GARE AU GARY !
CHERS AMATEURS DE FILMS FRANÇAIS,
il va falloir vous armer de patience pour clamer votre patriotisme cinématographique. Ce mois de décembre prend des allures d’enfer - blanc. Entre une Deuxième étoile aux Gets, où on prend les mêmes (Lucien Jean-Baptiste, Firmine Richard, Anne Consigny) et on recommence en moins bien, et un Tout là-haut à Chamonix (avec Kev Adams et Vincent Elbaz aussi crédibles en surfeurs des neiges et skieurs surdoués que François Hollande en champion olympique de décathlon), l’hiver s’annonce mal. Et que dire de Garde alternée, d’Alexandra Leclère, où deux femmes se disputent l’homme de leur vie comme s’il s’agissait de leur enfant ? L’idée de départ faisait craindre le pire : de ce point de vue là, c’est réussi. Le cinéma français ne serait-il plus bon qu’à divertir les enfants, comme y parviennent formidablement Alain Chabat et son réjouissant Santa & Cie (qui n’égaye pas que les petits…) et Antoon Krings, dont les
Drôles de petites bêtes enchantent ? C’est parce que nous refusions de céder à cette triste fatalité que nous avons jeté un oeil curieux (et même deux) à l’adaptation d’un des plus beaux romans du XXe siècle : La Promesse de l’aube, de Romain Gary. Hormis la prestation du XV de France face au Japon, le nombre d’entrées réalisées par l’épatant et grinçant The Square (moins de 350 000) et la réaction pitoyable de Jean-Luc Mélenchon à la disparition et aux obsèques de Johnny Hallyday, il n’y a guère de choses plus décevantes à se mettre sous la dent en ce moment. Narration paresseuse, direction d’acteurs inexistante (Charlotte Gainsbourg et Pierre Niney
jouent aussi faux que Phoebe avec sa guitare dans la série
Friends), dialogues forcés : là où tout paraît léger chez l’écrivain (notamment la description d’une mère ultrapossessive et un peu givrée), tout ou presque se révèle ici lourd et pataud. A l’inverse, la gravité et la noirceur qui émanent souvent du texte de Kacew-Gary deviennent ici comiques. Mais involontairement. Et l’aube devint crépuscule…
Post-apostrophum : y a-t-il une malédiction Gary ? En s’y frottant dans son roman Un certain M. Piekielny (Gallimard), l’excellent FrançoisHenri Désérable a lui aussi raté son affaire. A ne pas suivre, donc.