COURBE DE TEMPÉRATURE
Le Père Noël est sous antibiotiques
La grippe fait rage. Elle cloue au lit la moitié de la population. On ne parle plus que de ça. Les pharmacies ne désemplissent pas. Les yeux pleurent. Les nez coulent. Le Père Noël est sous antibiotiques. Des records de fièvre sont pulvérisés. Des réveillons s’annulent. Cette année, pas de foie gras. Les huîtres seront pour une prochaine fois. Le régime se limite à une tisane et à des biscottes (sans beurre). Les plus vaillants sont obligés de rester couchés. La situation a ses avantages. Passé le gros de la crise, ce repos forcé équivaut à des vacances horizontales. Il faut prendre le bon côté des choses. Avec cette diète, les kilos superflus fondent comme les scrupules d’un ministre socialiste. On a la journée devant soi. Les siestes sont autorisées. Elles sont remboursées par l’assurance-maladie. Quelle joie de ne jamais quitter son pyjama ! On comprend soudain Hugh Hefner, le patron de Playboy, qui vivait en robe de chambre. L’emploi du temps en est tout bouleversé. L’oisiveté permet de découvrir des chaînes insoupçonnées sur le câble. Enfin, on peut rattraper les épisodes en retard de The Americans, la série sur la guerre froide, ou voir un incroyable documentaire sur Jim Carrey. Il sera loisible de se plonger dans le 2666, de Roberto Bolaño, un pavé de 1 020 pages, ou de se décider à lire la biographie de Churchill par Boris Johnson. Cela laisse même des moments pour regarder l’intégrale Dreyer en DVD. On s’habitue à ces menus plaisirs. Ils semblent naturels, être la loi. Surtout, que la température ne descende pas au-dessous de 38,5. Tout recommencerait comme avant. Le rétablissement guette. C’est un drame.