SUITE (ET FIN)
Le quotidien ennuie. L’homme a soif de feuilleton. Les sagas comblent ce désir. Jadis, on disait suite romanesque. Les Français étaient champions dans cette catégorie. Balzac avait donné le ton avec sa Comédie humaine. On en avait pour toute une vie. Zola ne fut pas en reste. Les RougonMacquart résumèrent le second Empire en vingt volumes. Jules Romains grimpa sur la plus haute marche du podium. Il lui fallut vingtsept tomes des Hommes de bonne volonté pour s’attacher aux pas de Jallez et Jerphanion. Ah, la rue d’Ulm ! En comparaison, Georges Duhamel avec sa Chronique des Pasquier (cinq volumes), Roger Martin du Gard et ses Thibault (huit volumes) faisaient figure de petits bras. Qui d’autre ? Il y a eu Les Rois maudits de Maurice Druon, mais Josée Dayan a posé ses grosses pattes sur ces successeurs de Philippe le Bel. Si nous ne nous trompons pas, Henri Troyat releva ses manches et s’attaqua aux Eygletière. On allait oublier Proust, le cher Marcel. Sa
Recherche du temps perdu appartient à ce genre en perdition. Le Britannique Anthony Powell marcha dans ses traces avec La Ronde de la musique du temps. Ces écrivains n’avaient pas le souffle court. Ils sculptaient l’époque. Leurs ouvrages ne demandaient qu’à remplir les bibliothèques. Il s’y passait une foule de grandes choses. Leurs descendants n’ont pas cette ambition. L’autofiction leur suffit. Moi, moi, moi. Il faut se tourner vers l’Angleterre direction Poudlard pour plonger dans Harry Potter. On ne va quand même pas acheter Cinquante nuances de gris, si ? Mieux vaut se rendre en Italie et suivre
L’Amie prodigieuse d’Elena Ferrante. La généalogie a déserté les romans. Les nombrils ont pris le pouvoir. C’est à croire qu’il n’y a plus de famille. Cette perspective serait trop décourageante. Voilà pourquoi les séries télévisées ont autant de succès. On y respire un oxygène plus vaste. Encore un peu de Downton Abbey ?
Les nombrils ont pris le pouvoir