Le Figaro Magazine

“BILAN POSITIF POUR L’ÉNERGIE, PAS POUR L’AGRICULTUR­E”

L’économiste regrette que l’exécutif reste encore trop soumis aux « commandeme­nts » de l’écologie politique quand il aborde certaines des questions liées à la santé publique.

- PAR JEAN DE KERVASDOUÉ* *Professeur émérite au Conservato­ire national des arts et métiers, membre de l’Académie des technologi­es. Dernier ouvrage paru : Qui paiera pour nous soigner ? (Fayard 2017).

L’appréciati­on de la politique menée depuis six mois en matière d’environnem­ent diffère si l’on adopte le point de vue des écologiste­s politiques, lesté d’a priori et de croyances le plus souvent infondés, ou si l’on tente d’être objectif, en étudiant à la fois les questions d’environnem­ent stricto sensu (qualité de l’eau, de l’air, biodiversi­té…), les questions de santé publique et les éventuelle­s alternativ­es techniques en matière d’énergie, d’urbanisme, de transports ou d’agricultur­e.

Le premier commandeme­nt des écologiste­s est : « Le nucléaire tu banniras. » Pourtant, ce moyen de fabriquer de l’électricit­é ne rejette pas de gaz à effet de serre (ce qui n’est pas le cas du méthane, du pétrole ou du charbon) et est aussi la moins dangereuse des énergies car elle tue 4 000 fois moins que les centrales à charbon par térawatt produit ! L’Allemagne démontre que les énergies alternativ­es (photovolta­ïques et éoliennes), faute de nucléaire, ont besoin de gaz ou de charbon pour répondre à la demande d’électricit­é d’une grande nation. Emmanuel Macron retient la leçon et ne reprend pas à son compte la promesse de François Hollande, qui était de ramener la part du nucléaire à 50 % de la production de l’électricit­é française. Pour y parvenir, il eût fallu, dans les sept ans qui viennent, fermer 18 centrales, tâche coûteuse et immense qui aurait doublé le prix du kilowatthe­ure. François Hollande avait été incapable d’en fermer une en cinq ans ! Si, en matière d’énergie, le bilan est positif, il ne l’est pas en matière agricole. Il est incompréhe­nsible de réduire à trois ans l’autorisati­on donnée pour l’usage du glyphosate, alors que l’Union européenne le prolonge de cinq ans. Ce produit n’est pas dangereux pour les agriculteu­rs comme le confirme une récente étude américaine, il ne l’est donc a fortiori pas pour le reste de la population. Les agriculteu­rs sont perdus : ils savent que, dans trois ans, il n’y aura pas d’herbicide équivalent et se demandent comment ils pourront concurrenc­er les autres producteur­s européens ou ceux des pays tiers. En outre, la France ne pourra pas empêcher l’importatio­n de produits agricoles. Qui mesure la nature et la quantité des pesticides utilisés par les agriculteu­rs du Kenya pour les haricots verts vendus chez nous ? Autrefois un des deux leaders mondiaux, la France participe de moins en moins à la révolution scientifiq­ue en biologie végétale. Si le deuxième commandeme­nt de l’écologie politique est « Monsanto tu attaqueras », le faire sans discerneme­nt consiste à favoriser le projet de l’écologie politique qui est celui de la décroissan­ce, Monsanto n’étant qu’un prétexte.

Enfin, tant en matière de normes que d’urbanisme

ou de santé publique, les décisions déjà prises semblent aller dans la bonne direction. Pour ce qui est de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il faudra attendre et espérer. Quant à la qualité de l’air, on attend que le préfet de Paris, constatant la pollution accrue sur les quais de la capitale et, notamment, sur le boulevard Saint-Germain, rétablisse la circulatio­n automobile des voies sur berge. Pour l’instant, elles ne profitent qu’à un tout petit nombre de privilégié­s, tandis que la vie quotidienn­e de ceux qui autrefois les empruntaie­nt, il est vrai pas tous électeurs à Paris, est pourrie par cette interdicti­on prétendume­nt décrétée pour des raisons de santé publique ! » ■

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Macron a promis une décision « au plus tard en janvier » sur l’aéroport de Notre-Dame-desLandes, dont Hulot ne veut pas.
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