollande. Alors que ce dernier avait boycotté la célébration à Moscou, le 9 mai 2015, du 70e anniversaire de la victoire sur le nazisme, le président Macron a saisi l’occasion du 300e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la France et la Russie, pour inviter, le 29 mai 2017, le président Poutine à Versailles. Emmanuel Macron désapprouve la politique ukrainienne de la Russie depuis 2014, mais il ne veut pas pour autant la jeter dans les bras des Chinois et cherche à la ramener dans la famille européenne. Le profil culturel et politique de Donald Trump n’est pas la tasse de thé d’Emmanuel Macron. Mais, faisant passer les intérêts de la France avant ses goûts personnels, le président de la République a réussi (à la différence de la chancelière allemande) à instaurer d’étroites relations avec l’imprévisible président américain. La France ne saurait être alignée sur les Etats-Unis, mais il est de son intérêt de maintenir la qualité de son alliance multiséculaire avec eux. L’Elysée et la Maison-Blanche divergent sur des questions aussi importantes que la lutte contre le réchauffement climatique ou la manière d’aborder le conflit israélo-palestinien. Le succès de Macron est d’avoir maintenu une bonne relation Paris-Washington tout en réaffirmant avec clarté les positions de la France.
En matière d’opérations militaires extérieures, le président français ne partage pas l’idéologie néoconservatrice, qui privilégie la démocratie par rapport à la paix. Macron a compris qu’il était facile de renverser par les armes un dictateur, mais beaucoup plus difficile de gérer ensuite son pays. Voilà pourquoi il a dit qu’on ne lui avait pas présenté « le successeur légitime de Bachar el-Assad » et qu’il n’aurait jamais lancé une guerre de changement de régime en Libye s’il avait été président en 2011.
En fait, ce qui importe à Macron dans la diplomatie, ce n’est pas la posture, c’est l’efficacité. D’où son refus de donner des leçons de droits de l’homme à l’Egypte lors de la conférence de presse qui suivit sa rencontre avec le président al-Sissi. D’abord parce qu’il ne veut pas risquer d’affaiblir la lutte commune contre notre ennemi principal, qui est le djihadisme. Ensuite parce qu’il sait qu’il est plus efficace d’aborder en privé des cas individuels que de tancer en public un chef d’Etat fier de son indépendance. L’important désormais est de rétablir la paix civile en Libye et Macron a compris qu’on n’y arriverait pas sans l’aide de l’Egypte. Dans les crises du Moyen-Orient, profitant de l’effacement de la diplomatie américaine, Emmanuel Macron commence à s’imposer comme un « honest broker », un arbitre naturel, comme l’a montré son habileté à rendre son Premier ministre au Liban, après que ce dernier eut été « retenu » à Riyad.
Macron pense que l’Union européenne représente un formidable levier pour défendre les intérêts français, notamment face à l’hégémonisme commercial chinois et face à la prétention de la justice américaine d’imposer son droit au monde. Il veut donc redonner du souffle à l’UE. Mais son rôle de leader ne pourra être reconnu que lorsque la France aura respecté les critères de Maastricht, qu’elle avait naguère imposés à ses partenaires européens… » ■