Le Figaro Magazine

En vue : Diane Kruger

Avec In the Fade, son compatriot­e Fatih Akin lui a offert son plus beau rôle. Grâce à lui, elle a pu enfin jouer dans sa langue natale et décrocher le prix d’interpréta­tion au Festival de Cannes.

- • CLARA GÉLIOT

Décembre 2016. A l’occasion d’un sujet intitulé « 50 raisons d’aimer la France », Diane Kruger avait spontanéme­nt répondu à notre appel pour chanter son amour des Parisiens dans nos pages. L’ actrice se reposait en Allemagne, où elle venait d’achever le tournage de Aus dem Nichts, de Fatih Akin. « Etre dirigée par ce grand cinéaste et tenir, dans ma langue natale, le premier rôle de son film m’a procuré une telle fierté que j’ai travaillé d’arrache-pied », nous confiait-elle alors. Décembre 2017. Un an, jour pour jour, après cette conversati­on téléphoniq­ue, on retrouve la dame en chair et en os – et en beauté – dans une suite de l’hôtel Fouquet’s Barrière, à Paris. Sa fierté est intacte. Et pour cause : le film, dont elle avait décelé l’importance, lui a valu, en mai dernier, d’être adoubée par le Festival de Cannes, qui lui a décerné le prix d’interpréta­tion féminine. Si ce drame – rebaptisé In the Fade – retrace avec plus ou moins de bonheur le combat que mène une femme pour rendre justice à son mari et à son fils assassinés dans un attentat, la prestation impeccable de Diane Kruger met tout le monde d’accord. Cette beauté hitchcocki­enne, captivante égérie de Chanel, apparaît ici le cheveu gras et sans autres artifices que des tatouages pour s’emparer du chagrin et de la rage de son personnage. « Adopter le look et les attitudes de Katja n’était pas si compliqué car pour avoir grandi avec elles, je connais bien ces filles de Hambourg. La difficulté était d’atteindre la profondeur du deuil. N’étant pas mère, il me fallait en plus trouver ce sentiment violent d’être arrachée à son enfant. » Pour tenter de ressentir cette peine innommable, Diane Kruger a poussé la porte des groupes de parole. Pendant six mois, elle a écouté les témoignage­s des proches des victimes de meurtres. « Je n’imaginais pas à quel point cela m’affecterai­t. Leurs histoires me hantaient et plus le tournage avançait, plus mon envie de leur rendre justice grandissai­t. » Une telle préparatio­n et un engagement aussi intime laissent des traces. Par cette expérience, elle a gagné une humilité plus grande, une envie de profiter des siens au quotidien et un trophée en or aux armes de la ville de Cannes, qui trône désormais dans la bibliothèq­ue de son appartemen­t new-yorkais. Naturalisé­e américaine, l’actrice a aussi élu domicile à Paris, où elle a débarqué à 16 ans pour se lancer dans une carrière de mannequin. C’est là qu’elle a appris notre langue, qu’elle s’est inscrite au Cours Florent sur les conseils de Luc Besson, qu’elle a rencontré Fabienne Berthaud – réalisatri­ce fétiche, qui lui offrira le rôle principal de son premier long-métrage, Frankie avant de lui faire une place dans tous ses films –, qu’elle a épousé Guillaume Canet, révélateur de son talent avec Mon idole. Mais c’est là aussi qu’elle a développé le goût de la gastronomi­e. « Quand je ne travaille pas, j’aime faire la cuisine, avouet-elle. D’ailleurs, en rentrant chez moi, je vais m’essayer à la bisque de homard ! » Si la France offre à cette jeune femme des plaisirs épicuriens et des rôles dans des films d’auteur (récemment, dans Tout nous sépare, de Thierry Klifa, mais aussi dans Les Adieux à la reine de Benoît Jacquot, Pour elle de Fred Cavayé ou Joyeux Noël de Christian Carion), les Etats-Unis lui permettent de s’offrir des virées avec son nouveau compagnon, l’acteur américain Norman Reedus, rencontré sur le dernier film de Fabienne Berthaud, Sky – « J’ai passé mon permis moto cet été, alors j’adore m’embarquer dans de grandes chevauchée­s » – et de se frotter aux grosses production­s comme l’Inglouriou­s Basterds de Tarantino, les Benjamin Gates de Jon Turteltaub ou Troie de Wolfgang Petersen.

En brouillant les pistes sur ses origines et ses familles de cinéma, Diane Kruger ne s’est pas laissé enfermer dans une case. Les drames, thrillers, comédies, films d’action, d’animation ou d’aventures qui égrènent son CV le prouvent. L’éclectisme relève-t-il de la chance ou d’un plan de carrière réfléchi ? « Les deux. J’ai toujours fait en sorte de ne pas être identifiab­le par une nationalit­é ou un genre cinématogr­aphique. Mais je constate parfois que c’est un piège car on ne sait pas toujours où je suis et comment m’aborder », admet-elle. Il faut croire, malgré tout, que ceux qui la cherchent la trouvent. Après quinze ans de carrière, l’actrice tourne toujours autant. On la verra ainsi dans JT Leroy aux côtés de Kristen Stewart et Laura Dern, elle sera au générique du prochain film de Robert Zemeckis, The Women of Marwen et se glissera bientôt dans la peau d’un agent du Mossad pour The Operative du cinéaste israélien Yuval Adler. Affaire à suivre.

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LA VENGEANCE D’UNE BLONDE Dans « In the Fade », de Fatih Akin (en salles le 17 janvier), qui vient de remporter le Golden Globe du meilleur film étranger, Diane Kruger brille. Une route toute tracée pour les Oscars ?

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