LES PASTELS SORTENT DE LEUR RÉSERVE
Comme en témoigne une exposition au Petit Palais *, il arrivait à Degas d’exécuter des pastels, une technique qu’avait rapidement adoptée Elisabeth VigéeLebrun, portraitiste préférée de Marie-Antoinette chassée par la Révolution. Parcourant l’Europe, elle avait trouvé là un moyen de peindre nécessitant moins de matériel et de préparation. L’exposition ouvre sur son délicat portrait de
La Princesse Radziwill réalisé à Saint-Pétersbourg en 1800, un des 130 pastels issus des collections du musée rarement exposés en raison de leur fragilité. Les impressionnistes appréciaient la spontanéité réclamée par cette technique. On admire ici la maîtrise de Berthe Morisot avec ses variations de verts à l’infini, et cette douce sensation de mouvement dans les feuillages du Parc (1874). Plus surprenant, Madame Alexis Rouart et ses enfants, exécuté par Degas en 1905 (photo, détail). La vue de l’artiste s’est déjà fortement altérée comme en témoignent les visages flous et l’absence de détails. Mais les formes soulignées par de larges traits de fusain, les stries et les zébrures intensifient cette scène de dispute et font vibrer les couleurs. Pendant six mois, on pourra admirer de véritables trésors signés Mary Cassatt, Renoir, Gauguin, Tissot, Jacques-Emile Blanche, mais aussi Charles Léandre et Redon (des symbolistes qui exploitent merveilleusement les effets évanescents du pastel), avant qu’ils retournent dans l’ombre des réserves. SYLVIE MARCOVITCH
* « L’art du pastel de Degas à Redon », Petit Palais, Paris VIIIe, jusqu’au 8 avril 2018.